LES DROIS DE LA PORTE BODÉS

Rijksmuseum

Rijksmuseum

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LES  DROIS  DE

LA  PORTE  BODÉS

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La Porte Baudais fut d’abord une des entrées de l’ancien rempart qui protégeait Paris. Au début du XVIe siècle, l’époque qui nous intéresse, elle abritait un marché, et sa promenade était un lieu de rendez-vous bien connu : « Cela est plus commun, en France, / Qu’à Paris la Porte Baudés. » (Moral de Tout-le-Monde.) Jadis, pour vendre sous cette porte, les poissonniers payaient un droit qu’ils estimaient déraisonnable et injuste, et qui passa en proverbe pour critiquer les aberrations de la justice : « Il fut bien fondé à raison, / Le droit de la Porte Baudaiz ! » (Les Menus propos.) La farce que nous allons lire feint de croire que ce droit injuste est une nouvelle loi qui donne systématiquement raison aux femmes contre les hommes. Le juriste misogyne Guillaume Coquillart s’effarouchait déjà d’une telle perspective1 :

       Advisé me suis, au matin,

       De vous lire des droytz nouveaulx.

       Droytz nouveaulx, droytz espéciaulx,

       Droys dont on use par exprès.

       Ce ne sont pas droytz fériaulx,

       Les droys de la Porte Baudais !

       Nenny non : ce sont droytz tous frays,

       Droitz de maintenant, bref et court,

       Par les mondains du temps qui court….

       Ce droit deffend à povre, à riche,

       De laisser, par longues journées,

       Povres femmelettes en friche

       Par faulte d’estre labourées.

Et tout le reste à l’avenant. Ailleurs2, le même Coquillart donne ainsi la parole aux femmes :

       Nous avons pour nous, sur ce pas,

       Loys, chappitres gros et menus,

       La règle de droit, au surplus….

       Ce sont des paraphes nouveaulx

       Du droit de la Porte Baudet.

Il n’était pas rare qu’un acteur joue deux rôles distincts dans une même pièce. Nous en avons la preuve grâce aux quelques Mystères qui nous ont conservé le nom des comédiens face au nom des personnages qu’ils interprétaient. On appliqua ces restrictions de personnel à certaines farces : le Premier Voisin de l’Homme à mes pois, ayant fini sa prestation, revient sous le déguisement d’un Vicaire. Mais le régisseur et le copiste n’ont pas pris la peine de noter le nom du Vicaire dans les rubriques, destinées aux interprètes, et ils s’en tiennent au Premier Voisin. Nous constatons le même cas de figure et le même défaut de notation dans la présente farce : le comédien qui tient le petit rôle du Galant puis le rôle capital du Juge n’est inscrit que pour ce dernier. J’ai rendu au Galant les deux tirades qu’il prononce.

Source : Recueil de Florence, nº 20. Ce recueil comporte deux autres farces qui font mine d’accorder aux femmes des droits égaux — voire supérieurs — à ceux des hommes : les Femmes qui se font passer Maistresses (F 16), et les Femmes qui aprennent à parler latin (F 17).

Structure : Rimes abab/bcbc, rimes plates, avec 1 triolet.

Cette édition : Cliquer sur Préface. Au bas de cette préface, on trouvera une table des pièces publiées sur le présent site.

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Farce  nouvelle  trèsbonne des

Drois de la  Porte Bodés

& de fermer  l’huis

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À quatre3 personnages :

       [ LE  SAVETIER

         LA  FEMME

         LE   GALLANT

         LE  JUGE ]

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                        LE  SAVESTIER  commence 4               SCÈNE  I

        Dieu gard tous ceulx de nostre office5

        Et les autres pareillement !

        C’est ung mestier bon et propice,

        Mais c’on y gai[g]nast de l’argent.

5      J’ay telle soif, par mon serment !

        [Mais je n’ose]6 boire servoise :

        Quant j’en boy, elle fait tel noise

        En mon ventre que c’est merveille.

        S’une fois le vin les7 réveille,

10    Sav[e]tiers seront riches gens.

        Il me fault estre diligens

        Devers mon hostel me retraire8.

        Il me semble que j’os jà braire9

        Ma femme, et [si]10, en suis bien loing.

15    Dieu sçait comme j’auray du groing11,

        Maiz que venir elle me voye.

        Elle dira : « Bien froide joye12

        Puissiez-vous avoir des genoux ! »

        Et je diray : « Saint Jehan, mais vous ! »

20    Mais ce sera tout bellement13,

        Qu’elle ne m’oye : car vrayment,

        Se une foiz m’avoit ouÿ,

        Mieulx me vauldroit estre enfouy14.

        Elle est si malle15 que c’est raige !

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25    Çà ! il fault faire mon ouvr[a]ige                              SCÈNE  II

        Affin de gaigner ma journée.

        Que nostre feu fait de fumée !

        Il m’enfume toute la teste ;

        Mais qu’a-il à fumer ?

                        LA  FEMME

                                             Hé, beste

30    Que vous estes ! Si a couvert16 :

        C’est pour cest huis qui est ouvert,

        De derrière, par telle guise

        Que le froit vent qui vient de bise

        Souffle céans de tous costés.

                        LE  SAVETIER

35    Allez le fermer !

                        LA  FEMME

                                     Escoutez,

        J’ay bien autre besongne à faire.

        Mais vous, c’est vostre droit affaire.

                        LE  SAVETIER

        Allez le farmer17, je vous prie.

                        LA  FEMME

        Non feray, par saincte Marie !

40    Je ne suis pas encor(e) si serve18.

        Et ! cuidez-vous que je vous serve

        Comme ung prince ? Vous n’avez garde19 !

                        LE  SAVETIER

        Faictes donques que le feu arde20,

        Je ne puis laisser ma besongne.

                        LA  FEMME

45    Et j’ay à filler ma quelongne21,

        Qui me touche22 bien d’aussi près

        Que vostre ouvrage.

                        LE  SAVETIER

                                           Or sus ! après,

        Il fault que l’ung de nous y voise23,

        Ou certes il y aura noyse.

50    Je le vous dy à ung mot ront24.

                        LA  FEMME

        Il ne m’en chault pas d’ung estront25 !

        Et ! te26 cuide-tu faire craindre ?

        Quel hoste, [qui me]27 veult contraindre

        Qu’aille fermer l’huis de derrière !

55    Louez28 varlet ou chambèrière,

        De par Dieu ou de par le dyable !

        Je suis assez femme notable

        Pour tenir varlet ou servante.

                        LE  SAVETIER

        Se ne le fermez, je me vante

60    Que vous vous en repentirez !

                        LA  FEMME

        Par la croix bieu, vous mentirez29 !

        Qui, moy, que je fermasse l’uys ?

        Ainsy meschante30 que je suis,

        J’aymeroye mieulx estre assommée !

                        LE  SAVETIER

65    Que bon gré bieu de la fumée !

        Je me gâte tous les deulx yeulx.

        Allez fermer l’uys, pour le mieulx,

        Ains qu’il y ayt plus orde feste31 !

                        LA  FEMME

        Puisqu’i m’est monté en la teste32,

70    Se33 les yeulx vous devoient crever,

        Si ne me pourroye lever.

        Ne vous y attendez pas qu’i voise.

                        LE  SAVETIER

        Par ma foy ! le cul trop vous poise34,

        Ou c’est paresse qui vous tient.

                        LA  FEMME

75    Et à vous, coy ?

                        LE  SAVETIER

                                  Pas n’apartient

        Q’ung homme s’abesse à sa femme :

        On me réputeroit infâme

        Devant Dieu et devant le monde.

        Vas le fermer !

                        LA  FEMME

                                  On me confonde

80    Se g’y voys35 ne se je le ferme !

        Mais allez-y !

                        LE  SAVETIER

                               Je vous afferme

        Que se plus m’en faictes parler,

        Je vous y feray bien aller.

        Vas fermer cest huis !

                        LA  FEMME

                                            Non feray !

                        LE  SAVETIER

85    Non feras ?36

                        LA  FEMME

                               Non !

                        LE  SAVETIER

                                        [Donc, je verray]37

        Se tu seras mestresse ou non.

        Sui-ge point homme de renon ?

        Va tost fermer cest huis !

                        LA  FEMME

                                                  Mais toy !

                        LE  SAVETIER

        En grant paine vit, par ma foy,

90    Qui ne peut jouir38 de sa femme.

        Va tost fermer cest huis !

                        LA  FEMME

                                                 Mais toy !

        Tu yras, se tu veulx, toy-mesme.

                        LE  SAVETIER

        Esse tout ?

                        LA  FEMME

                           Ouÿ, par mon âme !

        Je le vous dis sans point de fable39.

                        LE  SAVETIER  frappe.

95    Farmez cest huis, de par le diable !

        Je le vous ay tant de fois dit !

                        LA  FEMME

        Ha ! que de Dieu soyes mauldit !

        M’as-tu frappé, villain [mastin]40 ?

        Foy que je doy à saint Martin,

100  Mieulx te vaulsist41 estre à Boulongne !

        Tu sentiras se ma quelongne42

        Porte bon son pour toy43 esbatre.

                        LE  SAVETIER

        Haro, ma femme me veult batre !

        Au meurdre44 ! À l’aide, bonnes gens !

                        [LA  FEMME]

105  Et ! me batras-tu ?

                        LE  SAVETIER

                                         Je me rends,

        Par ma foy, et mercys vous crie !

        Mais d’une chose je vous prie,

        Pour garder l’onneur de nous deux :

        Que criez ung cry très hideux ;

110  Et les voisins qui vous orront

        Si hault crier, ilz cuideront

        Que je vous bats45, entendez-vous ?

        Mais quoy ! j’endureray les coups

        Paciamment, soit droit ou tort46.

                        LA  FEMME

115  Je vous entens bien.47 « À la mort !!

        Au meurdre !! Mon mary me tue !!

        S’on ne m’aide, je suis perdue !!

        Ha, le mauvais !! Ha, le truant !!

        Me turas-tu, dy, chien puant ?

120  Las48, la teste il m’a assommée !! »

                        LE  SAVETIER

        Dyable y ait part, à la fumée !

        Par Dieu ! le cueur me disoit bien

        Qu’il n’en povoit venir nul bien ;

        Et trèsbien m’en suis apperceu

125  Par les horïons qu’ay receu49

        Dessus la teste et sur le dos.

                        LA  FEMME

        C’est par50 nostre huys qui n’est pas clos.

        Vous en fault-il tant sermonner ?

        Jamais n’en deussiez mot sonner51.

130  Vous dictes bien qu’entre nous, femmes,

        Caquetons tousjours ; mais52 vous-mesmes

        Ne vous en povez pas tenir.

                        LE  SAVETIER 53

        L’espaulle m’en fait souvenir,

        Je ne l’ay pas en oubly mis.

135  Çà ! Te feray ung compromis :

        Quiconques premier parlera

        D’entre nous deulx, l’uys fermera.

        En estes-vous [pas] bien contente54 ?

                        LA  FEMME

        In Jhen55, ouÿ !

                        LE  SAVETIER

                                    Et mon entente56

140  Est que vous le fermerez donques.

                        LA  FEMME

        La cause ?

                        LE  SAVETIER

                            Car je ne viz onques

        La femme qui se peust passer

        De caqueter ou de tencer.

        Leur langue [est] – par saint Matelin57

145  Est  comme le claquet58 du moulin :

        Jamaiz nul jour n’est à repos.

                        LA  FEMME

        N’esse pas, à nostre propos,

        Vous-mesmes qui l’avez conclus

        Et préposé59 ? Vous parlez plus

150  Que je ne fois60 de la moitié.

                        LE  SAVETIER

        Or je vous pry par amitié

        Que le premier qui dira mot,

        Qu’il ferme l’huis tout aussi tost

        Sans plus dire ne si ne quoy61.

                        LA  FEMME

155  Je le veulx bien.

                        LE  SAVETIER

                                     Et [aussi] moy.

        Or nous taison donc. Au surplus,

        Ne me dictes mot.

                        LA  FEMME

                                        Il est conclus62.

        (Que male mort vous puisse abatre !)

.

                        LE  GALLANT 63                                   SCÈNE  III

        Il me convient aller esbatre

160  À Saint-Lorens, il est mestier64.

        Je voy droit là ung savetier ;

        Demander luy vois à court plet65

        Par où g’iray, pour le plus net,

        À Saint-Lorens.

.

                                    Dictes, beau sire…                       SCÈNE  IV

165  Respondez-vous point ?… Qu’esse à dire ?…

        Hau ! mon amy, estes-vous sourt ?…

        Par ma foy, il fait bien le lourt !

        De malle fièvre soit-il oingt !

        Je cuide qu’i ne m’entent point.

                        Le Savetier luy fait des signes du doy.

                        LE  [GALLANT]  dit :

170  Et ! vécy pour estre esbahis.

        Il fait des signes, .V. ou .VI.66,

        De ses dois. Pas n’entens cela.

        Que devisent67 ces signes-là ?

        [Tu ne sçays]68 parler hault, Huet ?

175  Ha ! je voy bien qu’il est muet ;

        J’ay sans cause trop estrivé69.

        In Jehan, je suis bien arrivé70 !

        Et vous, ma doulce famelète :

        Estes-vous, comme luy, muecte ?

180  Ou, se vous ne daignez parler,

        Venez çà : il nous fault aller

        Parler d’une chose secrète.

        Car je vous tiens71 assez discrète,

        Si sage, [si] plaine de soing,

185  Que pas ne fauldroit72 au besoing.

        Venez après moy, s’il vous plaist.

                        LA  FEMME

        Ton corps soit mené au gibet,

        Fol malostru, meschant coquart73 !

.

        Il part bien74 que tu n’es qu’un paillart !                SCÈNE  V

190  Et n’a mye tenu à toy

        Que n’a fait son plaisir de moy,

        Cest homme ; maiz il n’avoit garde !

        Par ma foy ! quant je te regarde,

        Tu ayme[s  trop] mieulx estre infâme

195  Que d’avoir secourru75 ta fame

        Aulcunement, pour la deffendre.

        On te dev(e)roit la teste fendre,

        Ou [te] gecter dedens ung puis76 !

                        LE  SAVATIER

        Par saint Jehan ! vous ferm[e]rez l’uys,

200  Car vous avez parlé premier77.

                        LA  FEMME

        Puisque je suis sur mon fumier78,

        La croix bieu, je seray maistresse !

                        LE  SAVETIER

        Comment ? Vous avez fait promesse

        Que le premier qui parleroit

205  D’entre nous deulx, l’uys fermeroit.

        Je n’y entens ne fons ne rive79.

                        LA  FEMME

        Estrive80 hardiment, estrive :

        Tu n’y gaigneras jà, à moy.

                        LE  SAVETIER

        Hé ! dame, tenez vostre foy81

210  Et faictes ce qu’avez promis,

        Et obéissez à mes diz :

        L’uys devez fermer, c’est raison.

                        LA  FEMME

        Non feray, n’en nulle saison

        N’obéiray à ton affaire !

                        LE  SAVETIER

215  Par saint Jehan ! si pourrez bien faire.

        Hé ! belle dame, je vous prie,

        Ou non82 de la Vierge Marie,

        Que vous fermez l’huys83 de derrière.

        Cela ne vous coustera guère(s).

220  C’est de droit, vous le savez bien.

                        LA  FEMME

        Par ma foy ! je n’en feray rien,

        Ne jà n’obaïray à toy.

        Ainçoys84, obéiras à moy,

        Et feray pire que devant85.

                        LE  SAVETIER

225  Bien vous feray passer avant86,

        Et devant le juge venir !

        Car je puis dire et maintenir

        Que fermer devez l’uys par droit.

        Si le fermerez orendroit87,

230  Et deusse88 cent escus despendre !

                        LA  FEMME

        Hé ! méchant, tu te dev(e)roies pendre :

        Tu ne saur[o]ies finer d’ung blanc89.

                        LE  SAVETIER

        J’ay bon droit !

                        LA  FEMME

                                  Il ne90 sera franc,

        On en verra l’expérience.

                        LE  SAVETIER

235  Et ! par Dieu, dame, en [la] présence

        Je vous cyte91 devant le juge,

        Car à luy doit treuver92 refuge

        Chacun, [que] par droit luy amende93.

                        LA  FEMME

        La cro[i]x bieu ! tu payras l’amende.

240  Et si, endureras de moy,

        Entens-tu bien ?

                        LE  SAVETIER

                                      En bonne foy,

        Tu auras don[c] bon procureur94 !

                        LA  FEMME

        Cuides-tu, meschant maleureux,

        Que te craignes, ne ta puissance ?

245  Et ! je foiz ta95 malle méchance,

        Qu’afluber te puist96, et abatre,

        Et rompre le col !

                        LE  SAVETIER

                                      Quel emplaistre97 !

        Venez-vous-en avecques moy.

                        LA  FEMME

        G’y seray aussi tost que toy.

250  Cuides-tu que j’e[n] aye peur98 ?

.

                        LE  SAVETIER                                      SCÈNE  VI

        Dieu vous doint bon jour, monsïeur99 !

        Je vien icy plus100 que le cours

        Devers vous, pour avoir secours,

        Se c’estoit vostre bon pl[a]isir.

                        LE  JUGE

255  Dire povez bien à loisir ;

        Voulentiers vous escouteray.

                        LE  SAVETIER

        Monsïeur, je le vous diray.

        Il est vray que j’ay fait fermaille101

        Avecques ma femme, sans faille,

260  Que le premier qui parleroit,

        D’elle ou de moy, l’huys fermeroit

        Sans penser mal ne villenie.

                        LE  JUGE

        Est-il vray ?

                        LA  FEMME

                              Pas je ne le nie.

                        LE  SAVETIER

        Je vous requiers qu’on la condampne !

                        LE  JUGE

265  Ce seroit trop fait en béjaune102

        À moy, de juger quelque chose

        Se je n’entens et teste et glose103.

        Esse tout ce que tu veulx dire ?

                        LE  SAVETIER

        Elle ne me fait que maudire

270  En disant « la fièvre cartaine

        Vous tiengne en [très] male sepmaine »,

        Monsïeur, plus de .XII. foiz.

                        LE  JUGE

        Cella n’est pas bon, toutesfoiz,

        À bien trèstout considérer.

                        LE  SAVETIER

275  Quant je luy dis « vas l’uys fermer »,

        Elle dit que riens n’en fera.

        De mauldire104 ne cessera

        De « maleur » et de « malencontre »,

        [Et] de « malle rage ». À l’encontre

280  De vous, monsïeur, ne soit dit !

        Et veult, par son caquet mauldit105,

        Estre mestresse comme moy.

                        LE  JUGE

        Elle est malle fame106 pour toy,

        J’entens bien. Puisqu’il est ainsi,

285  Avant qu’elle parte de cy,

        Il convient qu’elle soit pugnie.

        Or çà ! que dicte-vous, m’amye ?

        C’est raison que je vous escoute.

                        LA  FEMME

        Sire, ne faictes nulle doubte

290  Que [se] je n’aye premier parlé107,

        Et mon mary bien ravallé

        Pour luy remonstrer la falace108,

        Force m’estoit que je parlasse :

        Selon nostre droit et raison,

295  Les hommes, en toute saison,

        Doivent estre sugès à nous109.

                        LE  JUGE

        Et dea ! desquelz droitz usez-vous ?

        Dictes-le-moy, pour abréger,

        Affin que je puisse juger :

300  Car ung homme, tant soit meschant,

        Ne doit point estre obaïssant110

        À sa femme se111 non en bien.

                        LA  FEMME

        Monsïeur, je vous diray bien

        Quelz prévilèges nous avons.

305  Sachez, de vray, que nous devons

        Trèsbien chastier et reprendre

        Noz mariz s’il veulent mesprendre

        En riens qui soit112 qu’il no[u]s desplaise :

        Nous les debvons, tout à nostre aise,

310  Chastier et bastre trèsbien.

        Et oultre plus, s’il y a rien

        À besongner113 en la maison,

        Selon nostre droit et raison,

        L’homme est tenu de faire tout.

315  Et [si j’en]114 veulx venir à bout,

        Il n’y doit jamaiz contredire,

        Ne nulle chose nous mesdire,

        Mais l’acomplir trèsvoulentiers.

        Vélà les estatus115 entiers

320  Que les femmes doivent avoir.

                        LE  JUGE

        Vraiement, je vouldroye bien sçavoir

        Dont sont venus les ordonnances,

        [Les estatus et les sentences]116

        Que vous m’avez cy récité.

                        LA  FEMME

325  D’ung des lieux de ceste cité

        Viennent, sans point faire de lâche117.

                        LE  JUGE

        Et dia ! il convient que je sache

        Qui est le hault Provincial118

        Qui a esté si libéral

330  De vous donner telle franchise119.

                        LA  FEMME

        C’est ung prévost que chascun prise,

        C’on dit de la Porte Bodés120,

        Dont nous sommes à tousjours-maiz

        Sur noz piéz121. Et d’ancienneté122,

335  Nous en avons l’auctorité.

        Lisez là tout le contenu.

                        LE  JUGE  regarde la lettre, et puis dit :

        Vécy, pour vous, trèsbien venu.

        Je treuve en escript cy-devant

        Que : « L’homme doit estre servant

340  De sa femme en toutes manières

        Pour escurer poilles, chaudières123,

        Faire lis124, hous[s]er la maison.

        Et s’il fault, que toute saison

        Il soit levé tout le premier125

345  Et qu’il se couche le dernier,

        Et qu’il destaigne126 la chandelle.

        Et de ce127, ne soit point rebelle.

        Les escuelles aussi laver.

        Et si, ne doit jamais baver128

350  De chose que face sa femme,

        Ou on le tiendra pour imfâme.

        La farine luy fault sasser.

        Et si, luy convient sans cesser

        Filler129 et faire la lessive

355  (Sans que jamais il en estrive130),

        Aller au moulin131, et au four132.

        Et puis quant viendra ou133 retour,

        S’il n’a trèsbien fait la besongne,

        Il doit avoir de la quelongne134

360  Deulx ou trois coups sans contredire. »

        Je ne sçay plus icy que dire135.

        Oncques ne vis si beaulx chapitres

        Pour les femmes, et plus beaulx tiltres.

        Il n’en fault plus tenir procès :

365  Les drois de la Porte Bodés136

        Doresnavent veulx maintenir.

        Or çà ! il vous fauldra137 chevir

        Aux estatus comme dit est.

        Et veulx (sans faire plus lons plès)

370  Que, incontinent que serez

        En vostre hostel, l’huis fermerez ;

        Et ainsi je le vous commande

        — Sur peine de trèsgrosse amende —

        Par nostre sentence et par droit.

                        LE  SAVETIER

375  Assavoir, qui appelleroit138,

        S’on y seroit jamais reçu ?

        Par ma foiz ! je suis bien déçu.

        Je n’y voy point de bon moyen.

                        LE  JUGE

        On doit prendre en gré mal et bien ;

380  Qui ne le veult faire, le lesse139.

                        LE  SAVETIER

        Chères dames, par ma simplesse,

        Il me conviendra140 fermer l’uys.

        Et ma femme sera mestresse,

        [Chères dames, par ma simplesse].

                        LA  FEMME

385  Se vous dictes chose qui blesse,

        Je vous jett[e]ré en ung puis !

                        LE  SAVETIER

        Chères dames, par ma simplesse,

        Il me conviendra fermer l’uys.

.

        Adieu vous dis tant que je puis,

390  Vous supliant [que], hault et bas,

        Recevez en gré nos esbas.

.

                                EXPLICIT

*

Giovan Francesco Straparola, dans le Piacevoli Notti, adaptera cette histoire en italien. Pierre de Larivey l’a remise en français dans les Facécieuses Nuicts du seigneur Jean Straparole, dont voici l’édition définitive de 1582.

Sennuce dict à sa femme : « Bédouyne, ferme l’huys, car il est temps de s’aller coucher. » « Fermez-le vous-mesmes si vous voulez ! » respond-elle. « Je n’en feray rien ! » Estans ainsi en ceste dispute, ny l’un ny l’autre ne vouloit fermer la porte, quand Sennuce dict : « Bédouyne, je veux faire un accord avec toy : que le premier qui parlera, de nous deux, fermera l’huys. » La femme, qui estoit toute poltronne de nature, & obstinée par coustume, s’y accorda. Ainsi, & l’un & l’autre n’osoyent parler, de peur de fermer la porte. En fin, la bonne dame, à qui le jeu commençoit à desplaire, d’autant qu’elle estoit abbatue du sommeil, laissa son mary sur un banc, & se despouillant, s’alla bien & beau coucher.

Quelque temps après, le serviteur d’un gentilhomme passa par la rue, auquel, de fortune, le vent avoit estaint sa chandelle en sa lanterne. Et voyant l’huys de ceste maison ouvert, entra dedans, criant : « Holà ! Qui est léans ? Je vous prie allumer un peu ma chandelle. » Mais personne ne respondoit. Ce serviteur marchant un peu plus avant, il trouva Sennuce couché sur ce banc, ayant les yeux ouvers, lequel il pria luy allumer sa chandelle. Mais il ne luy dict un seul mot. Au moyen de quoy, pensant que Sennuce dormist, le print par le bras, & commença à le tirer & secouer, disant : « Holà, mon maistre ! Que faictes-vous ? Parlez ! Allumez-moy ma chandelle ! » Mais Sennuce, encores qu’il ne dormist, de peur d’encourir en la peine de fermer la porte, ne voulut parler. Quoy voyant, le valet marcha un peu plus oultre ; & regardant de toutes pars, vit un peu de clairté qui reluisoit au foyer, duquel s’approchant, alluma sa chandelle.

Ce faict, & jettant sa veue de tous costéz, ne vit personne, sinon Bédouyne seule dans le lict, laquelle il appella par plusieurs fois. Mais elle ne voulut jamais parler, ne se mouvoir, de peur de fermer la porte. Le galant, qui la voyoit belle & gentille, & qui ne vouloit parler, se coucha doucement auprès d’elle. Et ayant mis la main à ses « fers141 », qui estoyent quasi tous rouilléz, les mit en la forge142, chose que Bédouyne endura patiemment sans sonner un seul mot, laissant le jeune homme (combien que son mary y fust présent) exécuter ses désirs.

Lequel party, Bédouyne se leva ; & allant vers la porte, trouva son mary qui dansoit, ses jambes sur un banc. Auquel, comme en tensant, elle dict : « Ô le brave homme que voilà, qui toute nuict a laissé la porte ouverte, & souffert que les hommes ayent entré jusques en son lict, sans toutesfois y avoir donné aucun empeschement ! Vrayement, vous méritez bien que l’on vous face boire en un soulier percé ! » Adonc, le poltron Sennuce, se levant, dict pour toute response : « Or va maintenant fermer l’huys, sotte que tu es ! Tu me le pensois faire fermer, mais tu es bien déceue. Ainsi sont chastiéz les obstinéz. » Bédouyne, se voyant avoir perdu, se leva & alla fermer l’huys, puis se retourna coucher avec son cornu mary.

*

1 Œuvres. Édition de M. J. Freeman, Droz, 1975, pp. 132-134.   2 Œuvres, pp. 18-19.   3 F : trois  (Voir ma notice.)   4 Il sort de la taverne et titube vers son domicile.   5 Les savetiers qui sont dans l’assistance. La pièce n’a pas été écrite pour une congrégation de savetiers, qu’elle malmène passablement. On arguë du fait qu’elle se termine sur un procès pour l’attribuer aux basochiens de Paris ; or, le congé final s’adresse aux « chères dames », qui n’étaient pas admises aux représentations que la Basoche donnait dans le Palais de la Cité. Bref, cette farce est destinée à un public populaire.   6 F : Que ie nosse  (La bière a un effet laxatif : « De la cervoise ? C’est merveilles/ Pour un homme qui a la foire. » Jehan qui de tout se mesle.)  Comme tous ses congénères, le savetier ne boit que du vin (vers 9).   7 F : se  (Si le vin incite au travail les savetiers, qui en boivent beaucoup.)   8 De retourner à ma maison.   9 Que j’entends déjà hurler.   10 Et pourtant.   11 Comment elle va me faire la gueule. Cf. les Cris de Paris, vers 389.   12 Qu’une mauvaise joie, qu’un malheur. Cf. Serre-porte, vers 21. Ici, le malheur invoqué prend la forme de la goutte des genoux, un grand classique de l’imprécation : « Que froide joye/ Puist-il avoir de ses genoulx ! » Chagrinas.   13 Je le dirai tout doucement, à voix basse.   14 Enfui. Ou enfoui au cimetière.   15 Mauvaise. Mais comme c’est elle qui porte la culotte, on peut lire « mâle ». Le savetier entre le plus discrètement possible par la porte de derrière en la laissant ouverte pour ne pas faire de bruit, et s’installe devant son établi. Sa femme boude sur une chaise, en filant sa quenouille. La cheminée fume à cause de l’appel d’air que provoque la porte ouverte. Dans le Résolu, au contraire, l’épouse dit qu’elle laisse ouvert pour évacuer la fumée.   16 Le feu a été couvert, sa flamme est étouffée. « Dea ! le feu si estoit couvert. » Légier d’Argent.   17 Fermer l’huis. Même prononciation parisienne au vers 95.   18 Je ne suis pas votre esclave.   19 Vous ne risquez pas. Idem vers 192.   20 Soit ardent, brûle bien.   21 F : quenoille  (Même rajeunissement maladroit aux vers 101 et 359.)  Je dois filer ma quenouille. « Je m’en vays filler ma quelongne. » Les Femmes qui font refondre leurs maris.   22 Qui m’importe.   23 Y aille. Idem vers 72.   24 En un mot. Même vers dans l’Aveugle et Saudret.   25 Ça n’a pas plus d’importance qu’une crotte.   26 F : me  (Crois-tu te faire craindre ?)   27 F : me qui   28 F : Louer  (Dans le Badin qui se loue, la femme ne veut plus être la bonne de son mari : « Vous louerez/ Une chambrière ou un varlet ! »)   29 F : mentires  (Par la croix de Dieu, vous n’aurez pas dit la vérité.)   30 Aussi misérable.   31 Avant qu’il n’y ait un plus vilain charivari.   32 Puisque je me le suis mis dans la tête.   33 Même si.   34 Pèse : est trop lourd pour que vous le leviez de la chaise.   35 Si j’y vais. Idem vers 162.   36 F répète LE SAVETIER Non feras, comme il va répéter le vers 88.   37 F : Dont tu verras   38 Celui qui ne peut venir à bout. On peut s’en tenir au 1er degré : beaucoup de savetiers alcooliques sont impuissants.   39 F : faille  (Je ne plaisante pas. « Ce que je dis, ce n’est pas fable. » Guillerme qui mengea les figues.)   40 Mot manquant, restitué par Jelle Koopmans : le Recueil de Florence, Paradigme, 2011, p. 310. Un mâtin est un gros chien : « L’avez-vous dit, villain mastin ? » Le Munyer.   41 Il vaudrait mieux pour toi.   42 F : guenoulle  (Note 21.)  Dans les Queues troussées, l’épouse d’un savetier menace son mari : « Vous aurez ung coup de quenouille,/ Aussi, se vous ne besongnez ! »   43 F : tox  (Si ma quenouille sonne bien sur ta tête vide, pour que tu prennes plaisir à cette musique.)   44 F : meurdrier  (Au meurtre ! Voir le vers 116.)   45 F : bates   46 À tort ou à raison.   47 Elle frappe son mari silencieux, tout en poussant des clameurs de mauvaise tragédienne en direction de la porte ouverte.   48 F : Helas  (La femme cesse de taper.)   49 Par les coups que j’ai reçus.   50 Par la faute de.   51 Vous n’auriez jamais dû en parler.   52 F : mes  (Mais vous-même, prononcé « mame » à la parisienne.)   53 Il masse ses contusions.   54 « Et ! n’estes-vous pas bien contens ? » Les Esbahis.   55 Par saint Jean ! Idem vers 177. Cf. Messire Jehan, vers 74 et 314.   56 Mon intention.   57 Le saint patron des fous. Cf. Tout-ménage, vers 227.   58 Planchette en bois qui, dans un moulin, produit un déclic incessant. « Vostre langue n’a de repos/ Non plus q’ung claquet de moulin. » Actes des Apostres.   59 Proposé.   60 Que je ne fais, que je ne parle. Effectivement, le savetier prononce 26 vers de plus que son épouse. Dans le Pèlerinage de Saincte-Caquette aussi, l’homme parle plus que sa femme bavarde.   61 Ni ceci, ni cela. « Respondre ne sçay cy ne quoy. » Les Miraculés.   62 L’affaire est conclue.   63 F : juge  (Idem au vers 170. Voir ma notice. Le rôle du « Galant » est suggéré par Bernard Faivre : Répertoire des farces françaises, p. 136. La nouvelle de Straparole que je publie en appendice évoque aussi « le galant ».)   64 J’en ai besoin. La foire Saint-Laurent se tenait dans l’actuel 10e arrondissement de Paris, en été (ce qui contredit le vers 33). On comprend que le Galant veuille aller s’y ébattre : selon le Tracas de Paris, « c’est le lieu de la goinfrerie,/ Le lieu de la galanterie,/ Où le temps se peut bien passer/ Si l’on veut argent débourser ». Par la porte ouverte, le Galant voit l’échoppe du savetier ; il y entre pour demander son chemin.   65 Je vais lui demander en peu de mots (plaid). Voir le vers 369.   66 Attendez 5 ou 6 minutes, que ma femme ne puisse plus se retenir de parler. Le langage des signes est d’un effet comique sûr : au chapitre 20 du Tiers Livre, le sourd-muet « Nazdecabre par signes respond à Panurge ».   67 Que veulent dire.   68 F : Ie ne scay  (Huet est un nom d’imbécile et de cocu : cf. le Roy des Sotz, vers 262.)   69 Contesté. Idem vers 207 et 355.   70 Je suis bien tombé.   71 F : mens   72 Qu’on n’en manquerait pas. Le Galant palpe la femme, et tente de l’emmener avec lui.   73 Elle chasse le Galant à coups de quenouille, puis se tourne vers son mari, qui arbore un sourire triomphant. Dans le Chauldronnier, une scène de ménage aboutit au même concours de silence. Le couple muet subit l’intrusion d’un chaudronnier qui conte fleurette à l’épouse ; mais là, c’est le mari qui réagit, et c’est la femme qui se réjouit d’avoir gagné.   74 Il apparaît bien (verbe paroir).   75 F : secourou de   76 Dans un puits. C’est ce qu’elle menace de lui faire au vers 386.   77 F : premiere  (On retrouve l’adverbe « premier » aux vers 136 et 290.)   78 Dans une situation favorable, comme un coq qui règne sur sa basse-cour, au sommet de son tas de fumier. Ici, une poule a détrôné le coq…   79 « Cela n’a ny fonds ny rive : n’a point de raison ny de suitte. » Antoine Oudin.   80 Conteste.   81 Votre parole.   82 Au nom. « Ou nom du benoist Roy de Gloire ! » Serre-porte.   83 F : nostre huys  (L’huis de derrière désigne aussi l’anus : « Et n’a-on cure de vostre huys de derrière,/ Car désormais, il est trop bricollé. » Le Vergier d’Honneur. Cf. Ung Fol changant divers propos, vers 233.)   84 Au contraire.   85 Qu’avant.   86 Marcher devant moi, comme un animal de ferme.   87 Maintenant.   88 F : deusies  (Même si je devais dépenser 100 écus pour cela.)   89 Tu ne pourrais gagner un sou, et à plus forte raison 100 écus.   90 F : te  (Tu ne pourras pas en jouir librement.)   91 Je vous cite à comparaître en personne.   92 F : autre   93 Pour qu’il obtienne réparation par la loi. « Je croy qu’il luy amendera. » ATILF.   94 Un bon avocat. Le Procureur de la Farce du Pet (note 98) veut que le mari de la péteuse avoue être l’auteur du délit. Pour la rime, on prononce « procureux » : « Procureux et advocas. » Satyre pour les habitans d’Auxerre.   95 F : la  (Ton mauvais chagrin, ton malheur. « Et ! il fait sa male meschance. » Le Gaudisseur.)   96 Qu’elle puisse t’affecter.   97 Quel remède (ironique). « Quel emplastre/ Contre une forcelle ydropicque ! » La Pippée.   98 F : paour  (« Ai-e » compte pour deux syllabes, comme à 290.)  Le couple se rend devant un juge. Dans la Farce du Pet, un juge est mis à contribution pour arbitrer une scène de ménage tout aussi urgente : qui, du mari ou de la femme, a pété ? Naturellement, la péteuse obtient gain de cause.   99 F : moult  (Mon sieur = monseigneur, comme aux vers 257, 272, 280 et 303.)   100 Plus vite. « Mort vient à nous plus que le cours. » ATILF.   101 Une convention. Mais le fermail est comme par hasard le verrou d’une porte.   102 Comme un blanc-bec, un débutant. Rime en -ane.   103 Le texte et le commentaire : le pour et le contre. « Je n’y congnoys teste ne glose. » Ung Fol changant divers propos.   104 De mal dire, de me menacer.   105 F : mesdit   106 C’est une mauvaise femme : « Qu’elle est male famme ! » (Massons et charpentiers.) Comme au vers 24, il y a un jeu de mots sur « mâle », renforcé par l’ambiguïté du vers qui précède. Et n’oublions pas que le rôle de la femme était tenu par un homme. Jody Enders* propose une troisième lecture : malle fame = mala fama, mauvaise réputation. En effet, le savetier se préoccupe beaucoup de sa réputation vis-à-vis du voisinage : vers 77, 87, 108.   *The Farce of the Fart and other ribaldries. University of Pennsylvania Press, 2013, p. 90.   107 Que si je n’ai pas parlé la première.   108 Son discours fallacieux.   109 Doivent être nos sujets, nos domestiques.   110 F : obaillant  (Voir le vers 222.)   111 F : ne  (Sinon pour de bonnes raisons.)   112 Fauter en quoi que ce soit.   113 S’il y a une tâche ménagère à accomplir.   114 F : sil en  (« Veux » est à la 1ère personne du singulier.)  Si je veux le violer.   115 Les statuts, les règlements. Idem vers 368. La simple fileuse de quenouille du début argumente désormais comme un vrai légiste. Jody Enders note « the Wife’s linguistic progress. Her grammar, syntax, and vocabulary become increasingly elaborate, formal, and downright legalistic as the action proceeds and as her power takes hold. »   116 Vers manquant.   117 Sans relâche. « Le povre Richart n’eut onc lasche/ Tant que nous fussions tous lasséz. » Le Pourpoint rétréchy.   118 Responsable — ecclésiastique, juridique ou universitaire — d’une province. Ce même Provincial féministe inculque aux Femmes qui aprennent à parler latin les sciences « desquelles on fait plainement/ Entendre q’un mary radote », et notamment le droit.   119 Liberté.   120 Si nous n’avions pas le vers 325, il serait permis de comprendre : un magistrat qu’on appelle M. de La Porte-Baudet.   121 Grâce auquel nous sommes pour toujours solidement établies.   122 De toute ancienneté, depuis longtemps. La femme tire de son corsage un brevet officiel.   123 Pour récurer les poêles à frire et les chaudrons. Le brevet de la femme doit beaucoup au rôlet du Cuvier.   124 « Faire le lict au plus matin. » (Le Cuvier.) Housser = balayer.   125 « Qu’il vous fauldra tousjours lever/ Premier pour faire la besongne ». Le Cuvier.   126 Qu’il éteigne. C’est le devoir du dernier couché.   127 De faire l’amour. « Et puis luy faire aussi cela. » Le Cuvier.   128 Bavarder, se plaindre.   129 Filer la quenouille (vers 45).   130 Il s’y oppose.   131 Porter le blé à moudre au moulin. « Mener la mousture au moulin. » Le Cuvier.   132 Aller faire cuire le pain et les pâtisseries au four du quartier.   133 Au (note 82).   134 F : quenoulle  (Note 21.)   135 F : lire   136 F : bouldes  (Voir le vers 332.)   137 F : fault  (Monsieur, vous devrez vous soumettre aux règlements.)   138 Allez savoir, si on faisait appel de ce verdict.   139 C’est à prendre ou à laisser.   140 F : conunidra  (Je devrai.)  Fermer l’huis = fermer ma gueule. Jody Enders (p. 89) établit un intéressant parallèle entre « shut it » et « shut up ».   141 Le maréchal-ferrant bat les fers du cheval avec son marteau, et le mari bat les fers de sa femme avec son pénis, quoique Sennuce ait laissé rouiller ceux de son épouse faute de les marteler. « Tousjours avons un fer qui loche,/ Ou quelque trou à restoupper. » Les Femmes qui font escurer leurs chaulderons.   142 « Vous estiez toutes deux soubz forge. » Les Queues troussées.

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