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L’HOMME À
MES POIS
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Délaissée par les éditeurs modernes1, cette farce normande écrite au milieu du XVIe siècle eut apparemment son heure de gloire, puisqu’on s’en souvenait encore en 1682 : je publie en appendice un extrait de l’Enfant sans soucy qui pioche bon nombre d’éléments dans ladite farce.
Le mari n’est désigné que par son emploi de badin ; on confiait toujours ce rôle verbal et physique à un acteur exceptionnel. (Voir la notice de Troys Galans et un Badin.) Bernard Faivre dit du nôtre : « Toute la pièce repose sur ce personnage clownesque…. La farce est avant tout un numéro d’acteur : le Badin paysan, buté, bêta, naïf.2 »
Source : Manuscrit La Vallière, nº 51.
Structure : Rimes plates, avec 4 triolets.
Cette édition : Cliquer sur Préface. Au bas de cette préface, on trouvera une table des pièces publiées sur le présent site.
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Farce nouvelle
à quatre personnaiges
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C’est à sçavoir :
LA FEMME [Périne]
LE BADIN, son mary [Colinet]
LE PREMYER VOUÉSIN 3
LE DEUXIÈME VOUÉSIN
[LE VICAIRE] 4
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LA FEMME commence. Et est L’HOMME À MES POIS 5
Hau, Colinet ! SCÈNE I
LE BADIN
Plaist-il, Périne ?
LA FEMME
Mais que faictes-vous là-derière ?
LE BADIN
Je lâches un petit6 d’urine.
LA FEMME
Hau, Colinet !
LE BADIN
Plaist-il, Périne ?
LA FEMME
5 Ne viendrez-vous poinct, sote myne7 ?
LE BADIN
Esgouter fault la pissotierre8.
LA FEMME
Hau, Colinet !
LE BADIN
Plaist-il, Périne ?
LA FEMME
Mais que faictes-vous là-derière ?
LE BADIN
Je racoutroys une chauldière9,
10 Ma mye,10 qui a le cul rompu.
LA FEMME
Vostre male mort, sot testu !
Cela n’est pas vostre mestier.
LE BADIN
Je racoustris bien, devant-yer11,
Le cul d’une femme12.
LA FEMME
Comment ?!
LE BADIN
15 De sa chauldière, voyrement,
Pource qu’il estoyt esrouillé.
LA FEMME
Et ! paix, paix, c’est trop babillé !
Que n’alez-vous au labourage,
Ainsy c’un homme de ménage13
20 Doibt faire pour aulx biens venir14 ?
LE BADIN
A ! il m’en vient de souvenir.
G’y voys15, mais il fault desjuner.
LA FEMME
Je ne vous séroys rien16 donner
Que du pain bis et des châtaignes.
LE BADIN
25 C’est à faire aulx gens des montaignes !
Ce n’est poinct ce que je désire ;
Je veulx…
LA FEMME
Quoy ?
LE BADIN
Je ne l’ose dyre.
Mon Dieu, que c’est un grand menger !
J’en vouldroys bien.
LA FEMME
Tant langager !
30 Dictes que17 c’est, que je le sache.
Du mouton ? Ou d’une béca[c]he18 ?
D’une perdris ? Ou d’un levrault19 ?
LE BADIN
Nénin, non, c’est bien20 qui myeulx vault :
C’est de…
LA FEMME
De quoy ?
LE BADIN
Ho ! saincte Voye21 !
35 Toult le ventre me rit de joye,
Quant g’y pence.
LA FEMME
Esse du mouton ?
D’un bon cerveau22 ? Ou d’un chapon ?
D’un lapin ? Ou d’une poulaille ?
LE BADIN
Nénin, non, ce n’est rien qui vaille
40 Auprès de cela que j’entens23.
LA FEMME
Voécy térible passetemps !
Encor[e] me fault-y sçavoir
Que c’est.
LE BADIN
Sy j’en povès avoir,
Je le dyrois bien souldain ; mais…
LA FEMME
45 Vous en aurez, je le promais.
Mais aussy, quant vous en aurez,
Incontinent [aulx champs irez]24.
LE BADIN
Touchez là25, le marché est faict !
Mais sy je n’en ay en efaict,
50 Ne pot, ne pelle, ne ménage,
Ne labour, ny le labourage 26
Par moy ne sera avancé27.
LA FEMME
C’est ainsy que je l’ay pensé ;
Je l’entens toult en ceste sorte.
LE BADIN
55 Jurez !
[LA FEMME]
Le deable vous emporte
En Enfer ou en Paradis
S’y n’est ainsy que je le dis !
[LE BADIN]
Le prométez-vous pas, au moins ?
LA FEMME
Ouy dea.
LE BADIN 28
Je vous prens pour tesmoingtz ;
60 Souvyenne-vous-en, mes amys !
LA FEMME
Dictes que c’est, voécy trop mys29 ;
Ne faictes plus du papelart30.
LE BADIN
C’est…
LA FEMME
Quoy ?
LE BADIN
C’est…
LA FEMME
Et ! quoy ?
LE BADIN
[C’est…] du lart.
O ! Périne, la grand vïande !
65 J’en veulx, car mon fruict en demande31.
Agardez32 : le ventre m’en sue.
LA FEMME
Vous me la baillez bien cornue33 !
À toulx les deables le saullard34 !
LE BADIN
Périne, ma mye, c’est du lard.
70 Qu’i soyt gros, gras35 comme le poing,
Pour gresser un morceau de pain.
J’en veulx, y se fault despescher !
LA FEMME
Par sainct Jehan ! alez en chercher :
Ciens36 n’en a morceau quelconques.
LE BADIN 37
75 Je ne suys plus laboureur, donques.
LA FEMME
D’aultre vïande aurez assez.
LE BADIN
Par ma foy, j’ey les rains cassés ;
Sans lard, je ne séroys rien faire.
LA FEMME 38
Voyez, c’est tousjours à refaire.
80 Esse ainsy que les aultres font ?
LE BADIN
Puysque je l’ay mys à mon front39,
De cest an40, rien je ne feray
Sy je n’ay du lard. J’en éray41,
Puysque je l’ay détermyné !
LA FEMME
85 Nostre trouye a cochonné42 :
Vous érez du lard des petis,
Vous y prendrez plus d’apétis.
Et ! levez-vous, je vous emprye !
LE BADIN
Ma foy ! j’éray du lard, ma mye,
90 Premyer43 que d’icy je ne bouge.
LA FEMME
Nous avons une44 poulle rouge :
Voulez-vous que on la mengons45 ?
LE BADIN
Je ne veulx poulles, ne cochons,
Ne oysons : je veulx du lard, merde !
LA FEMME
95 Fault-il que le labour se perde
Pour atendre tant sur le tard ?
LE BADIN
Aportez-moy donques du lard,
Et je seray bien tost levé.
LA FEMME
Cest homme[-cy est enrêvé]46.
100 Et ! levez-vous, je vous emprye !
LE BADIN
Je suys bien malade, ma mye.
LA FEMME
Je voys le médecin quérir.
LE BADIN
S’yl est lard, faictes-lay47 venir ;
Mais s’y n’est de lard, laissez-lay.
LA FEMME
105 Je ne sçay donq que je feray.
Synon48, n’avons[-nous] un pourceau ?
Tuons-le, puys en un vaisseau
Le salerons. Et par ce poinct,
Du lard aurez à vostre apoinct.
110 Je ne séroys faire aultre chose.
LE BADIN 49
Voy(e)là trèsbien parlé, ma roze.
Mon Dieu, que vous me faictes aise !
Hé ! Périne, que je vous baise !
J’éray du lard, du lard, du lard ! 50
LA FEMME
115 Colinet, ains51 qu’i soyt plus tard,
Aler vous fauldra, comme habille52,
Quérir du sel jusqu(e) à la ville,
Entendez-vous, pour le saller.
LE BADIN
Ouy dea, je suys prest d’y aler.
120 Mais de payer, quoy ? Je n’ay croys53.
LA FEMME
Colinet, nous avons des poys :
Y vous en fault un boysseau54 prendre
Sur vostre col, et l’aler vendre ;
Y vault sept soublz et un denyer55.
125 Et puys vous yrez au grenyer56
Quérir du sel.
LE BADIN
G’y voys courir.
Mais il se fault donq enquérir
Quant il sera jour de marché.
LA FEMME
Vous faictes bien de l’empesché !
130 Alez-y, puysque le vous dy.
Y sera demain samedy57.
Soyez sage, doulx et courtoys.
Et ne faictes pas grans despens.
LE BADIN
Par ma foy, Périne, g’y voys.
135 Mais reviendrai-ge assez à temps ?
LA FEMME
Ouy, ouy, ainsy que je prétemps.
LE BADIN
Bien, g’y voys. À Dieu !
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LA FEMME SCÈNE II
Quel marchant58 !
En est-il, sur terre marchant,
Encor un de telle mémoyre ?
140 Je croy que non.
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LE BADIN 59 SCÈNE III
Et ! voy(e)re, voy(e)re,
Nous arons du lard, sy Dieu plaist. 60
Or çà ! y me61 fault, sans long plaist
— Car je suys un marchant gaillard62 —
Pour achater un boisseau de lard
145 Pour menger de mes poix pillés63…
Ou bien y fault des poix sallés
Pour le sel du grenyer au lard ?…
Des poix… Le grand deable y ayt part !
Il ne m’en puyst [plus] souvenir.
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LE PREMYER VOÉSIN SCÈNE IV
150 Voésin !
LE IIe VOÉSIN
Hau !
LE PREMYER VOÉSIN 64
Veulx-tu pas venir
Au marché ?
LE IIe VOÉSIN
J’en suys bien d’acord :
De blé suys encor à fournyr65.
LE PREMYER VOÉSIN
Voésin !
LE IIe VOÉSIN
Hau !
LE PREMYER VOÉSIN
Veulx-tu pas venir ?
LE IIe VOÉSIN
Ouy bien. Mais y fault revenir66,
155 Que n’aye à ma femme discord.
LE PREMYER VOÉSIN
Voésin !
LE IIe VOÉSIN
Hau !
LE PREMYER VOÉSIN
Veulx-tu pas venir
Au marché ?
LE IIe VOÉSIN
J’en suys bien d’acord.
Me voélà prest.
LE PREMYER VOÉSIN
Marchons donq fort,
Car il sera tantost grand heure.
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LE BADIN SCÈNE V
160 Voécy où la Hale demeure.
Garder se fault de gens meschans.
Qu’i y éra de beaulx marchans67,
Mais68 que g’y soys !
G’y suys venu69.
Carculer70 fault par le menu
165 Comme il me fault jà gouverner71.
Toult premyer, me fault, au grenyer,
Vendre les poix de mon pourceau
Afin d’achater un boysseau
De lard… de poix… de sel… Bren ! Merde !
170 Y fault, afin que je ne perde,
Prendre de l’argent pour bailler
Des poix au grenyer du célier…
De la chambre72… Non : à la salle,
Pour avoir, du lard de la Halle,
175 Un boysseau de sel, c’est cela.
A ! je l’ay trouvé, le voy(e)là !
Et ! vertu bieu, qu’i m’a cousté !
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LE PREMYER VOÉSIN 73 SCÈNE VI
Voésin, as-tu pas escousté
Le propos de cest homme nisse74 ?
LE IIe VOÉSIN
180 Ouy, bien j’en rys.
LE PREMYER VOÉSIN
Qu’on me punisse
Comme un méchant75 sy je n’emporte
Sac et poix ! Demeure à la porte,
Et tu voyras tantost beau jeu.
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LE BADIN 76 SCÈNE VII
Çà, marchant[s, çà], çà, de par Dieu !
185 Qui aura, qui aura mes poys ?
Sont-y refaictz, sont-il de poys77 !
Y sont aussy nès78 c’une perle.
LE PREMYER VOÉSIN
Dieu vous gard !
LE BADIN
Qui esse qui parle ?
Qui en aura, qui en aura ?
LE PREMYER VOÉSIN
190 Parlez : combien me coustera
Ce boysseau de poix ?
LE BADIN
Nostre Dame !
Ce sont poys sucrés, c’est un basme79.
Ma foy, ce sont de mestres poys80.
LE PREMYER VOÉSIN
Vous estes sourd, comme je croys.
195 Respondez-vous poinct ?
LE BADIN
Sont-ilz beaulx !
Y cuisent bien en toutes eaulx ;
Et sy81, ne leur fault c’un bouillon.
LE PREMYER VOÉSIN
C’est grand plaisir !
LE BADIN
Sainct Jehan, c’est mon82 !
Ne m’en metez au feu qu’autant :
200 Par-dessus le pot croistront tant,
Qu’i vous en convyendra oster83.
Y sont tant bons à afester84 !
Y portent85 leur sel et leur lard.
LE PREMYER VOÉSIN
Vrayment, tu es marchant gaillard.
205 Mès du pris que me cousteront ?
LE BADIN
Vistes[-vous] onc chose plus ront ?
Quel beau grain ! Y n’y a qu’eslire86.
LE PREMYER VOÉSIN
Despeschez-vous donc de me dire
Que j’en pouéray87, et vous hastez !
LE BADIN
210 Ma foy, mès que vous en tastez88,
Vous en vouldrez bien de la sorte ;
Mais aussy, mais que j’e[n] aporte,
Vous en aurez par-dessus tous89.
LE PREMYER VOÉSIN
Voyre, mès que les vendez-vous ?
215 Ne me tenez plus de90 blason.
LE BADIN
Ilz sont telz dessus que dessoublz91.
LE PREMYER VOÉSIN
Voy(e)re, mais que les vendez-vous ?
LE BADIN
J’en ay bien encor à cinq soublz,
De mesmes, dens nostre maison.
LE PREMYER VOÉSIN
220 Voy(e)re, mais que les vendez-vous ?
Ne me tenez plus [de] blason.
LE BADIN
Sur ma foy, vous avez raison.
Vous en pay(e)rez… Que sai-ge, moy ?
Dix soublz92, c’est trop ?
LE PREMYER VOÉSIN
A ! par ma foy,
225 C’est trop : ce sont sept et demy.
LE BADIN
Vrayment, c’est trop peu, mon amy,
Pour la bonté93 qui est en eulx.
LE PREMYER VOÉSIN
[Or] ne cuisent-il pas comme œufs94.
LE BADIN
Demandez-vous fris, ou rostis95 ?
230 Pour leur donner plus d’apétis,
Metez-les cuyre à petit feu ;
Le pot sera remply d’un peu.
LE PREMYER VOÉSIN
Vous en arez huict soublz, alez.
Et que jamais ne m’en parlez96 !
LE BADIN
235 Et ! Par mon âme, ce seront neuf !
LE PREMYER VOÉSIN
Je n’en donroys pas plus d’un œuf.
Par Dieu ! fault-il tant barquigner97 ?
LE BADIN
Prenez-le donc pour m’estréner98.
Haster me fault, car l’heure est haulte.
LE PREMYER VOÉSIN
240 Y fault que vous venez sans faulte
[À mon huis]99 quérir vostre argent.
LE BADIN
Y me fault estre diligent,
Premyer, de100 m’aler faire escripre
À celuy qui garde la cyre101
245 Du sel pour le lard, afin d’estre
Des premyers escriptz, nostre maistre,
Pour m’en retourner vitement.102
LE PREMYER VOÉSIN
Vous n’avez poinct d’entendement :
Je suys un homme de Vernon103.
250 Mais que je vous aye dict mon non
Et le cartier où je demeure,
Vous ne mectrez pas demy-heure104.
Entendez bien, et retenez.
LE BADIN
Ouy, ouy, g’iray à veue de nes105.
255 Et ! qui langue a va bien à Romme.
LE PREMYER VOÉSIN
Entendez-vous bien ? On me nomme,
Par mon droict non106, Zorobabel,
Demourant dessoublz le Moussel107.
Or alez, notez bien ce poinct.
LE BADIN
260 Non, non, je ne l’ombliray108 poinct.
Zoroborel, n’est pas109, mon maistre ?
LE PREMYER VOÉSIN
Zorobabel !
LE BADIN
Y le fault mestre
Bien avant dedens mon cerveau.
[Zorobarel, ce]110 non est beau.
265 Zora comment ?
LE PREMYER VOÉSIN
Zorobabel !
LE BADIN
Depuys le temps du bon Abel,
Je n’ay veu un non sy gentil.
O Dieu !
LE PREMYER VOÉSIN
(O Dieu, est-il subtil !)
LE BADIN
Tousjours le diray en alant111.
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LE PREMYER VOÉSIN 112 SCÈNE VIII
270 Et puys ?
LE IIe VOÉSIN
Tu es un vray chalant113 :
Tu poys114 contant sans bource ouvrir.
LE PREMYER VOÉSIN
Ay-ge des poys sans descouvrir
Croix ne pille115 ?
LE IIe VOÉSIN
Je n’y difère116.
LE PREMYER VOÉSIN
Or sçays-tu bien qu’i nous fault fayre117 ?
275 Y te fault en ce lieu tenir ;
Tantost le voiras118 revenir
Me chercher, et demandera
Mon non. Bien sçay qu’i l’omblyra,
Mais garde-toy bien de luy dire.
LE IIe VOÉSIN
280 Et ! laisse-moy faire, beau syre :
Je n’ay pas peur d’estre déceu119.
Y m’est advys qu[e l’]ay aperceu.120
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LE BADIN SCÈNE IX
Je suys des premyers mys au roulle121.
Mais premyer que le jour s’escoulle122,
285 Ma pouche123 et argent quérir voys.
C’est Gorget124 Barbel, toute foys ?
Georges Barbès, c’est bien parlé.
Mais la rue125 a un non salé.
LE IIe VOÉSIN
(Voécy assez bon colibet126.)
LE BADIN
290 Où demeure Gorget Barbet ?
Enseignez-le-moy, mon cousin.
LE IIe VOÉSIN
Demandez-vous Gorget Bardin ?
Y demeure auprès du marché.
LE BADIN
Je ne suys poinct bien adressé127 :
295 C’est un aultre non, plus sallé.
LE IIe VOÉSIN
Je sçay bien : c’est Mathieu Salé128.
Y tire bien de l’arbalestre129.
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LE BADIN SCÈNE X
Cest homme icy me fera pestre.
Ce n’est ne Gorgin, ne Gorget,
300 Ne Rogerin, ne Rogeret ;
C’est un deable de non, ce croi-ge.
Or çà ! Maintenant, or m’en voi-ge
Sans sel, sans argent et sans pouche.
Suys-je poinct plus lourd c’une souche,
305 De l’avoir ainsy omblyé ?
À Dieu mes poys ! Je suys payé
Sans mauvais argent130 recevoir.
Or çà, y me fault aller voir
Que c’est que me dira Périne.
310 El me fera bien laide mine.
Poinct je ne mengeray de lard.131
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Périne ! SCÈNE XI
LA FEMME
Et ! d’où venez-vous sy tard ?
Où sont vos poys ? Sont-il ven[d]us ?
LE BADIN.
Y sont, ma mye, par Dieu, perdus :
315 Je n’ay sceu trouver le marchant.
LA FEMME
Vous estes bien lâche132 et méchant,
De l’avoir omblyé ainsy.
LE BADIN
C’est un deable de non, aussy ;
Je n’en vis jamais de la sorte.
LA FEMME
320 Colinet, y fault qu’on s’assorte133,
Puysque ce non est sy estrange,
D’aler prier sainct Michel l’ange
Et monsieur sainct Martin des Champs134,
Qu’i nous radresse[nt] nos marchans135
325 Pour en avoir bonne nouvelle.
LE BADIN
G’y voys donc, Périne la belle ;
Je n’atendray pas à dimence136.
LA FEMME
Alez tost, la messe commence.
Mectez-vous en dévotion.
.
[LE VICAIRE] 138 SCÈNE XII
330 Et post transmys gracion 139,
Jéconiam autem génuyt Salatyel.
Salatiel autem génuyt Zorobabel…
LE BADIN
Zorobabel ? Et ! Nostre Dame !
C’est l’homme à mes poys, par mon âme !
335 Monsieur, monsieur, artez-vous140 là !
[LE VICAIRE]
Te tèras-tu, méchant infâme ?
LE BADIN
C’est l’homme à mes poys, par mon âme !
[LE VICAIRE] 141
Messieurs, voi(e)cy un gros difame.
Et ! faictes taire ce fol-là !
LE BADIN
340 C’est l’homme à mes poys, par mon âme !
Monsieur, monsieur, artez-vous là !
Par ma foy, c’est celuy qui l’a,
Mon boysseau de poys, que je charche142.
[LE VICAIRE]
Te tèras-tu ? Tu es bien lâche :
345 Tu rons le service divin.
LE BADIN
Et ! Monsieur, je pay(e)ray du vin,
Et tournez un peu le feuillet :
Vous trouverez, sans plus de plet,
La rue où c’est qu’est son143 demeure.
[LE VICAIRE]
350 Peu s’en fault que de deuil144 ne meure
Pour ce paillard qui m’a troublé.
LE BADIN
Monsieur, je vous pay(e)ray en blé ;
Vous ne perdrez pas vostre peine.
Sy vous aymez myeulx de l’avoynne,
355 J’en feray bastre samedy.
[LE VICAIRE]
Voi(e)cy un bon sot estourdy !
Y me fera sortir du sens.
LE BADIN
Hélas ! y n’est guères de gens
Qui l’eussent sceu adevigner145
360 Comme vous.
[LE VICAIRE]
C’est pour badiner146 !
Je voys reclore mon messel147.
LE BADIN
C’est mon, c’est la rue au Moussel148 !
Vous estes un homme de Dieu,
D’avoir dict la place et le lieu ;
365 Et tant de gens ne l’ont sceu dire.
Ç’a esté par vostre clergie,
Puysqu’i fault que je le dye.
Mais escripvez-le-moy, beau sire,
À celle fin que ne l’omblye.
[LE VICAIRE]
370 (Je ne fus onques, en ma vye
D’homme, sy très fort empesché.
Mais pour en estre despesché,
Escripre luy voys bien et bel.)
Comme[nt] esse ?
LE BADIN
Zorobabel.
375 Ne l’av’ous149 pas ainsy nommé ?
C’est un homme bien renommé.150
[LE VICAIRE]
Ouy dea ! Où esse qu’i se tient ?
LE BADIN
Or atendez, il m’en souvyent :
En refermant vostre messel,
380 M’avez dict à « la rue au [Mous]sel ».
[LE VICAIRE]
C’est vray. (Escrire y luy convyent151.)
LE BADIN
(Ilz sçayvent toult ce qu’il advyent
Par ces livres, ma foy, ces prestres.
A ! sy j(e) eusse congnu les lestres
385 Qui sont à la croys de par Dieu 152,
J’eusses esté grand clerq, par Dieu !
J’ouÿs153 dire que toult y est.)
[LE VICAIRE]
Voylà vostre mémoyre154 prest.
Despeschez-vous, que l’on s’en voise155 !
LE BADIN
390 A ! je m’en voys sans faire noyse,
Monsieur ; ne prenez plus de peine.
[LE VICAIRE]
Ce n’est point cela qui me maine.
Alez-vous-ent, c’est trop parlé !
LE BADIN
Mais que nostre vache ayt veslé156,
395 Ma mère vous donra du lect,
Vrayment, voire : nostre valect
La maine en un bon erbage157.
Et sy ma femme faict du fourmage158,
Vous en érez une douzaine.
[LE VICAIRE]
400 (Y me tiendra toulte159 semaine.)
Alez, plus ouÿr ne vous veulx !
LE BADIN
Mon amy, nous avons de[s] œufz
— Les plus très gros et les plus beaulx —
De guéline160 ; il ont deulx mouyaulx161,
405 [Sy blons que]162 ma femme Périne :
C’est de nostre grise guéline.
Se voulez venir quant et quant163,
Nous ferons Karesme-prenant164 :
Par ma foy, nous ferons grand chère !
[LE VICAIRE]
410 Beau sire, tirez-vous arière,
Alez-vous-en ! Tenu je suys
À Dieu165.
LE BADIN
À Dieu, et grand[s] mersis !166
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De bonne heure167 me suys levé : SCÈNE XIII
[Au] premyer168 il est retrouvé,
415 Mon boysseau de poys.
LA FEMME
Jésuchrist !
LE BADIN
J’ey le non de l’homme en escript,
Et la rue où c’est qu’il demeure.
LA FEMME
Alez-y demain en quelque heure,
Sans qu’il y ayt plus de séjour169.
LE BADIN
420 Ainsy feray-ge, n’ayez pour170.
LA FEMME
Qui vous a [peu ce]171 plaisir faire ?
LE BADIN
Ma mye, ç’a faict le vicaire.
Quant je fus dedens le moustier172,
Y se print tout hault à crier
425 « Zorobabel », l’homme à mes poys.
Et je cours et je m’y en voys,
Là où je fis sy bon enquest173
Qu’i m’enseigna le lieu où c’est
Et la rue [là] où il se tien.
LA FEMME
430 Hélas, il est homme de bien !
LE BADIN
Aussy, s’y vient en la maison,
N’épargnez poullet ny oyson,
Car nous [lu]y sommes bien tenus.
LA FEMME
Ses plaisirs seront recongnus,
435 Soyt en blé, en orge ou en boys,
Tandy[s] qu’irez chercher vos poys174.
Piéçà175 sy grande joye je n’us.
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LE BADIN 176 SCÈNE XIV
À Dieu vous dis, grans et menus.
Souvyenne-vous de mes bons poys.
440 Car on ne m’y trompera plus,
Une aultre foys, sy g’y revoys.
Pourquoy esse ? Car je congnoys
Le compaignon Zorobabel :
Je m’en voys toult droict à l’ostel177.
445 Mais qu’i plaise à la compaignye,
Une chanson, je vous emprye !
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FINIS
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PLAISANT RENCONTRE
D’UN HOMME À QUI ON AVOIT
DÉROBÉ DES POIS 178
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Un certain homme, ayant achepté des pois pour passer son Caresme, les mit dans son grenier pour les y conserver. Mais un bon drosle, envieux d’en manger sa part, résolut de les desrober sans se soucier beaucoup de s’en confesser à Pâques ; ce qu’il fit, au grand regret du possesseur, lequel ne manqua pas d’en faire faire les perquisitions possibles pour se venger ensuite du larron. Estant enfin venu à la connoissance179 de celuy qui avoit fait le coup, il sceut que c’estoit un certain homme nommé Zorobabel, qu’il n’avoit jamais veu. Il retint pendant quelque temps ce nom ; mais comme il estoit estrange pour luy, il l’oublia, en sorte qu’il ne fut plus en son pouvoir de le trouver ny de le poursuivre.
La feste de Nostre Dame180 estant venue longtemps après, il alla à la messe sans songer plus à son voleur ; et, entendant que l’Évangile, qui fait la généalogie de la Vierge, disoit : Genuit Zorobabel, Zorobabel autem genuit etc, il s’écria : « Ah ! ah ! le voylà, l’homme à mes pois ! C’est luy qui me les a desrobés ! » Ce qui surprit extrêmement tous les assistans, lesquels excusèrent son procédé, et luy aydèrent à trouver celuy qui l’avoit desrobé ; lequel fut obligé de s’acorder avec sa partie, crainte de quelque funeste sentence de la part des juges en cas qu’on l’eust poussé en Justice.
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1 Une édition peu intelligente est parue en 1837, sous le titre la Femme et le Badin. 2 Répertoire des Farces françaises. Imprimerie nationale, 1993, p. 207. 3 Le 1er Voisin et le 2ème Voisin logent dans le même quartier de Vernon. Le couple de fermiers habite dans un village à proximité. 4 Par souci d’économie, l’acteur qui jouait le Premier Voisin tenait aussi le rôle du Vicaire, que le régisseur a nommé partout « le Premier Voisin ». Les copistes ultérieurs n’ont pas rétabli le nom logique. Voir le commentaire de B. Faivre, p. 207, et la notice des Drois de la Porte Bodés, une farce qui présente la même particularité. 5 Ce titre est repris aux vers 334 et 425, et dans l’Enfant sans soucy. 6 Un peu. Colinet est derrière le rideau de fond. 7 Sotte Mine est un personnage des Sotz qui remetent en point Bon Temps. 8 Ms : pisotierre (Ma verge. « Montrer à tous ma povre pissotière. » La Muse normande.) 9 Je réparais un chaudron. 10 Vu les errements de Colinet en matière de syntaxe, il y a gros à parier que son interprète escamotait cette virgule : ma mie qui as le cul rompu. 11 Avant-hier. 12 Ces allusions scabreuses abondent dans les Femmes qui font escurer leurs chaulderons. 13 Bon ménager, soucieux de ses intérêts. 14 Pour acquérir des biens. 15 « Voys » signifie « vais » tout au long de la pièce. 16 Ms : que (Je ne saurais rien vous donner d’autre.) « Séroys » est une forme normande de saurais, avec le sens de pourrais. Idem vers 78 et 110. 17 Ce que. Idem vers 43, 61, 105, 274, 309. 18 Bécasse (normandisme). 19 Un jeune lièvre. 20 C’est un bien, une chose précieuse. 21 Ms : voyee (Colinet semble confondre la sainte voie, qui mène au Paradis, et sainte Avoie, qui mène au bordel : cf. le Povre Jouhan, vers 190 et note.) 22 De la cervelle de mouton. Mais peut-être faut-il corriger : chevreau. 23 À côté du mets auquel je pense. 24 Ms : vous ires / aulx champs 25 Topez là. 26 Ni mon devoir conjugal. Cf. Raoullet Ployart, vers 15 et 67. 27 Accompli. 28 Il s’adresse aux hommes du public. 29 Voilà trop de temps perdu. 30 Ne tournez plus autour du pot. 31 On cédait aux envies de nourriture des femmes enceintes pour que leur fruit [leur enfant] naisse sans tare. Cf. Frère Guillebert, vers 178 et note. 32 Regardez (normandisme). 33 Ms : cosue (« Il nous baille des plus cornues : Il nous dit de grandes sottises, il nous en fait croire. » Oudin.) « Tu me la bailles bien cornue ! » L’Aveugle, son Varlet et une Tripière. 34 Le soûlard. C’est le vers 460 du Poulier à sis personnages. 35 Colinet, qui maîtrise mal la syntaxe, inverse les deux adjectifs. 36 Céans, ici. Cf. Lucas Sergent, vers 81. 37 Il se couche par terre. 38 Elle s’adresse aux femmes du public. 39 Dans ma tête. 40 Ms : en (De toute cette année. « Il n’y fut planté de cest an. » Pour porter les présens.) 41 Forme normande du verbe avoir, comme aux vers 86, 89, 114, 141, 162, 233, 399. 42 Notre truie a mis bas. Les Normands scandaient « trou-ie » en 2 syllabes, comme dans ce refrain octosyllabique de la Muse normande : « Un loup prins par une trouye. » 43 Avant. Idem vers 166, 243, 284. 44 Ms : dune 45 Que nous la mangions (normandisme). 46 Ms : sy est en reue (Il est délirant. « N’est-il pas bien hors de raison,/ Sot batheleur et enresvé ? » Le Savetier qui ne respond que chansons, F 37.) Le vers suivant reprend le vers 88. 47 Forme normande du pronom « le », comme au vers suivant. 48 Ms : sy nons 49 Il se relève. 50 Ce vers est probablement chanté. 51 Avant. 52 Comme un homme habile. 53 Je n’ai ni croix ni pile (vers 273) : je n’ai pas un sou. Cela démontre que le vers 133 est apocryphe. 54 Un sac de 13 kg. 55 Périne, qui vit loin de la grande ville, pense que pour un boisseau de pois, le prix du marché est toujours de 7 sous et un douzième de sou. En fait, il est passé à 7,5 sous (vers 225). 56 Au grenier à sel, où un fonctionnaire vend le sel soumis à l’impôt de la gabelle. 57 Demain il fera jour. Cependant, à Vernon, le marché se tenait le samedi : voir Edmond Meyer, Histoire de la ville de Vernon, t. II, 1876, p. 173. Colinet s’apprête donc à manger du lard un vendredi, jour maigre. 58 C’est exactement ce que dit la femme de maître Pathelin quand son mari sort pour « acheter » du drap. Les allusions à la Farce de Pathelin sont nombreuses. 59 Avec un sac de pois sur l’épaule, il sort du village et se dirige vers la ville. 60 Colinet chante toujours quand il est content (vers 114). Il paraphrase ici Tu disoys que j’en mourroys, une chanson érotique à la mode, mise en musique par Claudin de Sermisy et publiée en 1530 : « Et ! voire, voire,/ Tu disoys, tu l’as dit, tu disoys. » 61 Ms : ne (Plaid = discours. Idem vers 348.) 62 Vaillant et hardi. Au vers 204, on reconnaît ironiquement que Colinet est un « marchant gaillard ». 63 L’expression n’est pas mise dans la bouche d’un demi-sot par hasard. Depuis Adam de la Halle, les pois pilés sont la nourriture des fous : « Donne-m’assez de pois pilés,/ Car je sui, voi, un sos clamés. » (Jeu de la Feuillée.) Les Sots font d’ailleurs tournoyer une vessie de porc dans laquelle tintent des pois secs. Tout cela débouchera sur un nouveau genre dramatique, le jeu des pois pilés, qui est « une fatrasie divisée en couplets et récitée en public par des sots ou des badins ». (Émile Picot, Recueil général des Sotties, t. 1, pp. V-VI.) 64 À partir d’ici, le ms. abrège les rubriques en le p v et le iie v ; je ne le suivrai pas. 65 Il me faut du blé. 66 Je dois revenir très vite. 67 De clients qui marchandent. Idem vers 184, 315, 324. 68 Pour peu. Idem vers 201, 212, 250, 394, 445. 69 Je suis arrivé. Colinet pose son sac. Il ne voit pas les deux voisins, qui s’arrêtent derrière lui. 70 Calculer. Cf. la Folie des Gorriers, vers 215. 71 Comment je dois me comporter : ce que je dois faire, et dans quel ordre. 72 La chambre à sel des Andelys dépendait du grenier à sel de Vernon. « Chaque minot de sel vendu et distribué au grenier établi en la dite ville de Vernon, et chambre à sel d’Andeli en dépendant. » E. Meyer, p. 95. 73 Les deux voisins s’éloignent un peu. 74 Ms : nise (Stupide. Cf. les Cris de Paris, vers 411.) 75 Un bon à rien. Idem vers 316 et 336. 76 Il déclame les cris traditionnels des vendeurs. Le 1er Voisin va vers lui. 77 Qu’ils sont gros, qu’ils ont un bon poids. 78 Nets. Cf. Mahuet, vers 208. Les mésaventures du badin Mahuet ressemblent beaucoup à celles du badin Colinet. 79 Un baume, un nectar. 80 De maîtres pois : des pois d’exception. 81 Et même. 82 C’est mon avis. (Idem vers 362.) Colinet montre au client une poignée de pois. 83 Que vous devrez en enlever pour que le pot ne déborde pas. 84 Ils sont si faciles à préparer (verbe affaiter). 85 Ils supportent bien. Colinet revient à ses obsessions du moment : le sel, et le lard. 86 Ce n’est même pas la peine de les choisir : ils sont tous bons. « (Je) say bien les poys eslyre. » La Bouteille. 87 Ce que j’en paierai. 88 Pour peu que vous y goûtiez. 89 Avant tout le monde. 90 Ms : en (Même faute au refrain, vers 221.) Ne me tenez plus de discours futiles. « Sans point tenir tant de blason,/ Retourner fault à la maison. » Deux hommes et leurs deux femmes. 91 Je n’ai pas mis les plus beaux dessus pour cacher ceux qui sont pourris. 92 Voir la note 55. 93 La qualité. 94 Ms : eulx (Ils ne cuisent pourtant pas aussi vite que des œufs.) 95 Des œufs au plat, qui cuisent vite, ou des « œufz rostis en la broche », dont Taillevent explique l’interminable préparation. 96 N’en parlons plus. Maître Pathelin, quand il veut escroquer le drapier, accepte lui aussi d’être perdant au marchandage afin de le rassurer. 97 Barguigner, marchander. 98 Pour conclure ma première vente. « Souffist-il se je vous estraine/ D’escus d’or, non pas de monnoye ? » (Farce de Pathelin.) Mais Colinet ne fera pas d’autre vente, puisqu’il n’a plus rien à vendre. 99 Ms : auecques (Nouvelle référence à Pathelin, qui proposait au drapier de venir récupérer ses 6 écus chez lui : « Vous les prendrez/ À mon huis, en or ou monnoye. ») 100 Ms : que (Colinet ne peut suivre son client, car il doit d’abord aller s’inscrire auprès du fonctionnaire de la gabelle.) 101 Le cachet du grènetier. 102 Le ms. attribue ce vers au 1er Voisin. 103 Ms : Rouen (Tôt ou tard, la pièce a dû être jouée à Rouen ; mais ce nom, qui fut placé là pour l’occasion, ne rime pas.) La ville normande de Vernon-sur-Seine, dans l’actuel département de l’Eure, possédait un grenier à sel où s’approvisionnaient les paroisses avoisinantes : « Chacune prise de sel qui sera monté & levé par eaux & contremont la rivière de Seine, audessus & outre les limites du grenier à sel de Vernon. » (Louis XII.) Edmond Meyer consacre à cet important grenier un chapitre de son Histoire de la ville de Vernon, t. II, pp. 88-98. 104 Pour venir vous faire payer chez moi. 105 À vue de nez : les yeux fermés. 106 Par mon nom de famille. Zorobabel est un personnage biblique. 107 Ms : Risel (Au bas de la chapelle Saint-Jean-du-Moussel, dans la rue du Moussel, à Vernon. Voir E. Meyer, p. 230.) Lors des représentations rouennaises, on a sans doute remplacé Moussel par Ruissel, une rue de Rouen.) 108 Omblier = oublier (normandisme). Idem vers 278, 305, 317, 369. 109 N’est-ce pas. 110 Ms : zorobart se 111 Je me le répéterai tout le long du chemin. Colinet se rend au grenier à sel pour réserver son tour. 112 Chargé du sac de pois, il rejoint son comparse, qui assistait à la scène d’un peu plus loin. 113 Client. 114 Tu paies. 115 Sans mettre à l’air mes deniers (note 53). Quand Pathelin rentre avec le drap qu’il vient d’extorquer au drapier, il dit à sa femme : « En ay-je ? » 116 Je ne dis pas le contraire. 117 Lorsque Pathelin attend que le drapier vienne réclamer son dû, il enrôle sa femme pour mieux le tromper : « Mais vécy qu’il nous fauldra faire. » Escroquer les simples d’esprit ne suffit pas : il faut aussi se moquer d’eux, comme c’est encore le cas dans Mahuet. 118 Ms : voires (Tu le verras.) 119 D’être trompé : de me trahir. 120 Le ms. attribue ce vers au Badin. Le 2ème Voisin aperçoit Colinet, qui revient du grenier à sel. Le 1er Voisin se cache en emportant le sac de pois. 121 Inscrit sur le rôle, sur le registre du grenier au sel. 122 Avant que le soir tombe. 123 Ma poche : le sac de toile qui contenait les pois. Idem vers 303. 124 Georget. On retrouve ce « g » dur normand aux vers 290, 292 et 299 (Georgin). 125 La rue du Moussel. 126 Voilà une question idiote. 127 Vous ne m’envoyez pas à la bonne adresse. 128 C’est ainsi qu’on appelait Mathusalem, autre personnage biblique. « Vivre autant que Mathieusalé. » Villon, Testament, 64. 129 Expression érotique très employée (v. la note 18 des Femmes qui font escurer leurs chaulderons), mais peut-être excessive pour un homme de 969 ans. Colinet s’éloigne. 130 Pièces dépourvues de valeur. « Non évalué, légier, bouly, rongé, ou aultre maulvais argent. » Josse de Damhoudère. 131 Colinet retourne au village. 132 Relâché. Idem vers 344. 133 Qu’on se prépare. 134 On invoquait les saints en toute occasion, par exemple pour retrouver des objets perdus ou des mots oubliés. 135 Afin qu’ils nous remettent sur la voie de notre acheteur. 136 Dimanche (normandisme). 138 Ici et ailleurs, le ms. indique : le p voesin (Voir la note 4.) Mais il est bien question d’un vicaire au vers 422. Nous sommes dans la chapelle d’un monastère (vers 423). 139 Ms : gracione (La rime est en -ion.) Mais le texte est faux de toute manière : les curés des Farces, piètres latinistes, ont du mal à faire une citation biblique correcte. L’Évangile selon saint Matthieu dit : « Et post transmigrationem Babylonis, Jechonias genuit Salathiel. Salathiel autem genuit Zorobabel. » Cette généalogie est lue pendant la messe qui célèbre la Nativité de Marie, le 8 septembre. 140 Arrêtez-vous (normandisme). 141 Il s’adresse aux paroissiens, autrement dit, au public. 142 Ms : cherche (La rime, normande, est en -a(r)che. « Que veult-on plus ? Que peult-on charcher mieulx/ En aultres lieux ? » Le Triomphe des Normans.) 143 Sa. « Pour m’avoir en son vil demeure. » Jehan Molinet. 144 De douleur. 145 Qui auraient pu deviner le nom de mon client. 146 C’est une plaisanterie ! 147 Je vais refermer mon missel : je vais m’en aller. 148 Ms : cel (Le vers est trop court.) Voir la note 107. 149 Ne l’avez-vous (normandisme). 150 Le ms. met ce vers avant 378. 151 Je vais le lui écrire. 152 Si j’avais su lire. La croix de par Dieu est un abécédaire pour apprendre l’alphabet : cf. Troys Galans et un Badin, vers 62. 153 Ms : Jey oy 154 Un mémoire est un document succinct. 155 Afin que vous vous en alliez. 156 Dès que notre vache aura mis bas. Même vers proverbial dans Troys Galans et un Badin. 157 La syntaxe très personnelle de Colinet peut faire croire qu’on mène paître sa mère, et non sa vache. 158 Fromage étant au singulier, on pourrait penser que le vicaire aura une douzaine de femmes. 159 Ms : toulte a (Toute la semaine. « Gaheriet (…), qui toute sepmaine avoit chevauché par le pays. » Tristan, chevalier de la Table Ronde.) 160 De géline, de poule. 161 Deux moyeux : deux jaunes. 162 Ms : son nyon de (Aussi blonds que.) 163 Avec nous. Cf. Guillerme qui mengea les figues, vers 47. 164 Les réjouissances carnavalesques et culinaires qui précèdent le Carême. « Mais il a le gousier tout gras/ Encor de Caresme-prenant. » Le Roy des Sotz. 165 Je suis au service de Dieu. « Tout le monde est subject & tenu à Dieu. » (Robert Estienne.) Colinet comprend « Adieu ! », et fait ses adieux au vicaire. Même quiproquo dans la Confession du Brigant au Curé (vers 86). 166 Colinet rentre chez lui en tenant précautionneusement le papier du vicaire. 167 Sous une bonne étoile : j’ai eu de la chance. 168 Du premier coup. « Qui, au premier, son affaire regarde,/ On dit souvant qu’en la fin, bien se treuve. » André de La Vigne. 169 Ms : se jour (De retard.) 170 N’ayez pas peur. 171 Ms : pense (Qui a pu.) 172 Le monastère. 173 Questionnement. 174 L’argent des pois. Dans les farces, les prêtres qui visitent une épouse en l’absence du mari réclament un autre type de « plaisirs ». 175 Depuis longtemps. 176 Au public. 177 À sa maison. 178 Un(e) rencontre est un hasard. Cette nouvelle est extraite de : L’Enfant sans soucy divertissant son père Roger Bontemps et sa mère Boute-tout-cuire, éd. de 1682, pp. 311-312. Je mets en gras les emprunts à notre farce. Notons que ce plagiat fut lui-même plagié en 1699 dans les Nouveaux contes à rire et aventures plaisantes de ce temps (sic !!), ou Récréations françoises. 179 Ayant enfin appris le nom. 180 La Nativité de Marie (note 139).