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LES FEMMES QUI SE FONT PASSER MAISTRESSES

Lucas Cranach l’Ancien

Fondation Bemberg, Toulouse.

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LES   FEMMES  QUI

SE   FONT  PASSER

MAISTRESSES

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Une fois de plus1, on a réuni avec plus ou moins de naturel deux farces indépendantes2, même si leur compilateur a fait quelques efforts pour atténuer les dissonances. La première, les Femmes qui se font passer Maistresses, va jusqu’au vers 343. Elle décrit deux femmes prêtes à tout pour obtenir un diplôme leur permettant de gouverner les hommes. Elle fut sans doute écrite vers 1500, pour le collège parisien du Cardinal-Lemoine, où l’on raillait les prétentions intellectuelles revendiquées par certaines femmes ; voir la notice d’Ung Fol changant divers propos.

La seconde farce, intitulée probablement les Femmes qui plantent leurs maris pour reverdir, va du vers 344 à la fin. Elle étrille les hommes qui suivent une mode efféminée. La mode dont il est question nous reporte au dernier quart du XVe siècle, et la présente farce pourrait donc être antérieure à l’autre. À la fin, une épouse plante son mari pour que sa « queue » reverdisse. Comme d’habitude, cette farce illustre au premier degré une expression : planter quelqu’un pour reverdir, c’est le planter là, le laisser. « Courez tost sans faire délay ! / Ou, certes, je vous planteray, / Mais ce sera pour reverdir. » (L’Aveugle et Saudret.) On emploie cette expression lorsqu’une femme abandonne son époux, comme c’est le cas ici. « Elle s’en va, et plante son mary pour reverdir. » (XV Joyes de Mariage.)

Source : Recueil de Florence, nº 16. Notre farce y est suivie par une autre, tout aussi misogyne, qui malmène des « étudiantes » plus douées pour l’éducation sexuelle que pour la théologie : les Femmes qui aprennent à parler latin.

Structure : Rimes plates. 5 triolets dans la première farce. 3 triolets et une ballade sans envoi dans la seconde.

Cette édition : Cliquer sur Préface. Au bas de cette préface, on trouvera une table des pièces publiées sur le présent site.

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                                                                         *

Farce nouvelle des

Femmes qui se font

passer Maistresses

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À quatre3 personnaiges, c’est assavoir :

       LE  MAISTRE  [Maistre Régnault]

       LE  FOL

       ALISON

       LA  COMMÈRE

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                        MAISTRE  RÉGNAULT  commence 4      SCÈNE  I

        Dieu bénye ces damoiselles

        Et aussi ces belles bourgoises !

        Je suis venu pour l’amour d’elles.

        Dieu bénye ces damoyselles !

                        LE  FOL

5      Et les hommes ?

                        MAISTRE  RÉGNAULT

                                       Ilz sont rebelles,

        Et font tousjours aux femmes noyses.

        Dieu bénye ces damoyselles

        Et aussi ces belles bourgoises !

        Pource que ces femmes sont courtoyses,

10    Et bénignes5, et gracieuses,

        Et nullement malicieuses

        — À Paris spécïallement6 —,

        Chacun si met son pensement7

        À les tromper et décepvoir.

15    Pour tant8, le pape y veult pourvoir,

        Esmeu de grande9 charité ;

        Et m’a donné auctorité

        Et commandé expressément

        Que je veinse diligemment

20    À Paris pour l’amour des dames,

        Et que je voulsisse les femmes

        À toutes choses supporter10.

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                        ALISON 11                                               SCÈNE  II

        Dieu vous gart, sire Magister !

        Saincte Marie ! dont venez-vous ?

25    Tousjours nous venez conforter.

        Dieu vous gart, sire Magister !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Je suis venu pour rebouter12

        Ceulx qui vous font tant de courroux.

                        ALISON

        Dieu vous gart, sire Magister !

30    Saincte Marie ! dont venez-vous ?

        [Raffardées tousjours serons-nous]13

        Pour nous oster le parlement14,

        Et tout par le consentement

        De nos maris, qui l’ont fait faire.

                        LE  FOL

35    Et ! vous veulent-il faire taire ?

        Par Dieu ! bien sont Jhénin[s] Cornés15,

        Et béjaunes, et sotinés16 !

                        [ MAISTRE  RÉGNAULT

        Qu’ung bel estront en leur figure ]17

        — C’est très notable18 nourriture —

40    Il leur puisse mésadvenir !

        Veulent-ilz voz langues tenir ?

        Par Dieu ! ilz ont perdu leur peine.

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                        LA  COMMÈRE 19                                  SCÈNE  III

        Aussi, au Cardinal-Lemoyne20,

        Magister, on nous a fait tort :

45    Il [s’y] dit qu(e) on nous batte fort

        D’ung gros « baston » faitis21 et court,

        Et qu’on nous tienne bien de court22

        De parler et de quaqueter ;

        Aussi, qu’on nous face tourner

50    En ung vaysseau23, se mestier est.

                        ALISON

        Vrayment, je ne sçay pas que c’est24

        Que tousjours ceulx du Cardinal

        Dient des femmes tant de mal.

        Par ma foy ! c’est mal dit à eulx.

55    S’ilz fussent doulx et gracieux,

        L’honneur25 des femmes fust gardé.

        S’ilz avoient bien tout regardé,

        Jamais ilz ne nous farceroient26,

        Mais loyaument nous serviroient,

60    Et nous garderoient nostre honneur.

                        LA  COMMÈRE

        Pour Dieu, Magister, monsïeur,

        Vueillez-nous, s’il vous plaist, donner

        Provision27 pour gouverner

        Nos maris et trèstous ces hommes.

65    Car chascun voit bien que nous sommes

        Par eulx, tous les jours, ravalées.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        V(e)ez cy unes bulles scellées28

        Que j’ay maintenant apportées

        De court de Romme, et impétrées29

70    Pour vous faire toutes Maistresses.

        Car vous estes grandes clargesses30 ;

        Et avez si parfondément

        Estudïé, et si longuement,

        [Et] mise vostre intencion

75    À mettre en subjection31

        Et suppéditer32 vos maris

        — Spécialement à Paris —,

        Qu’il est bien temps que vous soyez

        Graduées33, et que [vous] ayez

80    Sur la teste le bonnet ront34.

                        LE  FOL

        Les femmes [rage ainsi feront]35

        [Comme des mules desbridées,]36

        Puisqu’el(le)s seront auctorisées

        Par bulle, ainsi que vous verrez.

85    Par mon serment ! vous ne pourrez :

        L’Université s’i oppose.

        Car certes, à Paris, on n’ose

        Graduer nulles gens par bulle37.

        Par Dieu ! sire, vostre cédule

90    S’entent des clers38, non pas des femmes.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Le pape veult qu’elles soient Dames39

        [Et qu’elles soient tost graduées.]40

                        LE  FOL

        Yront-elles ès assembl[é]es

        Qu’on fait en l’Université ?

                        MAISTRE  RÉGNAULT

95    Par Dieu, tu es bien rassotté !

        Elles yront encorporées41.

                        ALISON

        Nous y serons bien honorées,

        Et jouirons des prévillèges.

        Nous saurons bien [tenir] nos sièges

100  Et nos lieux, comme il appartient.

                        LE  FOL

        Touteffoys, quant il me souvient,

        À ung point vous fault labourer42 :

        Yront-elles délibérer

        [Mesme] en la Faculté des Ars43 ?

                        MAISTRE  RÉGNAULT

105  Demandez-leur.

                        ALISON

                                    En toutes pars,

        Magister, [nous] voullons aller.

        Certes, nous sçau[r]ons bien parler

        Dedans44 toutes les Facultés.

                        LA  COMMÈRE

        [Dea !] toutes ces difficultés

110  Si ne sont de nulle valleur.

                         ALISON

        Certes, nous avons grant couleur45

        D’estre avecques theologiens46.

                        LA  COMMÈRE

        Médecins si47 sont bonnes gens.

        Brief, nous serons de tous requises.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

115  Vous avez toutes voz franchises48

        Ainsi qu’un Maistre doit avoir.

                        ALISON

        Nous ferons bien nostre debvoir

        De régenter en la mayson.

                        LA  COMMÈRE

        Magister, faictes-nous raison,

120  Puisque le pape le commande.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Or çà ! Dame[s], je vous demande

        Se vous avez du temps assez49.

                        ALISON

        Il y a jà deux ans passés

        Que je deusse estre mestrisée50 :

125  Depuis que je suis espousée,

        Je ne finay51 d’estudier.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Je n’y sçauroye remédier,

        Par Dieu, que n’eussez la maistrise52.

                        ALISON

        Nous l’avons de piéçà53 requise,

130  Maistre, au [faulx54] Cardinal-Lemoyne,

        Et en avons prins trèsgrant paine ;

        Mais il nous fait55 tousjours grevance.

                        LA  COMMÈRE

        Nous avons tousjours grant fiance

        En vous, Magister, par mon âme !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

135  Vous me semblez bien jeune femme

        Pour estre si tost graduée.

                        LA  COMMÈRE

        Comment ! serai-ge reffusée ?

        Par Dieu, j’ay bonne voulenté !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Combien y a-il, en vérité,

140  Que vous estes en mariage ?

                        LA  COMMÈRE

        C’est une question sauvaige56.

        C’est assez, puisque je le suis.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Ha, dea ! m’amye, je ne puis

        Vous graduer se n’avez temps57.

                        LA  COMMÈRE

145  Il y a environ deux ans,

        Maistre, que je suis en mesnage.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Et sçavez-vous bien tout l’usaige

        Comme(nt) on gouverne ces marys ?

                        LA  COMMÈRE

        Il n’y a femme dans58 Paris

150  Qui le saiche mieulx que je fais :

        Car tous les jours, deux ou trois foys

        Mon mary est trèsbien batu.

        Puis il me dit : « Et ! que fais-tu ?

        M’amye, ce n’est pas bien fait ! »

155  Puis je dis : « Villain contrefait,

        Je te tueray trèstout de coups ! »

        Brief, il n’a point en moy repos59.

        Par Dieu ! il n’oseroit groncer60.

                        LE  MAISTRE  RÉGNAULT

        Vous sçavez assez pour passer

160  Et pour avoir vostre degré61.

                        LA  COMMÈRE

        Maistre, je vous en sçay bon gré ;

        Aultre chose ne demandoye.

        Par Dieu ! Magister, j’atendoye

        Trèstous les jours que venissez,

165  Affin que vous nous baillissez62

        Ung bonnet ront dessus la teste.

                        ALISON

        Par Dieu ! je maine telle feste63

        À celuy de nostre maison :

        Je luy fais de paine à foyson,

170  À celuy que j’ay espousé.

        Il ne seroit pas si osé

        De faire ung pas sans mon congé64.

        Et s’advient65 qu’il n’a point mangé

        Ne souppé, je le fais coucher ;

175  Et si, ne m(e) oseroit toucher,

        Dedans le lit… se je ne vueil.

        Il n’oseroit pas lever l’ueil66,

        De peur qu’il a quant il me voit.

        Brief, Magister, il n’oseroit

180  Faire chose sans le me dire.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Héé ! vous faictes rage de lire67 !

        Saincte Marie, quel(le)s escollières !

        Vous avez bien leu vos matières.

        Soubz qui avez-vous prins cédules68 ?

                        ALISON

185  A, ha,  Magister, nous n’en avons nulles ;

        Vous nous croirez en [no serment]69.

        Car j’avons70 esté longuement

        Estudier aux Jacobins71,

        Aux Carmes et aux Augustins,

190  Ès Mathurins, et ès Cordeliers,

        Et dessoubz plusieurs séculiers72.

        Je le vous prometz, par ma foy !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Par Dieu ! m’amye, je vous croy :

        Vous en portez trèsbien la chère73,

195  Et bien pert74 à vostre manière.

        Quel est le livre que vous portez

        Au Maistre lequel vous hantez75,

        Quant il vous dit vostre « leçon76 » ?

                        ALISON

        Certes, nostre Maistre, il a nom

200  Le Livre — [à ce qu’on]77 dit — des prestres.

                        LA  COMMÈRE

        Touteffois dient nos beaux maistres

        Que c’est le Livre de précum78.

                        LE  FOL

        Vous avez eu supra culum79,

        Quant la leçon vous ne sçavez ?

                        ALISON

205  Par Nostre Dame, vous bavez80 !

        Allez, allez !81

.

                                 Esse bien dit ?                                   SCÈNE  IV

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Or, me dictes sans contredit :

        Mistes-vous guères82 à l’aprendre ?

                        ALISON

        Quant mon Maistre y vouloit entendre83,

210  Je l’avoye tantost apris.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Par Nostre Dame ! j’ay mespris84

        De vous examiner si fort.

        Par Nostre Dame, j’ay grant tort !

        Monstrez voz cédulles, m’amye !

                        LA  COMMÈRE

215  Magister, je vous certifie

        Qu’on les m’a voulentiers seell[é]es85.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Quel Maistre les vous a baillées ?

        Vous sçavez qu’il vous fault tout dire.

                        LA  COMMÈRE

        Plusieurs les m’ont baillées, sire ;

220  Il ne fault jà les racompter86.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Vous estes dignes de régenter87

        Tout partout là où vous yrez.

        Par Nostre Dame ! vous aurez

        Le bonnet rond tout présentement.

                        LES  FEMMES  parlent ensemble et respondent :

225  Nous vous mercions humblement,

        Magister, jusqu(es) au déservir88.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Je vous vueil loyaulment servir :

        La maistrise je vous ottroy89.

.

                        LE  FOL 90                                              SCÈNE  V

        Holà, holà ! Attendez-moy !

230  Il y a opposition :

        Voicy ung mandement du91 Roy.

        Holà, holà ! Attendez-moy !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Et ! qu’est-ce-là ? [Qu’y a-il ?] Quoy ?

                        ALISON

        Faictes vostre commission.

                        LE  FOL

235  Holà, holà ! Attendez-moy !

        Il y a opposition :

        Je vous fais inhibition92

        De par le Roy ! Et vous deffens

        — Sur peine de payer despens —

240  Et, de par le Roy, fais deffence

        Que ne donnez point93 la li[c]ence

        À ces femmes, ne la maistrise !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Le pape si la m’a commise

        Par les bulles que vous véez.

                        LE  FOL

245  Le Roy vous mande que ne soyez

        Si hardy de le vouloir faire :

        Voicy lettres tout au contraire,

        Que j’apporte toutes propices.

                        ALISON

        Ces lettres sont [donc] subrétices94,

250  Vostre mandement ne vault rien !

                        LE  FOL

        Or çà, Maistre : vous sçavez bien

        Comment les marys s’i opposent.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

       Or, leur dictes qu’ilz se reposent,

       Car on n’en fera rien pour eulx.95

.

255  Et ! comment ? Sont-ilz envieux,

        Se ces povres femmes ont bien ?

        Au regard de moy, je me tien,

        Et le pape96, de leur costé.

                        ALISON

        Et aussi l’Université,

260  Les maistres et les escoliers

        S’ajoindront à nous voulentiers.

        Faictes ce que mande le pape !

                        LA  COMMÈRE

        Et nous fauldra-il une chappe97

        Comme à ung maistre, Magister ?

                        MAISTRE  RÉGNAULT

265  Pourquoy non ? Vous pourrez porter

        Ce qu’il appartient à ung98 Maistre.

                        ALISON

        Et pourrons-nous doncques bien aistre99

        Aucuneffois sur une mulle ?

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Je ne sçay [pas] se ceste bulle

270  En fait point quelque100 mention.

                        LA  COMMÈRE

        Ne faictes point dilation101 :

        Baillez-nous ce que demandons !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Or çà, doncques ! Or, atendons :

        Il vous fault faire les sermens.

275  Vous jurez que tous les tourmens,

        Tout le travail, toute la peine,

        Nuyt et jour, toute la sepmaine,

        Que vous pourrez et que sçaurez,

        À voz maris procurerez ?

280  Et cela vous voulez jurer ?

                        LES  FEMMES,  ensemble :

        Ouÿ, par Dieu ! Et procurer

        De les mettre à confusion.

        C’est certes la conclusion

        Et la fin à quoy nous tendons.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

285  Aussi, vous yrez aux pardons102

        Et là où bon vous semblera ?

                        [LES  FEMMES,  ensemble :]

        [Pour ces]103 maris, on ne fera

        Rien qui soit, mais trèsbien combatre !

                        [MAISTRE  RÉGNAULT]

        Et s’i veullent à vous débatre,

290  Vous commencerez à tencer,

        Vous parlerez sans point cesser

        Si fort que vous les ferez taire ?

                        LES  DEUX  FEMMES  ensemble :

        Magister, nous sçaurons bien faire ;

        Et ferons tant, que nous aurons

295  (Par Dieu !) ce que demanderons.

        Plus ne nous en fault sermonner.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Il vous fault à genoulx bouter

        Pour avoir absolution.

        En signe de perfection,

300  De ce bonnet rond vous couronne ;

        Et auctorité je vous donne

        Sur tous les maris, et puissance

        De les gouverner, et licence

        Et auctorité de tout dire,

305  Régenter de présent, et dire104,

        Et maistriser105 les aultres femmes

        Affin qu’elles soyent toutes Dames,

        À Paris par espécial,

        Et d’autre part en général.

310  Le pape si le veult aussi.

        In nomine Patris et filii !

                        LA  COMMÈRE

        Nous sommes en trèsgrant soucy,

        Magister, de sçavoir ung point :

        La bulle porte-elle point

315  — Aussi, le povez-vous passer ? —

        Que puissions nos maris laisser

        Quant bon et beau nous sembleroit ?

                        ALISON

        Hélas, Maistre ! Qui le pourroit106,

        On nous feroit une grant grâce.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

320  Je suis bien content qu’on le face,

        Ainsi qu’avez acoustumé.

                        ALISON

        Le pape nous a bien amé107,

        De nous pourvoir si grandement.

        Vous serez partout réclamé108.

325  Le pape nous a bien amé.

                        LA  COMMÈRE

        Vous ne serez jamais blasmé.

        Nous vous mercions grandement.

                        ALISON

        Le pape nous a bien aymé,

        De nous pourvoir si grandement.

330  Magister, à Dieu vous comment109 !

        Certes, nous allons commencer.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Dieu vous doint bon commencement !

                        LA  COMMÈRE

        Magister, à Dieu vous comment !

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Régentez fort et fermement,

335  Et ne faillez pas à tencer !

                        LA  COMMÈRE

        Magister, à Dieu vous comment !

        Certes, nous allons commencer.

                        MAISTRE  RÉGNAULT

        Or vous allez donc avancer.

        Et pensez de tromper ces hommes !

                        ALISON

340  Nostre maistre110, par Dieu, nous sommes,

        À ceste fois, levées sus :

        Nous sommes venues au-dessus.

        De ce, nous avons111 devisé

        ……………………….

.

*

[ LES  FEMMES

QUI  PLANTENT

LEURS  MARIS

POUR  REVERDIR ] 112

*

[ À quatre personnaiges, c’est assavoir :

       MARTIN,  le mary

       LE  FOL

       ALISON

       LA  COMMÈRE ]

*

.

                        MARTIN 113                                            SCÈNE  VI

        [……………………… -ré,]

        Il me fault estre bien tiré114

345  Et habillé mignotement,

        Pour recepvoir joyeusement

        Nostre Maistresse, que je voy.

        Il me fauldra tenir tout quoy115

        Et faire son commandement :

350  Car la bulle dit qu’autrement,

        El(le)s ont povoir de nous changer116.

        Quel habit pourray-ge songer

        À prendre, pour luy faire honneur

        En faisant ung peu du seigneur ?

355  Je feray le dymencheret117

        Pour mieulx faire le dameret118,

        Affin que je luy puisse plaire.

        Je la voy venir à son erre119 ;

        Sur la teste [a] ung beau bonnet.

360  Il me fault estre sadinet

        Et frisque120 comme ung amoureux,

        Et joliet et gracieux,

        Affin que de moy soit contente.

        Cest[e] robe si n’est point gente :

365  Elle est toute racaillefatrée121.

        J’en prend[r]ay une autre cintrée122

        — Devant (par Dieu) que je m’envoise123 —,

        Et la124 pièce portingalloise

        Pour mettre devant ma forcelle125.

                        LE  FOL 126

370  Il contrefait la damoyselle,

        Comme ces mignons de Paris

        Qui sont si songneusement nourris,

        Et sont127 si douilletz que c’est raige.

        Il ressemblent à [ung gent paige]128,

375  Tant sont beaulx, faitis et trétis129.

                        MARTIN

        Il fault ung chaperon faitis

        Qui soit de nouvelle façon130.

                        LE  FOL

        Vous serez ung mauvais garson131,

        Et ce n’est pas ce qu’il vous fault.

                        MARTIN

380  [Ce ceint ne]132 doit aller plus haut :

        C’est la façon de maintenant.

        Ne suis-je pas bien advenant ?

        Il ne me fault [plus] qu(e) une dague,

        Et je ne sçay quel autre bague133

385  Qu’on appelle une gibecière134.

        Mettray-je ma dague derrière135,

        [Pour estre plus gorrièrement ?]136

        Ha, par sainct Mor ! Vécy comment

        La portent ces dimencherés.

                        LE  FOL

390  S’escorchent-il point les jarrés137 ?

        Ceste manière est bien sauvaige !

.

                        ALISON 138                                              SCÈNE  VII

        Nous ne ferons plus le mesnage,

        Puisque le degré nous avons.

        Or, je vous prie que nous soyons

395  Ententives et diligentes

        — Puisqu’aussi nous sommes régentes139

        De faire aujourd’huy ung chief-d’euvre140,

        À celle fin qu’on se recuevre

        De la perte qu’on nous a fait141.

.

                        MARTIN 142                                            SCÈNE  VIII

400  Par mon âme ! je suis bien fait,

        Et mes soulliers bien en gallant.

                        LE  FOL

        Se il treuve ung estront vollant143,

        Par bieu, il luy crèvera l’ueil !

.

                        ALISON                                                   SCÈNE  IX

        Par ma conscience ! je vueil

405  Que mon mary soit atrappé.

.

                        LE  FOL                                                   SCÈNE  X

        Fait-il bien le veau eschappé144 ?

        Et ! je vous prie, faictes-luy place !

                        MARTIN 145

        Je ne sçay pas [quel train]146 luy face ;

        Je ne l’ay pas bien en mémoire.

                        LE  FOL

410  Comment [ce veau] peult-il tant braire ?

        Vécy ung [homme espris]147 d’amours !

        Scet-il pas bien faire ces tours ?

        Jamais ne se doit soussier.

.

                        ALISON 148                                             SCÈNE  XI

        Saincte Marie ! quel escuier149

415  Esse-là que je voy venir ?

        Par bieu ! il me fait souvenir

        De ces [gentils] gorriers de ville.

        Il est moult légier et habille150.

        Est-ce point ung clerc du Palais151 ?

                        LA  COMMÈRE

420  [Non,] il est moult gentil galoys152.

        Je cuyde que c’est ung changeur153.

                        ALISON

        Il doit estre petit mangeur,

        Puisque sa pance est [si] estroicte154.

                        LA  COMMÈRE

        Il semble estre [ung] homme de traicte155 :

425  Comment il est fort embridé156 !

                        ALISON

        Par Nostre Dame ! il est bridé157

        Affin que le froit ne le gaste158.

                        LA  COMMÈRE

        C’est ung escuier fait à haste159.

        Comme il est gent parmy le corps !

430  On voit les talons par-dehors160,

        C’est une chose acoustumée.

                        ALISON

        Ha ! c’est affin que la fumée

        Qui leur vient à cause de chault,

        Qui ne peult yssir par le hault,

435  Viengne161 par là ; car autrement,

        Ne pourroit yssir bonnement.

        Puis leurs pourpoins si fort estreignent162 !

        Aussi leurs chausses s’entretiennent163,

        Atachées si roide et si fort

440  Que, quant ung de leurs poulx164 les mort,

        Il[z] ne sçavent par où le prendre.

        Et aussi, pour faire descendre

        La fumée qui est en eulx,

        Pource qu’ilz sont tant chaleureux165,

445  Ilz ont les talons descouvers.

                        LA  COMMÈRE

        Ilz ont pris leurs habitz divers166

        Et toutes choses sadinètes167.

        Pour quoy leurs façons sont honnestes,

        En la pointe de leurs soulliers168.

                        ALISON

450  C’est pource que les bourreliers

        Veullent vendre trop cher leur bourre169 :

        Car vous voyez qu’aussi170 on fourre,

        À Paris, ces [gros] bourreletz

        De chaperons, qui sont si lais

455  Que la façon si n’en vault guière171.

                        LE  FOL 172

        Par mon serment ! une chauldière

        De deux seaulx y seroit assise173.

                        ALISON

        Mais d’où est venu[e] la guyse

        Que [soubz l]es penthoufles on mette,

460  En lieu du liège, une bûchette174 ?

        C’est le prouffit des savetiers.

                        LE  FOL

        Par sainct Jehan ! mais175 de[s] charpentiers :

        C’est œvre de charpenterie.

                        LA  COMMÈRE

        Et n’est-ce pas grant tromperie,

465  [Des esperons sans]176 chevaulcher ?

                        ALISON

        Vous sçavez qu’un cheval est cher,

        À Paris : n’en a pas qui veult177.

        Et pource que le cueur leur deult

        De veoir les aultres à cheval,

470  Pour appaiser ung peu leur mal,

        Ont pris ceste chevaulcherie.

                        LA  COMMÈRE

        Dictes-moy que ce signifie

        Qu’ilz ont leurs habis si cueillis178 ?

                        ALISON

        Ilz ont grant peur d’estre assaillis

475  Des pourceaulx, comme la pasture

        Qui chet179 ès boys pour nourriture :

        Pour tant se sont-ilz fait cueillir180.

                        LA  COMMÈRE

        Et ! qu’ilz devroient bien hault saillir,

        Puisque la robe est escourtée181 !

                        ALISON

480  Par bieu ! si est-elle crotée182,

        Non obstant qu’elle soit bien courte.

                        LA  COMMÈRE

        Il n’y a celuy qui ne porte,

        Quant je m’avise, la vesture

        Comme ung pourceau183. C’est grant ordure :

485  Cest habit [ord184] n’est point honneste.

                        ALISON

        Et pour tant, on seroit bien beste

        D’aller prendre en mariage

        Ung court-vestu pour son langaige185 ;

        Mais on doit aymer loyaument

490  Et recepvoir joyeusement

        Ceulx qui portent longue vesture.

                        LA  COMMÈRE

        Aussi vault mieulx la couverture186,

        Quant il fait froit, d’ung long habit,

        Que d’un qui est si trèspetit,

495  Ne que de robe découpée187.

                        ALISON

        Il me souvient d’une espousée188

        De ce galant qui se promaine.

        Par mon serment ! il met grant peine

        À se tenir bien cointement189.

500  Et ! vécy bon appointement190 :

        C’est mon mary, par Nostre Dame !!

.

                        MARTIN 191                                           SCÈNE  XII

        Ayez pitié de moy, ma femme,

        Pource qu(e) estes si grant Maistresse !

                        ALISON

        Vous ne povez ployer les fesses,

505  [Tant] vous estes roide attaché.

                        MARTIN

        Par bieu ! je suis si empesché

        De me tenir joliement

        Que je ne puis (par mon serment)

        Faire tout ce qu’il appartient192.

510  Mais dictes-moy ce qu’il convient

        À faire, et [bien] je le feray.

                        ALISON

        J’ay conclud que je vous lairay193,

        Puisque je suis si haultement194.

        Une bulle avons maintenant,

515  De court de Romme, qui enseigne

        Comment le pape veult qu’on preigne,

        Quant les marys sont inutilles,

        Autres — [mais] qu’ilz soient habilles195

        Et qu’il[z] sachent aux dames plaire.

                        MARTIN

520  Pourtant, j’ay voulu contrefaire

        Le mignon et le gracieux.

                        LA  COMMÈRE

        Et ! vous n’avez pas les cheveulx

        En Allemant196 : tout ne vault rien.

                        ALISON

        Aussi est-il dur comme ung chien197

525  Et sec : il ne se peult ployer.

                        LA  COMMÈRE

        S’il estoit verd comme ung osier,

        Il seroit [lors] doux comme ung gand198,

        Et ung trèsgracieux fringant199 ;

        Et les genoulx bien ployeroit200.

530  Et quant par les rues yroit,

        Il marcheroit si bellement

        [Qu’on cuideroit tout bonnement]

        Qu’il ne touchast201 du pied en terre

        Et qu’il eust des patins de voirre202.

535  Ce ne seroit que toute joye.

                        MARTIN

        Ha ! ma203 dame, pour Dieu ! que j’aye

        Provision de reffroidir204 !

                        ALISON

        Planter vous fault pour reverdir205

        Comme ung osier, pour cest yver206.

540  En ce nouveau temps207, pour[rons] veoir

        Se vous serez verd et bien ployant208.

                        MARTIN

        Dictes-vous à bon escient ?

        Pour Dieu, donc[ques], que je le soye !

        Mais par Dieu, se je ne pensoye

545  Avoir la teste et la queue verd209

        Et que je210 fusse plus gaillard,

        Je ne seroye jà planté !

                        LA  COMMÈRE

        Mais que vous soyez bien enté211,

        Par Dieu, tantost reverdirez ;

550  Et belle queue vous aurez,

        Je le vous dis à escient.

        Délivrez-vous appertement212 :

        Il fait trèsbon temps pour enter.

                        MARTIN

        Comment me voulez-vous planter

555  Affin que je soye plus beau ?

                        ALISON

        La teste [en] bas, comme ung pourreau ;

        On verra plus tost la verdure.

                        MARTIN

        Il convient doncques que j’endure

        Et que je soye en terre mis.

560  Or çà ! donc,  puisque m’avez promis

        Que je seray vert cest esté,

        Je suis d’acord d’estre bouté

        En la terre présentement.

        Or me couvrez bien doulcement,

565  Et gardez bien de me blesser.

                        LA  COMMÈRE

        Il fault ceste teste baisser,

        Pour estre bien enraciné213.

        Nous avons cy trop séjourné :

        Sus ! il est temps de la couvrir214.

                        MARTIN

570  Quant me fauldra-il descouvrir215 ?

        Seray-je en terre longuement ?

                        ALISON

        Tant216 que soyez notablement,

        Comme [ung bel] arbre, reverdy.

                        MARTIN

        Et217 seray-je bien desgourdy

575  Et tout vert en ce moys de may ?

                        LA  COMMÈRE

        Ouÿ, par Dieu ! Et aussy gay

        Que pourroit estre ung papegault218.

        Vous n’est[i]ez [rien] q’un loquebault219,

        Mais [pour peu qu’onques je le vueille]220,

580  Vous porterez semblable fueille

        Et telle fleur comme la rose.

                        ALISON

        [Pour ce], il fault bien qu(e) on l’arose :

        Le chault le pourroit bien sécher.

                        LA  COMMÈRE

        Il s’en fault doncques despêcher221 ;

585  Je vois quérir la chantepleure222.

                        MARTIN

        Par Nostre Dame ! je n’ay cure

        D’estre arosé : il fait trop froit.

                        ALISON

        Vous sçavez bien que c’est le droit223

        D’un arbre sec ; [si, l’endurez]224 !

                        MARTIN

590  Voire, mais vous me mou[il]lerez.

        Vrayement, je crains bien la froidure.

                        LA  COMMÈRE 225

        Pource que vostre teste226 est dure,

        Il la fault arroser souvent.

                        ALISON

        Par Dieu ! j’ay grant paour que le vent

595  Ne luy soit, au jourd’huy, contraire.

        Arosez-le bien, ma commère !

        On devient vert pour aroser.

                        LA  COMMÈRE

        Cecy le fera disposer

        À reverdir plus tost [qu’]ung moys.

                        ALISON

600  Arosez-le deux ou trois fois !

        N’espargnez pas l’eaue de Seine.

                        LA  COMMÈRE

        Il a jà une verte vayne227 :

        V(e)ez cy terre [bien] vertueuse !

                        MARTIN

        Au moyns serez-vous bien joyeuse,

605  Quant ma queue verte sentirez ?

                        ALISON

        Par ma foy ! vous reverdirez,

        Puis que la terre228 est labourée…

                        LA  COMMÈRE

        L’esté qui vient, vous fleurirez.

                        ALISON

        Par ma foy ! vous reverdirez.

                        LA  COMMÈRE

610  Quant de terre vous partirez,

        Vous serez vert comme porrée229.

                        ALISON

        Par ma foy ! vous reverdirez,

        Puis que la terre est labourée.

        Je fais trop longue demeurée ;

615  Par Nostre Dame ! je m’en vois.

                        MARTIN

        À Dieu, ma dame honorée !

                        ALISON

        Je fais trop longue demeurée.

                        LA  COMMÈRE

        Verdure est [ce jour] trop prisée230,

        Puis que les marys sont de boys231.

620  [Je fais trop longue demeurée ;

        Par Nostre Dame ! je m’en vois.]

                        ALISON

        Tandres seront comme poulletz232,

        Puisqu’ilz sont mis à la gellée233.

                        LE  FOL 234

        Ilz ont la queue si mouchée235

625  Qu’à peine la peuvent lever.

        Je croy qu’on les a mis couver236 :

        Ilz sont tous couvers [de paillaige]237.

        Par Dieu, v(e)ez cy bon personnage !

        Quant les maris sont bien couvers238,

630  On en va quérir de plus vers

        Ce pendant qu’il reverdiront.

                        ALISON

        Quant vos maris dessécheront239,

        Entre vous, femmes sadinettes,

        Et aussi qu’ilz commenceront

635  À délaisser les amourettes240,

        Pour avoir queues verdelettes,

        Plantez-les tost à la rousée241 !

        Puis alez aux jardins242 seulettes :

        La queue verte est bien prisée.

                        LA  COMMÈRE

640  Quant vous verrez qu’ilz laidiront

        Et seront secz comme espinettes243,

        Et que chose[s] ne vous feront

        Qui soient bonnes et doulcettes,

        Prenez toutes ailleurs244 chosettes

645  Pour faire la chose245 advisée.

        Et si, vous tenez joliettes246.

        La queue verte est bien prisée.

                        MARTIN

        Je croy que mes dois fleuriront :

        Je sens bien venir les fleurettes.

650  Mes genoulx si assouppliront ;

        Aussi feront mes esguillettes247.

        J’auray les jambes bien doulcettes.

        Ma femme sera rapaisée :

        Quant on a belle[s] tétinettes,

655  La queue verte est bien prisée.

                        ALISON

        À Dieu ceste belle assemblée !

        Je m’en voys au jolis bocquet248.

                        LA  COMMÈRE

        Je seray de verd affublée249.

                        ALISON

        À Dieu ceste belle assemblée !

                        LE  FOL

660  Gardez que ne soyez emblée250 !

                        LA  COMMÈRE

        Il ne m’en chault pas d’ung niquet251.

        À Dieu ceste belle assemblée !

        Je m’en vois au jolis bocquet.

.

                        MARTIN                                                  SCÈNE  XIII

        Comment ! seray-je tousjours sec252 ?

665  Par ma foy ! je croy [bien] que ouy.

        Certes, je suis prins par le bec253 :

        On m’a, comme [ung] arbre, enfouy.

        Les maris, si, sont au jourd’huy

        Trèstous pour reverdir plantéz.

670  Et nos femmes vont le pirdouy

        Dancer254, par bieu, de tous costéz.

        Femmes n’en tiennent plus de compte.

        Les maris sont en brief farcéz.

        Je m’en voys o255 ma courte honte.

.

                                       EXPLICIT

*

1 Voir la notice de Colinet et sa Tante, ou du Cousturier et le Badin.   2 Dans son édition, Jelle Koopmans est moins catégorique : « Il s’agit d’une pièce en deux temps ; on a même l’impression de la juxtaposition ou de la contamination de deux pièces différentes — la seconde partie n’a qu’un rapport faible avec la première. » Le Recueil de Florence. Paradigme, 2011, pp. 233-250.   3 F : cinq  (La liste des rôles ajoute : Et le mary. Ce rôle n’apparaît que dans la seconde farce, où toutes les rubriques le nomment d’ailleurs « Martin », et non « le mari ».)   4 Arrivant de Rome avec une liasse de papiers, il s’assoit dans une chaire de collège. Son clerc, qui est le personnage le plus sensé de la pièce, porte un habit de fou.   5 Douces.   6 F : especiallement  (Cette attaque visant la liberté de mœurs des Parisiennes resurgit aux vers 77 et 308.)   7 Sa pensée, sa volonté.   8 Pour cela. Idem vers 477 et 486.   9 F : grant  (La grande charité d’Alexandre VI, plus connu sous le nom de Borgia, est sujette à caution. Ce pape fut rappelé à Dieu en 1503, peu de temps après la création de la pièce.)   10 Et que je veuille soutenir les femmes dans tous les domaines.   11 Elle entre dans la salle de classe. Une écritoire d’écolier pend devant sa ceinture comme un pénis. L’aspect phallique de l’écritoire fournissait d’inépuisables jeux de scène : voir la note 45 de Jénin filz de rien.   12 Repousser.   13 F : Et serons nous tousiours raffardees  (Ce vers de retombée doit rimer avec le dernier vers du triolet.)  Nous serons toujours brocardées.   14 Le droit de parler. Cf. Resjouy d’Amours, vers 147.   15 Des imbéciles, puisqu’ils croient parvenir à vous faire taire. Le Fol de la Vie de sainct Didier met ce nom au service de la scatologie : « Jennyn Cornet,/ Veulx-tu point jouer au cornet/ Ou de la [corne]muse par darrière ? »   16 Des blancs-becs et des petits sots. Jaune-bec joue dans la Pippée, et Sottinet dans le Roy des Sotz.   17 Vers manquant. « Mais ung bel/ Estront emmy vostre visage ! » L’Aveugle et Saudret.   18 F : toute   19 Harnachée d’une écritoire phallique, elle entre dans la classe et répond à maître Régnaut, qui vient de s’exprimer. À l’origine, la prétendue Commère portait sûrement un nom, car il n’y a un rôle de commère [de voisine, d’amie] que dans la seconde farce : voir le v. 596.   20 Au collège du Cardinal-Lemoine : voir ma notice. Idem vers 52 et 130.   21 Bien fait. Idem vers 375 et 376. Double sens priapique du « bâton ».   22 Qu’on nous empêche.   23 F : boysseau  (Qu’on nous fasse rouler dans un tonneau, s’il en est besoin.)  Cette brimade était réservée aux matelots, mais une farce jouée au collège du Cardinal-Lemoine l’avait apparemment fait subir à des femmes. Dans le Mystère de Ste Barbe en 5 journées, la sainte sera mise « en ung tonneau, sans demourance,/ Lequel sera cousu de cloux ;/ Son corps sera dedans encloux/ Et puys roullé parmy la rue. »   24 Ce que c’est, pour quelle raison.   25 F : Lhomme  (Voir le v. 60.)   26 Ils ne nous ridiculiseraient dans leurs farces. Idem v. 673.   27 Une permission provisoire. Idem v. 537.   28 Voici des lettres portant le sceau du pape. Voir la note 9. Alexandre VI maria l’une de ses nombreuses maîtresses, Giulia Farnèse, à Orsino Orsini, lequel en fut vite privé. On a dit que pour empêcher l’époux récalcitrant de récupérer son bien, le pape notifia une ordonnance contre lui. Notre pièce fait de cette ordonnance une bulle papale qui autorise les femmes à quitter leur mari.   29 Que j’ai obtenues. La « cour de Rome » transcrit approximativement la Curie romaine. Idem v. 515.   30 Des clercs en jupon.   31 En sujétion, en esclavage. Une épouse est « maîtresse » chez elle quand elle a le dernier mot sur son mari : cf. les Drois de la Porte Bodés, vers 86, 202, 282 et 383.   32 À fouler aux pieds. Cf. le Chauldronnier, vers 6.   33 Que vous obteniez vos grades universitaires, vos diplômes. Idem vers 88, 92, 136 et 144.   34 Le bonnet des Docteurs. Idem vers 166, 224, 300 et 359.   35 F : ragassotiront  (Voir le v. 181. « Ceste marâtre/ Qui faisoit raige ainsi de tous ces gens abatre. » L’Enfer de la mère Cardine.)   36 Vers manquant. Les mules débridées sont des femmes qui ne respectent pas les conventions. Elles sont l’équivalent féminin des veaux échappés (vers 406). « Monstrans leurs tétasses ridées,/ Noz vieilles mules desbridées/ Qui sont, par chevaulx bien souvent,/ Fendues du cul jusqu’au devant. » Clément Marot.   37 Le pape n’intervient pas dans les décisions de l’Université : le roi Louis XII venait de s’affirmer « protecteur et conservateur » de la Pragmatique Sanction, qui limitait drastiquement le pouvoir du souverain pontife dans le Royaume. Voir la note 93. En 1512, une autre pièce de théâtre opposera Louis XII à un pape (Jules II) : le Jeu du Prince des Sotz.   38 Votre brevet s’applique aux clercs.   39 Élevées à une haute dignité. Idem v. 307. Paradoxalement, ce titre français n’est plus porté qu’en Angleterre : « Dame Felicity Lott. »   40 Vers manquant. Je le reconstitue d’après le vers 136.   41 En tant que membres de leur corporation.   42 Travailler.   43 L’une des Femmes qui aprennent à parler latin va devenir maîtresse ès Arts en maniant les arguties « desquelles on fait plainement/ Entendre q’un mary radote ».   44 F : En   45 De bonnes raisons.   46 L’une des Femmes qui aprennent à parler latin veut devenir théologienne.   47 Eux aussi. L’une des Femmes qui aprennent à parler latin veut être médecin, « pour faire son mary/ Devenir fol ou fort malade ». Celle qui se nomme Alison devient avocate, par amour du « droit »…   48 Vos privilèges.   49 S’il y a assez longtemps que vous étudiez. Voir le v. 144. L’ordonnance de Louis XII (voir ma note 93) stipule que les théologiens doivent étudier 10 ans, les docteurs en droit ou en médecine 7 ans, et les maîtres ès Arts 5 ans. Mais elle ne parle pas des sexologues.   50 Que j’aurais dû obtenir ma maîtrise. Même verbe à 306.   51 Je n’ai pas cessé.   52 Je n’y vois pas d’autre remède que de vous accorder la maîtrise.   53 Depuis longtemps.   54 Au perfide.   55 F : font  (Ce collège nous fait toujours du tort.)   56 Barbare. Idem v. 391.   57 Si vous n’y êtes pas depuis assez longtemps. Voir la note 49.   58 F : a   59 De paix. Les Parisiens prononçaient repou.   60 Protester.   61 Votre grade universitaire. Idem v. 393.   62 La nouvelle diplômée aurait dû dire « vinssiez » (comme Régnaut au vers 19), et « baillassiez » (comme le fait une vulgaire pâtissière dans le Pasté et la tarte).   63 Ironique : un tel tapage.   64 Sans mon autorisation.   65 F : souuient  (S’il advient.)   66 Me regarder en face. « Je n’oseroye/ Lever l’œil, quant elle est ainsi. » Le Povre Jouhan.   67 F : dire  (à la rime. Voir le v. 183.)  Vous êtes enragée d’étudier.   68 Sous quels maîtres avez-vous pris vos brevets ? « Sous qui » recèle la même ambiguïté qu’au vers 191.   69 F : nos sermens  (No = notre. Ce pronom picard était descendu jusqu’à Paris.)  Vous nous croirez sur parole.   70 Ce normandisme était lui aussi descendu jusqu’à Paris. Mais tout de même, le langage de nos deux diplômées n’est guère plus châtié que leurs mœurs. Elles sont moins universitaires qu’unies vers Cythère…   71 Chez les moines, les femmes étudient les spécialités érotiques. « Elle estudie sa game/ Avec les clercs de nostre église. » Les Queues troussées.   72 Sous des laïcs. Jeu de mots sur « ces culs liés » : faire l’amour consiste à lier deux culs, à « adjouster deux culz ensemble » (la Présentation des joyaux).   73 Vous avez une tête à faire cela.   74 Il y paraît bien.   75 Que vous fréquentez (y compris au sens sexuel).   76 Lecture d’un texte biblique. Double sens grivois : « L’un la fout en cul, l’autre en con./ Pour s’exercer en ce manège,/ Elle répète sa leçon/ Avecque le Sacré Collège. » Blot.   77 F : que on  (Le Livre des prêtres.)   78 Le Liber precum est un livre de prières. On prononçait précon, le con désignant le sexe de la femme.   79 Des coups de « verges » sur le cul. On prononçait culon : « Il fault qu’ilz ayent supra culons ! » Satyre pour les habitans d’Auxerre.   80 Vous bavardez à tort et à travers.   81 Alison chasse le Fol, qui s’enfuit.   82 Avez-vous mis longtemps.   83 Essayait encore de le comprendre.   84 J’ai eu tort.   85 Qu’on a volontiers apposé le sceau universitaire sur mes brevets. Mais « sceller » = tamponner, au sens érotique : cf. le Mince de quaire, vers 328.   86 Il n’est pas besoin de les énumérer.   87 De commander. Idem vers 118, 305 et 334. « Être digne », suivi d’un infinitif, peut s’employer sans « de » : « Y n’est pas digne/ Vestir un genderme de Dieu. » Troys Gallans et Phlipot.   88 Jusqu’à ce que nous vous rendions la pareille. Cf. le Dorellot, vers 321.   89 Je vous octroie le grade de Maîtresses.   90 Il fait irruption en brandissant un parchemin enroulé.   91 F : de  (L’injonction royale est un deus ex machina qui intervient quand l’auteur ne sait pas comment finir une pièce. C’est le cas dans Tartuffe, où un Exempt tient le rôle de notre Fol.)  Certains rois confièrent des missions plus ou moins diplomatiques à leur fou en titre d’office ; mais Louis XII n’en confia jamais à ses deux bouffons, Caillette et Polite.   92 Défense.   93 Que vous donniez (les 2 négations s’annulent).  En mars 1498, Louis XII avait promulgué une ordonnance confirmant la Pragmatique Sanction. À propos des nouveaux diplômés, il exigea « qu’iceulx graduéz aient estudié par temps suffisant, & qu’ilz soient de la qualité, & aient faict leurs diligences de tout, selon la teneur de ladicte Pragmatique ». Il ne fallait donc pas que les universités « promovent aucun à degré & honneur s’il n’est idoyne, & approuvé de meurs & de science, & qu’il ait mérité ». Par conséquent, même si on avait accepté les femmes, nos deux étudiantes n’auraient pu obtenir de diplôme.   94 Subreptices : obtenues grâce à des déclarations mensongères ou incomplètes.   95 Le Fol quitte la scène définitivement.   96 Ainsi que le pape. On retrouve ce féminisme exacerbé — qui était alors une preuve de faiblesse — dans Deux jeunes femmes qui coifèrent leurs maris, où maître Antitus ressemble fort à maître Régnault, et dans les Queues troussées, où maître Aliborum est lui aussi du côté des dames.   97 Grande cape fourrée que portent les maîtres de l’Université quand ils sortent.   98 F : une   99 Être. Dans les grandes villes aux rues boueuses, la mule était le moyen de transport des élites appartenant à l’université, la magistrature ou le haut clergé.   100 F : de  (La bulle du pape s’en tient probablement aux mules du pape.)   101 De report.   102 Ces pèlerinages servent d’excuse aux femmes qui veulent sortir sans leur mari. « En divers lieux (elles) vont gaigner les pardons/ Pour en leurs lacs attraper la “vitaille”. » L’Advocat des dames de Paris touchant les pardons Sainct-Trotet.   103 F : Et pour  (Voir le v. 148.)   104 Parler dans un amphithéâtre.   105 Être en mesure d’accorder la maîtrise.   106 Si nous le pouvions. Seuls les officiaux [les juges ecclésiastiques] pouvaient accorder aux femmes, et sous certaines conditions, le droit de divorcer.   107 Aimées. Les femmes peuvent désormais parler d’elles au masculin.   108 Invoqué comme un saint.   109 Je vous recommande à Dieu.   110 F : maistresse  (Voir le v. 199.)  Maître Régnaut n’est pas dans la distribution de la 2e farce.   111 F : auans  (Nous avons parlé pendant la pièce que vous venez de voir.)  Le compilateur a supprimé les 3 vers du congé final pour lier les deux farces par une rime, d’ailleurs moins riche que les autres.   112 Ici commence la seconde farce. Pour des raisons pratiques, je continue le numérotage des vers, des scènes et des notes.   113 Le vieux mari d’Alison est chez lui. Il se fait beau, en guettant par la fenêtre le retour de son épouse, qui est allée prendre ses grades universitaires en compagnie de sa commère.   114 Tiré à quatre épingles.   115 Tout coi, silencieux.   116 De changer de mari. Voir la note 28.   117 Le galant endimanché. Idem v. 389. Cf. les Botines Gaultier, vers 500.   118 Le damoiseau. Un dameret n’est pas un modèle de virilité ; mais Martin va renoncer à la sienne, puisque c’est désormais sa femme qui porte le bonnet professoral, et donc la culotte.   119 F : aise  (Avec une allure majestueuse. « Tout à loisir et à son erre. » ATILF.)   120 Gracieux et élégant. Non seulement l’adjectif « sadinet » s’accorde presque toujours au féminin (vers 447 et 633), mais en plus, le sadinet désigne le mont de Vénus : voir la note 2 du Dorellot.   121 Recalfater, ou recalfeutrer = boucher les fissures de la coque d’un bateau ; par extension, l’auteur lui donne le sens de rapiécer. Jeu de mots sur racaille, qui désigne le rebut de la société, y compris d’un point de vue sexuel : « À Dieu soyez, mes frippons et racaille ! » Discours de la vermine et prestraille de Lyon.   122 F : sentree   123 Avant que je m’en aille à la rencontre de ma femme. « Devant que je m’en voyse et que je ne soye plus. » Psaume 39.   124 F : une  (Une pièce de velours que les dames posent sur leur poitrine pour réduire leur décolleté. « Une robbe d’ung gris bien faicte (…),/ La belle pièce à la poictrine. » Guillaume Coquillart.)  La mode portugaise, un peu efféminée, faisait fureur parmi les courtisans : « Habillée à la portugaloise. » (Godefroy.) Sur les rapports entre le Portugal et l’homosexualité, voir la note 149 des Coppieurs et Lardeurs, où un minet plus qu’équivoque se fait traiter d’« amoureux de Portingal ».   125 Ma poitrine. Ce mot ne s’emploie que pour les femmes.   126 Dans la 1ère farce, le Fol participait au dialogue et à l’action. Maintenant, ce n’est plus qu’un fantôme qui n’est ni vu, ni entendu par les autres personnages, comme le Sot du Povre Jouhan, une pièce qui offre beaucoup de points communs avec celle-ci.   127 F : font  (Éternelle confusion entre le « f » et le « ſ » long.)  Douillet = trop doux, délicat.   128 F : une caille  (« Ung très bel et gent page richement habillé. » Antoine de la Sale.)  Tous les aristocrates homosexuels entretenaient un page. Bien avant Chérubin, ces derniers pouvaient être déguisés en filles : « (Elles) desguisèrent les paiges de l’assemblée et les habillèrent en damoyselles bien pimpantes et atourées. Les paiges endamoyselléz (…) se présentèrent. <Rabelais, Quart Livre, 10.> La confusion de notre éditeur est explicable : les cailles ont longtemps représenté les homosexuels, à tel point qu’en 1914, Francis Carco put raconter l’histoire du prostitué Jésus-la-Caille.   129 Bien faits (idem au vers suivant) et bien tournés.   130 À la dernière mode.   131 Vous ressemblerez à un gigolo.   132 F : Cecy  (Ma ceinture.)  Les snobs laissaient glisser leur ceinture au-dessous de la taille, pour être « ceints sur le cul ». La femme de Martin de Cambray <F 41> oblige son époux à suivre cette mode : « –C’est trop hault !/ –Plus bas ? –Voire dea, en ce point !/ Maintenant vous estes en point,/ Fricque, habile et poly…./ Vous en estes “saint sus le cul”. » Cf. le Résolu, vers 112.   133 Accessoire.   134 Bourse en cuir que les hommes accrochent à leur ceinture.   135 Pour les élégants, la dague n’est qu’un bibelot décoratif. Ils la portent donc à l’arrière de leur ceinture : « La renommée court grant erre/ Que dagues ont sur les rongnons [reins]. » Maistre Mymin qui va à la guerre.   136 Vers manquant. Pour être plus à la mode. Le vers 417 compare Martin aux gorriers, ces dandys qui passent leur vie à se pomponner. « Vivez ores gorrièrement ! » La Folie des Gorriers.   137 Quand ils marchent, la pointe de la dague ne leur écorche-t-elle pas les jarrets ?   138 Elle s’approche de la maison, avec sa commère. Toutes les deux sont coiffées d’un bonnet rond, et laissent pendre devant leur ceinture une écritoire en forme de pénis.   139 Un régent, au masculin, est un professeur d’université.   140 Un coup d’éclat dont notre mari sera la victime.   141 Que nous nous remboursions des humiliations qu’on nous a fait subir.   142 Il est toujours dans la maison.   143 F : voulant  (« Un estron volant, enveloppé dans une feuille de papier, & jetté par la fenestre. » Antoine Oudin.)  Ce jeu puéril semble avoir beaucoup plu aux collégiens : cf. les Sotz escornéz, vers 19-20.   144 « Ne fait-il pas bien le veau eschappé ? » John Palsgrave.   145 Il sort, suivi par le Fol ; mais il n’ose pas s’approcher de sa femme.   146 F : quon  (Quel comportement je dois avoir devant elle. « Quel train voulez tenir et faire ? » Les Brus.)   147 F : esperit  (Épris = enflammé. « Comme homme fort espris d’amours. » René d’Anjou.)   148 Elle aperçoit son mari travesti, mais ne le reconnaît pas.   149 Quel sodomite. Jeu de mots sur cul. Idem v. 428. « Et la chair qu’on prend par la bouche,/ L’escuyer luy met par le cu. » François Maynard.   150 Habile. Idem v. 518.   151 Les clercs de la Basoche jouaient des farces dans le Palais de la Cité. Leurs meilleurs ennemis étaient les collégiens du Cardinal-Lemoine. Dans Pour le Cry de la Bazoche, le 1er Suppôt de ladite Basoche veut « laisser le feu sainct Anthoine/ Au ladre Cardinal Le Moyne ». Marot disait déjà : « Que du grief feu de sainct Anthoine/ Soit ars [brûlé] le Cardinal Le Moyne,/ Ennemy des Bazochiens ! »   152 C’est un joyeux compagnon. Ou bien, avec une intention ironique : C’est un bon amant. Cf. Ung jeune moyne, vers 184 et note.   153 Un usurier, tant il a l’air riche. Mais aussi, par déduction : un homme qui change de sexe.   154 Martin a fait comme les élégantes qui, pour avoir la taille plus fine, serrent leur corset au point de ne plus pouvoir respirer : cf. le Povre Jouhan, vers 122-5.   155 F : crainte  (-oi- rime en -ai-, comme aux vers 409, 420, 534, 535, etc.)  Comme le savent encore nos cousins Québécois, un homme de traite est un marchand au long cours. Mais la traite est aussi l’action de tirer : on compare Martin à un cheval de trait.   156 Sa femme doit le tenir par la bride. « Mais quant ils sont mariéz, je les regarde embridéz et abestis mieulx que les aultres. » XV Joyes de Mariage.   157 Saucissonné dans ses vêtements.   158 F : taste   159 Écuyer = sodomite (note 149). « Fait à la haste » recèle un double sens : Habitué à la haste, la broche priapique ; voir le Dictionnaire érotique de Pierre Guiraud.   160 On disait que les chausses des courtisans pauvres étaient trouées aux talons. « Quant la chausse a mauvais talon,/ Il fault avoir des brodequins. » Gautier et Martin.   161 Sorte. La chaleur qui risquerait de leur monter à la tête peut s’évacuer par les chausses trouées, comme aux vers 442-445. Chez les femmes, elle s’évacue par la fente du sexe : Deux hommes et leurs deux femmes, vers 139-145.   162 Les serrent tellement.   163 Leurs bas sont reliés entre eux.   164 Un de leurs morpions.   165 Si chauds. Ce doublon des vers 430-436 est sans doute apocryphe.   166 Bariolés, comme le costume des fous.   167 Mignonnes. Idem vers 360 et 633.   168 Ils ne portent pas les coûteuses chaussures à la poulaine. Mais celles-ci étant démodées, ils portent peut-être les becs-de-cane, qui leur succédèrent : « Quand les hommes se faschèrent de ceste chaussure aiguë qu’on nommoit la “polaine”, l’on fit d’autres souliers qu’on nommoit “à bec de cane”, ayans un bec devant de quatre ou cinq doigts de longueur. » Guillaume Paradin.   169 On rembourrait quelquefois la corne de tissu creuse qui prolongeait les chaussures à la poulaine, réservées aux fous et aux hommes efféminés.   170 F : que   171 F : guerre  (Que leur fabrication ne vaut rien.)  Le bourrelet du chaperon est creux, et se nomme d’ailleurs le soufflet ; lorsqu’il est trop volumineux, on doit le rembourrer pour qu’il ne se dégonfle pas.   172 Toujours invisible et inaudible, il s’approche des deux femmes.   173 Le soufflet de son chaperon est si large qu’on pourrait poser dessus un chaudron capable de contenir deux seaux d’eau.   174 Les « claque-patins » se font remarquer en mettant sous leurs semelles de liège des semelles en bois qui claquent sur le pavé. Cf. Jéninot qui fist un roy de son chat, vers 247-8 et notes.   175 Plutôt.   176 F : Sans esperons de  (Les jeunes gandins désargentés portent des éperons pour faire croire qu’ils ont un cheval.)   177 Racine écrira dans les Plaideurs : « Les témoins sont fort chers, et n’en a pas qui veut. »   178 Si retroussés, pour qu’ils ne traînent pas dans la boue et la poussière. Idem v. 477. « De sa robe cueillie/ L’autre espan[ou]it les plis. » Guy Le Fèvre.   179 Qui choit, qui tombe des chênes. Ils ont peur que les cochons qui déambulent dans les rues de Paris* ne les prennent pour des glands.  *Voir la note 103 des Rapporteurs.   180 C’est pour cela qu’ils ont fait faire un ourlet à leur robe. Le bas de la robe s’usait vite, et on en coupait de temps à autre quelques centimètres pour la rajeunir : plus la robe était vieille, plus elle était courte. Les pauvres étaient donc « cours-vestus d’une vieille soie », comme les gorriers dont se moquent Gautier et Martin.   181 F : escoltee  (Voir le v. 481. « Tu as robe bien escourtée./ Ne doubte qu’elle soit crotée. » Le Brigant et le Vilain.)  Ayant une robe si courte, ils devraient pouvoir sauter plus haut.   182 Elle est pourtant crottée. « Si me fault-il trousser/ Ma robe, qu’el ne soit crottée. » (Saincte-Caquette.) La réplique suivante souligne la crasse volontaire dans laquelle se complaisaient les fils de familles.   183 Chacun d’entre eux porte des vêtements aussi sales qu’un porc. Les jeunes gens à la mode affectaient déjà d’avoir des habits et des cheveux négligés.   184 Sale.   185 En se fiant à ses beaux discours.   186 Il vaut mieux être couvert.   187 Ajourée de fentes qui laissent passer le froid.   188 Il me fait penser à une nouvelle mariée.   189 Gracieusement.   190 Voilà un bon tour. « J’ay pensé bon appointtement. » Farce de Pathelin.   191 Il essaie de faire une révérence, mais son costume trop serré l’en empêche.   192 Ce qui doit être fait en pareil cas.   193 Que je vous laisserai, que je vous quitterai.   194 Puisque j’occupe une fonction si haute.   195 D’autres hommes, pour peu qu’ils soient plus habiles. « Soi-ent » compte pour 2 syllabes, comme au v. 643.   196 Longs et frisés. « Ilz avoient les cheveulx crespeléz [crépus], retorceléz & retortilléz, tout ainsi comme les Allemans les portent jusques aujourd’huy. » Jean Lemaire de Belges.   197 Se dit d’une viande trop dure.   198 Docile. « Ell le rendra doux comme un gand. » Godefroy.   199 Galant.   200 F : playeroit  (Il ferait bien la révérence. « Ployez ces genoulz ! » Le Capitaine Mal-en-point.)   201 F : toucheroit  (Le vers précédent est perdu.)   202 Des patins (note 174) en verre. « Il yroit sur patins de voirre,/ Tant marche mignon le pavé. » Les Coppieurs et Lardeurs.   203 F : saincte  (Voir le v. 616.)   204 La permission de délacer le corset qui m’étouffe.   205 Il faut vous planter pour que vous reverdissiez.   206 Pour maintenant. C’est en hiver que dut être jouée cette pièce de Carnaval où tous les renversements carnavalesques et toutes les « inversions » s’en donnent à cœur joie.   207 Au printemps prochain. « J’ay ung beau kalendrier de bois/ Pour sçavoir les jours et les mois,/ Le Karesme et le nouveau temps. » Arnoul Gréban.   208 F : ployent  (Souple des reins.)   209 Avoir la tête verte = être têtu. « Teste testue, teste vert ! » (Tarabin Tarabas, F 13.) Teste Verte est l’un des Sotz triumphans.  Avoir la queue verte = bander. « De la nature des pourreaux, esquelz nous voyons la teste blanche et la queue verde, droicte et vigoureuse. » (Tiers Livre, 28. Rabelais compare les maris aux poireaux, qui sont plantés la tête en bas : voir le v. 556.)   210 F : ne   211 Pour peu que vous soyez bien greffé dans le sol.   212 Ôtez votre robe rapidement.   213 F : enraciene  (Avec l’aide des femmes, Martin fait le « poirier », la tête en bas. Beaucoup de comédiens étaient d’authentiques acrobates : voir le Bateleur, ou les Sobres Sotz.)  Devenu contre nature, Martin sera planté à l’envers. De même, les enfants d’Antiphysie [de Contre-nature] ont « les pieds en l’air, la teste en bas (…), veu que les cheveulx sont en l’homme comme racines, les jambes comme rameaux. » Rabelais, Quart Livre, 32.   214 De couvrir de terre sa tête. Il y a là un trucage qui nous échappe. Mais on pratiquait des effets spéciaux beaucoup plus complexes : dans nombre de Mystères, le bourreau décapite devant les spectateurs un saint dont la tête, nous dit-on, roule sur le sol !   215 Quand pourrai-je sortir de terre ? Mais dans les traités de médecine, « découvrir » se dit pour « décalotter ».   216 Jusqu’à ce.   217 F : En  (Et serai-je sorti de l’engourdissement hivernal ?)   218 Un perroquet, dont le plumage est vert.   219 Un loqueteux. « Ce n’est c’un loquebault. » Le Trocheur de maris.   220 F : par dieu quiconques ie vueil  (Pour peu que je le veuille jamais.)   221 Acquitter.   222 Je vais chercher l’arrosoir (rime en -ure). La commère entre dans la maison du couple.   223 Le sort.   224 F : et la nature  (Voir le v. 558.)   225 Elle revient avec un arrosoir.   226 F : queue  (Les femmes reprochent au mari d’avoir la tête dure et la queue molle. D’autre part, c’est la racine qu’on arrose, et en l’occurrence, la tête de Martin.)   227 Une raide verge, du latin vena. « Pour aucun des fais de nature,/ J’ay encore une verte vaine. » Ung jeune moyne.   228 Martin ne perçoit pas le double sens : Maintenant que mon vagin est labouré par d’autres que vous. « On labourera bien sa terre…./ Faictes labourer vostre terre ! » Raoullet Ployart.   229 F : porres  (La porée est un potage aux poireaux, de couleur verte. Cette pièce est résolument placée sous le signe du poireau et sous la couleur verte.)   230 La verdeur sexuelle des amants est aujourd’hui très recherchée.   231 Depuis que les maris restent de bois, n’ont plus d’érection.   232 Rime avec le « vais » du vers précédent, comme « bourrelets » rime avec « laids » à 453.   233 Ils sont exposés au gel. Mais aussi : Ils seront mous comme du poulet en gelée.   234 Le compilateur qui a greffé ce personnage à la seconde farce, prenant même la peine d’écrire son rôle en rimes mnémoniques pour soulager la mémoire des autres acteurs, vient de l’oublier pendant 159 vers !   235 Éteinte, comme une chandelle qu’on a mouchée. « Queu-e » compte pour 2 syllabes, comme aux vers 550, 636 et 639.   236 Qu’on leur a fait couver des œufs, tels des Sots.   237 F : dauantaige  (De paille, comme le nid des poules.)  « Pailler des arbres, des figuiers : les envelopper de paille pour les protéger contre la gelée. » Littré.   238 Sont couverts de terre, plantés : voir les vers 564 et 569.   239 F : decherront  (Deviendront secs, impuissants. Voir le v. 664.)   240 À vous faire moins souvent l’amour.   241 À la rosée, à l’aube.   242 Ce sont des lieux où l’on peut « consommer » sur place, comme les bosquets du vers 657. « Te donna-il pas quatre souz/ Pour te le faire dans les choulx/ Qui estoient en vostre jardin ? » Le Mince de quaire.   243 Comme des buissons épineux.   244 F : vos  (La « chose » désigne la verge. « Dieu luy doinct chose qui se dresse ! » Frère Phillebert.)   245 Le coït. « Pour faire la chose joyeuse. » ATILF.   246 Et pour cela, tenez-vous jolies.   247 Les lacets qui ferment ma braguette.   248 Je vais rejoindre mon amant dans un bosquet.   249 Le dos de ma cotte sera maculé par l’herbe verte sur laquelle mon amant va me coucher. Cf. le Résolu, vers 249 et note.   250 Enlevée. Mais on peut comprendre : Gardez-vous d’être amblée [chevauchée]. Le Sot du Povre Jouhan, qui a tant de rapports avec celui-ci, fait le même calembour dans une circonstance analogue : « Je croy qu’elle a esté emblée. »   251 Je m’en moque comme d’une pièce d’un centime.   252 Impuissant, dépourvu de sperme. Idem v. 641. Cf. le Ramonneur de cheminées, vers 330.   253 Elles m’ont pris à mon propre piège.   254 Toutes les danses symbolisaient le coït. « Luxure, accolle-moy, ma seur :/ Si dancerons le pirtouy. » Moralité du Lymon et de la Terre, T 19.   255 F : ou  (O = avec. Cf. les Esbahis, vers 215.)  Martin se remet sur ses pieds.