LE GENTIL HOMME ET NAUDET
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LE GENTIL HOMME
ET NAUDET
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Dans le Poulier à sis personnages, deux nobles veulent trousser l’épouse d’un meunier, lequel se venge en culbutant leur propre femme devant eux. Dans le Gentil homme et Naudet, une farce écrite elle aussi en Normandie au début du XVIe siècle, un paysan cocufié par un gentilhomme se venge en le cocufiant, en le lui faisant savoir, et – comble de l’insolence – en lui donnant même une petite leçon de noblesse.
Source : Recueil du British Museum, nº 15. Imprimé à Rouen par Jehan Le Prest, vers 1550. Le début du manuscrit de base était abîmé, ou perdu, comme c’est trop souvent le cas.
Structure : Rimes plates.
Cette édition : Cliquer sur Préface. Au bas de cette préface, on trouvera une table des pièces publiées sur le présent site.
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Farce nouvelle trèsbonne
et fort joyeuse
À quatre personaiges, c’est assavoir :
LE GENTIL HOMME
LISON (ALLISON)
NAUDET
LA DAMOYSELLE
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LISON 1 commence SCÈNE I
[Je n’en donne pas une pomme !]2
D’avoir espousé un tel homme,
Ne suis-je pas bien estorée3 ?
NAUDET
Quoy ! est ma chemise dorée4 ?
5 Da, da ! s’el [l’]est, j’en suys marry.
Sçavez-vous de quoy je me ry ?
De Monsieur de nostre villaige5,
Qui va de nuict en varouillaige6.
LISON
Et que sçavez-vous, meschant homme ?
NAUDET
10 Que je sçay7 ? Hau ! la voicy bonne.
Que je sçay, qui le sçauroit [veoir] ?
Je le vey8.
LISON
Et quand ? Quand ?
NAUDET
Hersoir9.
LISON
Et où ? Et où ?
NAUDET
Soubz le pingnon10,
Là, debout, de nostre maison,
15 Où il estoit et11 une fille.
LISON
Et sçais-tu bien que c’estoit ille12 ?
NAUDET
Oy13, oy : tous deux, je les congnoi(s).
LISON
Veulx-tu dire que c’estoit moy ?
NAUDET
Tout beau, tout beau ! Je n’en dictz mot.
LISON
20 Je te promectz ma foy, s’il t(e) ost14,
Qu’il te fera mettre en prison.
NAUDET
Et ! je n’en parle pas, Lison.
C’est tout ung, se vous estes s’amye.
Da ! pour tant15, ne luy dictes mye :
25 Il me feroit aussitost fuyre16.
LISON
Garde-toy donc de le plus dire,
Meschant ! Il nous faict tant de biens !
Toutes les foys qu’il vient cëans17,
Il te saulle de vin et rost18.
NAUDET
30 Et doncques, viendra-il bientost ?
S’il y en a plus, que g’y parte19 !
Faictes, faictes-luy de la tarte,
S’il vient, pour servir de dessert.
LISON
Va quérir du boys, Mau-m’y-sert20,
35 Que je mettes le feu au four.
NAUDET
Bien, [bien], je y voys21.
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LE GENTIL HOMME 22 SCÈNE II
Le grant amour
Que j’ay à la belle Allison
Tien[t lors] mon cœur en si forte prison
Que je n’en puis arrester en nul(le) place.
40 En faisant retour de la23 chasce,
Je voys sçavoir comme el(le) se porte.
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NAUDET 24 SCÈNE III
Hay ! voicy Monsieur à la porte.
Il est venu, venu25, venu.
LE GENTIL HOMME
Holà !
NAUDET
Haa, je vous ay bien congneu26,
45 Monsieur. Voulez-vous [pas] descendre27 ?
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LISON SCÈNE IV
Paix ! [il descend mieulx sans t’attendre.]
NAUDET
[Et !] voyrement, non faict, non faict.
LISON
Que ce fol yci a de plet28 !
LE GENTIL HOMME
Naudet ! Monte sus mon cheval,
50 Et t’en va au long de ce val
Bien doulcement le pourmener29.
NAUDET
Se voulez, je l’iray mener
Boyre avant30 moy en la bonne eau(e).
LE GENTIL HOMME
[Tiens-luy le nez loing du tonneau :]31
55 Il est trop chault pour abrever.
NAUDET, estant monté à cheval.
Houlà, ho ! Voicy pour desver32.
Qu’esse icy ? Hau ! comme il s’esmouche33 !
Je croy qu’il y a quelque mouche
Qui luy fatrouille34 soubz la fesse.
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LE GENTIL HOMME SCÈNE V
60 J’ay le cœur comblé de l[i]esse
Quant je te vois, Lison, m’amie.
Baise-moy !
LISON
Ne m’espargnez35 mie,
Monsieur : faictes vostre plaisir.
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NAUDET 36 SCÈNE VI
Je ne le sçaurois plus tenir ;
65 Le cheval m’a faict mettre à pied.
LE GENTIL HOMME
(Ce fol icy m’a espié37.)
E[t ! va,] va, metz-lay38 à l’estable.
NAUDET
Bien, bien. Lison, mettez la table,
Que Monsieur desjeune un petit39 !
70 Sus tost !
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LISON SCÈNE VII
Naudet a appétit.
LE GENTIL HOMME
À son folois40, il faict du fin.
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NAUDET 41 SCÈNE VIII
Je l’i ay mis. Yrai-ge au vin42 ?
Je voy bien que Monsieur a soif43.
Où est le meilleur ?
LE GENTIL HOMME
Je ne sçay ;
75 Va au Paon, ou à la Vignette44.
NAUDET
Bien, j(e) y voye.
LE GENTIL HOMME
A, ma plaisant(e) vignette45,
Pendant que Naudet n’y est point,
Je m’en vois mettre en beau pourpoint46,
Affin que mieulx nous esbatons.
LISON
80 Il fault donc que nous nous hastons,
Car Naudet est fort diligent.
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NAUDET 47 SCÈNE IX
Voirement, baudrez-vous48 argent,
Ou s(e) on dira que c’est pour vous49 ?
Hau, Monsieur !
LE GENTIL HOMME
[Tiens,] voylà deux soubz.
85 Mon amy doulx, despesche-toy,
Mais ne dict50 pas que c’est pour moy.
NAUDET
Bien, bien. (J’en bevray51 un bon traict.)
Esse du blanc, ou du clairet ?
LE GENTIL HOMME
Du celuy que t(u) aimes le mieulx.
LISON
90 Mèshui ne cessera52 ? Mi dieux !
Va tost, ne [reviens point]53 sans vin !
LE GENTIL HOMME
Va, mon amy, va !
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NAUDET 54 SCÈNE X
Qu’il est fin !
Tousjours il me trompe, en effect.
Au fort, fasché fort je suis [du] faict ;
95 Mais si je puis, je luy rendray55.
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LE GENTIL HOMME SCÈNE XI
Quand sera-ce que je tiendray
Ce beau gentil corps nud à nud ?
LISON
Mais que Naudet soit revenu,
Monsieur, il nous sera besoing
100 L’envoyer en ung56 lieu bien loing ;
Car aultrement, n’aurions laysir57
D’acomplir [tout] nostre désir :
Tousjours il va et vient sans cesse.
LE GENTIL HOMME
Je luy jouray donc de finesse ;
105 Tantost, je l’empescheray bien.
Ma femme ayme, sur toute rien58,
À le veoir : tousjours la faict rire.
Unes lettres luy voys escripre59,
Que vostre mary portera ;
110 Et ma femme l’am[usera :]
« Nenny, non, march[ez vers l’estable,]
[Revenez cy, mettez la table ! »]60
Cependant, prendrons nos esbatz.
LISON
Doncques, pour éviter débatz,
115 Deffendez-luy sur toutes riens
De dire que soyez cëans :
Ma Damoyselle en auroit deuil.
LE GENTIL HOMME
Il sera faict.
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NAUDET 61 SCÈNE XII
Je suis tout seul :
Je vois boire à mesme le pot…
120 Il est bon ! Mais j’eusse esté bien sot
Se je ne l’eusse essansonné62.
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Da ! je suis bien tost retou[r]né : SCÈNE XIII
Voicy du vin !
LISON
Est-il bon, doncques ?
NAUDET
C’est du meilleur que je beuz oncques.
LE GENTIL HOMME
125 Metz-lay dedens ung plain seau d’eau
Frêche.
NAUDET
[Da !] il se mocque, hau !
LISON
Non faict : faict[z bien] ce qu’il te dict.
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NAUDET 63 SCÈNE XIV
Et bien donc ! Mais je sois mauldict
Se je n’en boy premier ma part.
130 Et puis je mettray la64 leur part
Dedens le seau [d’eau] ; advisez
Se je n’ay bien faict. Hauld le nez65 !
Je mettray cy le demourant66.
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Le voylà [tout] frais, maintenant. SCÈNE XV
135 Quand de boire aurez appétit…
LE GENTIL HOMME
[Verse-m’en]67, beau sire, ung petit :
J’ay soif.
NAUDET
Or tendez donc(ques) voz voirres68.
LISON
Et ! que veulx-tu faire ? Tu erres !
Et ! verse[-nous] du vin, gros veau !
NAUDET
140 [Ne] le voicy pas dedens l’eau ?
Monsieur m’a dict que je luy mette(s).
LE GENTIL HOMME
Corbieu ! cela [n’est point]69 honneste ;
Tu le devois laisser au pot.
NAUDET
Vous [ne] m’en avez sonné mot ;
145 Se l’eussiez dict, je l’eusse faict.
LISON
Le vin est perdu, [en] effect.
Malle70 joye ayt-on du follastre !
LE GENTIL HOMME
Vien çà71 !
NAUDET
Ha ! vous me voulez battre.
LE GENTIL HOMME
Non feray, mais que tu sois sage.
150 Oy-tu ? Va-moy faire ung messaige.
NAUDET
Bien, g’y vois72.
LE GENTIL HOMME
[Et ! revien]73, beau sire :
Tu ne sçais pas que74 te veulx dire.
Porte ces lettres à ma femme.
Mais garde-toy bien, sus ton âme,
155 De dire que je suis cëans !
Tu luy diras que je reviens
De la chas[s]e, et suis à l’église.
Que la table soit biento[s]t mise,
Et qu’on te donne à déjuner.
160 Mais avec75 toy, te fault mener
Mon cheval pour mettre à l’estable.
NAUDET
Le76 feray-je seoir à la table ?
LISO[N]
À l’estable ! [Os-tu point]77 les gens ?
NAUDET
Oy, oy ! Tous [deux], je vous entens78…
165 [Je le v]ois mener par la main.
[À Dieu vous] dictz jusqu(e) à demain !79
[Je ne puis ce c]heval tenir.
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[LE GENTIL HO]MME SCÈNE XVI
Çà, m’amie ! Allons parfournir80
Nostre entreprinse, je vous prie.
LISON
170 Allons ! Mais je serois marrie
Que d’aucuns fus[s]ions apper[c]euz.
Allons, si vous voulez, là-sus81,
Ou à la chambre de derrière82.
LE GENTIL HOMME
C’est trèsbien dict, m’amie chère.
175 Qu’on ne nous prenne à désarroy,
Allons derrière, vous et moy.
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NAUDET SCÈNE XVII
Je croy que ce cheval est assez saige
Pour s’en aller tout seul, g’i gaige.
Va devant, je te suyviray !
Nota qu’il doibt laisser aller le cheval
tout seul, et retourner en sa maison.
180 Esse tout ce que je diray ?
Qu’esse-cy ? Ilz s’en sont volléz ?
Mot83, mot ! Paix ! [Par] là je les os84.
Hon ! ilz font la « beste à deux dos ».
Là, là, là, là ! Il joue beau jeu !
185 On les voit bien [cy] par ung treu85.
C’est Monsieur, oy, voicy sa robe ;
Mais de peur qu’on ne luy desrobe,
Sus mon dos je la vestiray86.
Aprèz son cheval m’en yray
190 Bien tost, pour faire son messaige87.
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LA DAMOYSELLE commence. SCÈNE XVIII
Je crains qu’on n’ait faict quelque oultraige
À Monsieur, ou quelque grand deuil :
Car son cheval est venu seul.
Dieu mercy, je viens bien appoint :
195 [Voicy Monsieur qui vient, de loing.]88
Çà, Monsieur, que [tant] vous mettez !
NAUDET
« Monsieur ? » Hau, [hau] ! Vous me jettez
[Du] « Monsieur » ? Suis-je donc(ques) Monsieur ?
La robe me faict grand honneur.
200 Je suis Monsieur, ma Damoyselle ?
LA DAMOYSELLE
Par mon Créateur ! je l’ay belle89 :
C’est Naudet. Que Dieu nous doint joye !
NAUDET
Vélà que90 Monsieur vous envoye.
LA DAMOYSELLE
Qu’esse qu’il y a, Nostre Dame ?
205 Où est-il, or ? Dy !
NAUDET
Sus91 ma femme.
LA DAMOYSELLE
Dict-moy que92 c’est, que je le sache.
NAUDET
Il m’a dict qu’il vient de la chas[s]e,
Et si, qu’il s’en va à la messe,
Qu’on mette la table, et qu’on dresse
210 La souppe, et si, que je desj[e]une.
LA DAMOYSELLE
Comment ? Et ! tu perdrois ta jeusne93.
Et puis je suis toute seullète :
Céans n’ay94 qui la table mette ;
Tous mes serviteurs sont aux champs.
NAUDET
215 Je ne suis point de ces meschans
Qui veulent trop trencher du maistre95 ;
Je sçauray bien la table mettre.
Baillez-moy la clef du chélier
Et de l’aumoyre96 !
LA DAMOYSELLE
Quel galier97 !
220 Par ma foy, je n’en feray rien.
Mais dea, je te donneray bien
Une bonne pièce de tarte.
NAUDET
Çà doncques, devant que je parte98.
LA DAMOYSELLE
Dy-moy doncques, sans point mentir,
225 Pourquoy Monsieur t’a faict vestir
Sa robe. Tu l’as bien touillée99 !
NAUDET
Monsieur ne me l’a point baillée :
Je l’ay prinse sur nostre selle100.
Pource qu’elle me sembloit belle,
230 Je l’ay vestue en m’en venant.
LA DAMOYSELLE
Vien çà ! On m’a dict maintenant
Que Monsieur est en ta maison
Avecques ta femme Lison,
Et qu’on luy a veu dès-orains101.
NAUDET
235 Je ne vous l’ay pas dict, au moins !
Monsieur me l’a bien deffendu.
LA DAMOYSELLE
Aa, Naudet, tu es entendu102.
Sçait-il bien que tu as sa robe ?
NAUDET
Jens103 ! nennin, il ne le sçait point.
240 Mais de peur qu’on ne luy desrobe,
Je l’ay prise pour mettre appoint104.
LA DAMOYSELLE
Tu me semble, à tout105, bel et coint.
Et Lison, ne t’a-el(le) point veu ?
NAUDET
Jacques ! nennin, elle n’eust sceu :
245 Lison estoit bien empeschée,
Toute platte à l’envers106 couchée
En nostre chambre de derrière.
LA DAMOYSELLE
Ha ! je sçay bien que Monsieur, voyre,
Estoit couché à costé d’elle.
NAUDET
250 Jens ! non estoit, ma Damoyselle :
Il estoit tout fin plat dessus.
LA DAMOYSELLE
Et que luy faisoit-il, Jésus ?
Je te pry, dy-le-moy, beau sire.
NAUDET
Je n’ay garde de vous le dire :
255 Monsieur me ravesqueroit107 bien !
LA DAMOYSELLE
Dict-le-moy, je n’en diray rien.
NAUDET
Haa ! si feriez, je suys trop fin.
LA DAMOYSELLE
Tien, boit[z] une foys de ce vin108.
Et puis me le dict, je le veulx !
260 Il n’y a icy que noz deux109 ;
Pour rien [je] ne t’accuseray.
NAUDET
Ma foy ! point ne le vous diray,
Je gasterois tout le mistère.
J’ayme beaucoup mieulx vous le faire
265 Trois fois que vous en dire un mot.
LA DAMOYSELLE
Tu ne sçaurois, tu es trop sot.
NAUDET
Je ne sçaurois ? Hau, quel raison !
Et ! je le fais bien à Lison
[Très]tous les jours six ou sept foys110.
LA DAMOYSELLE
270 Tu as menti, point ne te crois !
Tu es trop sot pour telle ouvraige.
NAUDET
Le plus sot y est le plus saige111.
Pour veoir, mettez-moy en besongne :
Or dictes que je vous empoigne
275 Si comment112 Monsieur faict ma femme ;
Et je vous jure, sur mon âme,
Que point ne vous escondiray.
LA DAMOISELLE
Or m’empoigne donc : je voirray
Ta vaillance et tes beaulx combatz.
NAUDET
280 Il met met ainsi sa robbe bas113,
Et prent Lison en ceste sorte,
Et en l’autre chambre l’emporte
Sus la couchette, et ferme l’huis114.
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LE GENTIL HOMME 115 SCÈNE XIX
Vostre mary ne revient plus ?
285 Je congnois maintenant sa ruse.
Bien petite chose116 l’amuse.
De nous, plus il ne [se] souvient.
Ma damoyselle l’entretient
À banqueter le mieulx qu’el(le) peult.
LISON
290 On faict de luy tout ce qu’on veult,
Moyennant et touchant la pience117 :
C’est le plus beau de sa science
Que de tousjours menger et boyre.
Et puis118, il pert sens et mémoire,
295 Et déclare tout son secret.
LE GENTIL HOMME
Faict[-il] ? Morbieu ! j’ay grand regret,
C’est de l’avoir là envoyé.
S’il est une foys avoyé119,
Il déclarera nostre cas.
300 G’i vois plus viste que le pas.
Çà ! ma robe légièrement120 !
LISON
Où l’av’ous121 mise, voyrement ?
Je ne la trouves point icy.
LE GENTIL HOMME
Vertu bieu ! la perdray-je ainsi ?
305 Me voicy bien mal accoustré.
Aa ! quelc’un a icy entré,
Qui n’a âme veu122, et l’a prinse.
Et vous estes bien mal apprinse
Que ne la met[t]iez [mieulx] à point.
LISON
310 Dea ! Monsieur, je n’y pensois point.
Et puis vous me hastiez [si] tant123 !
LE GENTIL HOMME
J’ay perdu ma robe contant,
Mais je crains d’en perdre124 encor une :
On voit souvent qu’une fortune125
315 Ne vient point seulle, se dict-on.
Ha ! je m’en voys. À Dieu, Lison !
LISON
À Dieu, Monsieur, jusqu(es) au revoir !
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NAUDET SCÈNE XX
Or sus ! le vouliez[-vous bien] veoir,
Comme Monsieur faict à ma femme ?
320 Je vous l’ay montré.
LA DAMOYSELLE
Sus mon âme !
Naudet, je n’eusse pas cuydé.
Tu en besongnes comme un maistre !
NAUDET
Jen ! Lison dict qu’il le fault mettre
Tousjours au parmy du caudet126.
LA DAMOYSELLE
325 Pleust à Dieu que tu fusses Monsieur,
Et que Monsieur devînt Naudet !
NAUDET
Or si [en] est-il127, j’en suis seur.
LA DAMOYSELLE
Os-tu ? Garde bien mon honneur :
De neuf te feray racoustrer128.
330 Et si, quand tu verras entrer
Monsieur de nuict en ta maison,
Accourt icy tost me monstrer
Tout cela qu’il faict à Lison.
NAUDET
Aussi feray-je par raison,
335 Puisque j’auray robe nouvelle129.
Hay ! agar[d]ez130, ma Damoyselle :
Voycy Naudet-Monsieur qui vient.
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LA DAMOYSELLE 131 SCÈNE XXI
Je ne sçay de quoy me souvient,
De vous veoir venir en pourpoint.
340 Et vostre robe, l’av’ous132 point,
Que ne l’avez chainte ou troussée133 ?
LE GENTIL HOMME
Je l’ay en quelque lieu laissée
Pour accourir plus vistement.
NAUDET
Ma Damoyselle, il ment, il ment !
345 La voicy : je l’ay apportée
De peur qu’el ne feust desrobée
Tandis qu’i litto[i]t à134 ma femme.
LE GENTIL HOMME
Tu as menty, villain infemme135 !
LA DAMOYSELLE
C’est bien l’estat d’un bon preudhom136 !
NAUDET
350 Qu’esse que vous luy faisiez donc ?
Je vous ay veu monté dessus.
LA DAMOYSELLE
N’av’ous137 point de honte, Jésus ?
C’est bien abaissé gentillesse138.
LE GENTIL HOMME
Mais le croyez-vous ? C’est simplesse !
355 C’est un sot plein de sot langaige.
LA DAMOYSELLE
J’aperçois bien à vostre ouvraige
Qu’avez autre tasche entreprinse.
LE GENTIL HOMME
Moy ? Morbieu ! je suys sans reprinse139 :
De tout cela je me sens net.
NAUDET, en riant 140.
360 Naudet ! Naudet ! Naudet ! Naudet !
LA DAMOYSELLE
Meschant, suis-je point assez belle
Pour vous ?
NAUDET
Ingens ! oy, ma Damoyselle,
Vous estes partout clère et blanche141.
LA DAMOYSELLE
Je ne sçay si hardy en France
365 Qui ne tînt de moy plus grand conte142.
Parquoy vous deussiez avoir honte
D’aller ailleurs, bien dire l’ose.
NAUDET
A ! ouy, ma foy : elle a ung « chose143 »
Qui ne bouge de la maison,
370 Ainsi que faict celuy Lison,
Ainsi fafelu144 et douillet.
LA DAMOYSELLE
Que fault-il à ce babillet145 ?
LE GENTIL HOMME
Parle hardiment, je le veulx !
NAUDET
Il a, tout ainsi, des « cheveulx ».
375 Joué m’y suis deux ou trois foys,
Mais je n’y treuve point de chois146 :
C’est tout ung, s’ilz sont pelle-mesle,
De Lison ou ma Damoyselle ;
Ilz sont d’ung goust147, d’une façon,
380 De148 ma Damoyselle et Lison.
Mais je veulx ne m’en chault149 laquelle,
De Lison ou ma Damoyselle :
Vous aurez le chois, c’est raison,
De ma Damoyselle ou Lison.
385 Prenez la plus doulce ou plus belle,
De Lison ou ma Damoyselle.
Ou toutes deux les espouson,
Et faison feste solemnelle
De ma Damoyselle et Lison.
LA DAMOYSELLE
390 Mais que ce fol a de blason150 !
LE GENTIL HOMME
Hon, hon, ma femme : estes-vous telle ?
Du chois, n’en don(ne)rois un oignon,
De Lison ou ma damoyselle.
De ma damoyselle et Lison,
395 N’en parlons plus et nous taison.
Cecy est [bien] neufve nouvelle151 !
Tenir me veulx152 à la maison,
Puisqu’on vient à ma damoyselle
Pendant que je suis à Lison.
NAUDET
400 Ma foy, Monsieur, sans trahison,
Je ne vous donnerois ung pet153
Pour estre Monsieur ou Naudet.
Mais il n’est pas bon d’estre, ensemble,
Naudet et Monsieur, ce me semble :
405 Ce nous seroit grand déshonneur.
Qu’on fist ung Naudet de Monsieur
Quand de Naudet tiendrez le lieu ?
Naudet seroit Monsieur, par Dieu !
Gardez donc vostre seigneurie,
410 Et Naudet sa naudet[t]erie154.
Se tenez Lison, ma fumelle155,
Naudet tiendra ma Damoyselle.
Ne venez plus naudétiser,
Je n’iray plus seigneuriser.
415 Chascun, à ce qu’il a, se tienne !
Et affin qu’il vous en souvienne,
Croyez-moy qu’il fault, mon amy,
À trompeur, trompeur et demy156.
Pour tant, que plus ne vous advienne !
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FINIS
*
1 BM : La femme (L’épouse de Naudet se nomme Alison, abrégé en Lison dans toutes les rubriques.) Elle est en train de mettre le linge sale de son mari dans un cuvier. 2 Vers manquant (voir ma notice). Je lui supplée le vers 74 du Munyer. Je remets d’aplomb les deux vers suivants, que l’imprimeur a intervertis à cause de la perte de la première rime. 3 Bien nantie. André Tissier <Recueil de farces, t. I, Droz, 1986> rappelle que dans le Badin, la Femme et la Chambrière (BM 16), une farce dont le recueil du British Museum fait suivre la nôtre, la femme commence par les mêmes récriminations contre son Badin de mari : « Ne suis-je pas bien étorée/ De mon mary que vous voyez ? » 4 Tachée d’excréments. Les chemises, très longues, entraient dans le haut-de-chausses ou dans les braies. « Dorer braye ou chemise. » On parle de porter devise. 5 De notre hobereau local. 6 Courir le guilledou. « Il a esté en varouillage. » Le Porteur de pénitence. 7 Ce que j’en sais. 8 Je le vis. 9 Hier soir, normandisme. 10 Sous le pignon : dissimulé dans l’ombre du faîte. Cf. les Mal contentes, vers 34. 11 Avec. 12 Lui (pronom normand). « C’est ille ! » Frère Guillebert. 13 Oui. Idem vers 164 et 186. 14 S’il t’entend, verbe ouïr. 15 Pour autant. Idem vers 419. 16 Fuir. Cf. l’Aveugle et Saudret, vers 163. 17 « Cians » rime avec « bians », comme au vers 233 de la farce normande du Pardonneur. À 116, il rime avec « rians » ; à 155, il rime avec « revians ». 18 Il te soûle de vin et de viande. 19 S’il y a plus à boire et à manger, que j’y participe ! 20 Qui me sert mal ; c’est un surnom qu’on donne aux mauvais serviteurs. « Monsieur, vous voulez que j’aye/ Le surnom de Maumisert ;/ Vous diray-je à descouvert/ Le vostre ? C’est Maumypaye ! » (Estienne Tabourot.) Les Conards de Rouen exhibaient un « abbé de Maumisert ». 21 J’y vais. Idem vers 41, 76, 78, 108, 119, 151, 300, 316. Naudet sort. 22 Il rentre de la chasse, à cheval, et s’arrête devant la maison de ses fermiers. Il fredonne une chanson courtoise en décasyllabes, dont le 1er vers doit être : « L’amour que j’ay à la belle Allison. » 23 BM : ceste 24 Il revient d’aller chercher du bois. 25 BM : venir (C’est probablement un refrain de comptine.) 26 Reconnu, de loin. 27 Les subalternes doivent tenir l’étrier des cavaliers qui descendent du cheval, ou qui y montent. Mais Naudet est à contretemps : le gentilhomme, voulant montrer sa souplesse à Lison, qui arrive, a déjà sauté par terre. 28 De plaids, de paroles. 29 Le promener, pour qu’il cesse de suer après la chasse. 30 On attendrait « avec », mais Naudet n’aime pas boire d’eau. 31 Les paysans faisaient boire les animaux de trait dans un tonneau sans couvercle. L’expression que je rapporte s’entendait encore au pays d’Auge il y a quelques décennies, et on ne l’appliquait pas qu’à des animaux… Le relieur de ce recueil factice a coupé le dernier vers de cette première colonne. 32 Il y a de quoi devenir fou. Naudet ne sait pas se tenir à cheval. 33 Il rue pour chasser les mouches. 34 BM : fetrouille (Cf. la Confession Margot, vers 114 et note. On pourrait aussi lire fretouille, qui a le même double sens grivois que fatrouille.) Il y a un taon qui lui pique l’anus. Naudet et sa monture s’éloignent un peu. 35 BM : lespargnez (« On dit Ne m’espargnez pas, pour dire : employez-moy librement. » Dict. de l’Académie françoise.) 36 Il revient vers le gentilhomme en tenant son cheval par la bride. 37 M’a vu en train de lutiner sa femme. 38 « Lay » est un pronom normand qui signifie « le ». Idem vers 125. 39 Un peu. Idem vers 136. Naudet va enfermer le cheval dans l’écurie. 40 Dans sa sottise. 41 Il revient de l’écurie. 42 Irai-je acheter du vin ? C’est en effet la corvée qu’on inflige aux cocus pour se débarrasser d’eux. Voir par exemple Pernet qui va au vin : « Iray-je au vin ? » 43 La rime est correcte, puisque les Normands prononcent « sé » : voir la note 33 de Troys Galans et un Badin. 44 Au cep de vigne. Ces deux enseignes de tavernes vendent du vin à emporter. Pernet qui va au vin demande s’il doit aller se fournir « au Pillon, ou au Coffin,/ Au Sabot ou à la Lanterne :/ J’ay mis en oubli la taverne. » 45 Métonymie sexuelle. Comme le déplore la jeune épouse de Raoullet Ployart, « ma vigne se gaste/ Par deffaulte de labourage ». Voir la note d’André Tissier, p. 275. 46 Je vais ôter ma robe de chasse et me mettre en pourpoint. (Cf. Gautier et Martin, vers 58.) Il pose sa robe sur le banc. 47 Il revient, ayant fait exprès d’oublier l’argent pour acheter le vin. L’éternel retour du cocu gênant est un des gags les plus sûrs de la littérature farcesque. 48 Me baillerez-vous. 49 Ou est-ce qu’on le mettra sur votre note. Naudet assimile le gentilhomme à un pilier de taverne. 50 Dans cette œuvre, c’est la forme courante de l’impératif « dis ». Idem vers 206, 256, 259. 51 BM : beueray (J’en boirai.) 52 Il ne cessera pas, aujourd’hui ? M’(a)it Dieu = que Dieu m’assiste. 53 BM : reuient poit 54 Il sort en maugréant, chargé d’un pot vide. 55 Je lui rendrai la monnaie de sa pièce (en couchant avec son épouse). 56 BM : quelque 57 Loisir. Même prononciation normande dans l’exemple de la note 97. 58 Sur toute chose, par-dessus tout. Idem vers 115. 59 Je vais écrire une lettre à ma femme. Le gentilhomme s’attable et écrit. 60 Le relieur a saccagé le bas de cette colonne, comme la précédente et la suivante. Je propose une reconstitution qui s’appuie sur les vers 161 et 213. 61 Il est devant la porte, avec le pot de vin qu’il est allé faire emplir. 62 Goûté avant de le servir, comme un échanson. Naudet entre en s’essuyant la bouche. 63 Il retourne dans la cour avec le pot, et tire un seau d’eau du puits. 64 Quoi qu’on en dise, il s’agit bien de l’article « la », et non de l’adverbe « là ». « Ès biens et ès maulx que j’auray jamaiz, vous aurez tousjours la vostre part. » Jehan de Bueil. 65 Haut le nez = À la tienne ! Naudet boit une bonne rasade de vin. 66 Le demeurant. Naudet verse le reste du vin dans le seau d’eau, qu’il porte dans la maison. 67 BM : Vresment (Un petit = un peu.) 68 Vos verres. Naudet puise de l’eau dans le seau. 69 BM : et (« Sang bieu ! cela n’est point honneste. » Le Faulconnier de ville.) 70 Mauvaise. Un folâtre est un fou. 71 Viens ici ! BM intervertit cette injonction et la rubrique qui la précède. 72 J’y vais. Naudet s’apprête à sortir sans savoir où il doit aller. C’est là encore un gag très couru. 73 BM : En reuient 74 Ce que je. 75 BM : auant 76 BM : Et 77 BM : os t boint (N’entends-tu pas ce qu’on te dit ?) 78 Double sens : Je comprends où vous voulez en venir. 79 Naudet sort, et tire le cheval de l’écurie. Le relieur a encore abîmé ce bas de colonne ; je reconstitue ce vers sur le modèle de 317, mais c’est également le dernier vers de la Résurrection Jénin à Paulme. 80 Terminer. 81 Là-haut, dans la chambre de l’étage. 82 La chambre du rez-de-chaussée, qui se trouve juste derrière le rideau de fond. Le Poulier à sis personnages offre exactement la même configuration. 83 BM : Moy (Je ne leur dirai pas un mot.) 84 Je les entends. Par une déchirure du rideau de fond, Naudet lorgne le couple en action. 85 Par un trou dans le mur, ou dans la porte. Le record du voyeurisme est détenu par le Tesmoing qui, pour assister aux ébats de ses voisins, a « rompu le boult d’un ays ». 86 Naudet enfile la robe que le gentilhomme avait posée sur un banc. 87 Pour porter le message à sa femme. Naudet sort sans faire de bruit, et va au manoir, où le cheval l’a précédé. 88 Vers manquant. La châtelaine voit venir Naudet, et le prend pour son mari, dont il porte la robe. Elle s’étonne qu’il arrive si tard. 89 On me la baille belle. « Par Nostre Dame, je l’ay belle ! » Le Pauvre et le Riche. 90 Voilà ce que. Naudet donne la lettre à sa patronne. 91 Chez : cf. les Femmes qui font refondre leurs maris, vers 161 et note. Naturellement, il faut comprendre « sur ». 92 Ce que. « Dictes que c’est, que je le sache. » L’Homme à mes pois. 93 Ton jeûne de vendredi. « De la jeûne me vueil vengier/ Que j’ay hui fait. » (ATILF.) Cette moquerie vise la forte corpulence de Naudet. 94 Je n’ai personne ici. 95 Abuser de leur pouvoir. Cf. la Pippée, vers 419. 96 Du cellier, où se trouve le vin, et de l’armoire, qui sert de garde-manger. Naudet fait dans l’équivoque scabreuse : cellier = vulve. « Mon mal, (…)/ Je le prins en meschant cellier. » (Le Triumphe de haulte et puissante dame Vérolle.) L’armoire désigne le même endroit : « De quoy serviroient voz aumoyres,/ Si ne vouliez bouter dedens ? » Frère Guillebert. 97 Quel plaisantin. La Damoiselle embraye dans le même registre déluré : pour tout Normand, un galier est un pénis. « Y saquit sen galier par le trou de sa brais,/ Pis, tenant de sa main cheste afaire segrette,/ Il la mit douchement au trou de la pouquette,/ Et dedans y pissa tout à sen biau laisir. » La Muse normande. 98 Donnez-m’en avant que je parte. 99 Salie. 100 BM : table (Une selle est un banc ou un tabouret large qui meuble tous les intérieurs modestes. « Séez-vous dessus ceste selle. » Le Poulier à sis personnages.) 101 Qu’on l’y a vu tout à l’heure. 102 Tu es malin. 103 Par saint Jean ! Même juron normand aux vers 250, 323, 362. Ce vers est surnuméraire mais on ne peut pas le supprimer. 104 Pour la mettre à l’abri. Idem vers 309. 105 Avec (cette robe). Coint = élégant. 106 À la renverse, sur le dos. 107 Me rabrouerait, normandisme. 108 Les curieux qui veulent faire parler un simple d’esprit prêchent le faux pour savoir le vrai, et le font boire. C’est notamment le cas dans la scène de la confession de Messire Jehan. 109 Que nous deux, normandisme. 110 La femme de Naudet est mieux lotie que celle de Jacquinot, laquelle réclame en vain : « Mais tous les jours cinq ou six fois ! » Le Cuvier. 111 Dans son article le Fol bien mentulé, Thierry Martin rappelle que « les innocents, considérés comme les êtres les plus naturels, étaient prédestinés à l’acte le plus naturel ». Trois études sur la sexualité médiévale, GKC, 2001. 112 Tout comme. Ces vanteries masculines sont monnaie courante : « Je voudroys que l’on me coupât le membre si je ne vous le faisoys douze foys pour la nuit…. Mettez-moy en besongne, et vous verrez comment il en ira. » Nicolas de Troyes. 113 Naudet retire la robe du gentilhomme. Puis il jette sa patronne sur son épaule et l’emporte derrière le rideau de fond. 114 Les Normands prononçaient « lu » : cf. les Trois amoureux de la croix, vers 43. Ce mot rime aussi avec plus au vers 177 de Tout-ménage. 115 Lui et Lison sont revenus dans la pièce principale. 116 Peu de chose. 117 La boisson. « Et à tous ceulx qui ayment la pience (…),/ Quatre jambons et six flacons de vin. » Le Testament de Ragot. 118 Et après. 119 Mis sur la voie de la confession. 120 Donnez-moi ma robe rapidement. Cf. Maistre Mimin estudiant, vers 52. 121 BM : lauez vaus (Même contraction normande aux vers 340 et 352.) 122 Qui n’a vu personne. 123 Même tournure normande au vers 306 du Poulier à sis personnages. 124 BM : prendre (C’était le comble du déshonneur : « J’aymeroye mieux perdre ma robe/ Que nul désemparast le banc ! » Le Capitaine Mal-en-point.) 125 Qu’une mauvaise fortune : qu’un malheur ne vient jamais seul. 126 Au milieu du « chaudet », du sexe de la femme. « –Ma mie, vous n’avez garde d’avoir froid, pour vous qui avez tousjours les mains à vostre chaudet…. –Comment peut-il appeller chaudet un lieu où l’eau sourd, où le vent souffle, & où jamais le soleil ne donne ? » A. Le Métel d’Ouville. 127 Il en est ainsi. 128 Habiller. 129 Puisque vous m’aurez donné une robe de gentilhomme (vers 329), j’agirai comme tel. 130 Regardez (normandisme). Cf. l’Arbalestre, vers 308. 131 À son époux, qui entre aussi discrètement que possible. 132 BM : lauez vous (Voir la note 121.) 133 BM : trouuee (Que vous ne la portiez ni ceinte ni retroussée.) 134 Qu’il luttait avec. « S’el a une foys lysté/ Avec le malle. » (Frère Phillebert.) Ce verbe rural s’emploie pour les saillies des boucs et des chèvres. 135 Paysan infâme. 136 BM : preudhõe (On prononce prudon : « Vaillans preudhoms,/ N’oubliez pas ces beaux pardons. » Saincte-Caquette.) 137 BM : Nouous (Note 121.) 138 Votre état de gentilhomme, votre noblesse. 139 BM : reproche (Sans reproche, sans blâme. « Car je vueil chanter sans reprinse. » Ung jeune moyne.) 140 Naudet se moque de son maître en le traitant de « naudet », qui n’est pas un titre flatteur : « Vous me semblez assez naudés. » (Les Sobres Sotz.) Il se peut que nous ayons là une de ces chansons niaises dont les Badins se repaissent. Le Savetier qui ne respond que chansons <F 37> appelle son valet en chantant : « Naudet, Naudet ! » 141 BM : belle (« Blanche » rime avec « Franche », à la manière normande ; voir la note 48 de la Folie des Gorriers.) La blancheur est un signe aristocratique : « Vostre bonté, vostre grant renommée,/ Vo doulz maintien, vo face blanche et clère. » Eustache Deschamps. 142 Compte. 143 Un sexe. Cf. Jolyet, vers 32. « Je ne verroye jamais homme en ma vie…. Et de quoy serviroit mon petit chose, que mon père a dict qu’il feroit un jour aussi bien que celuy de ma mère ? » Guillaume Des Autels. 144 Aussi dodu, grassouillet. Cf. le Pasté et la tarte, vers 164. 145 Ce babillard, ce bavard. Le Caquet des bonnes chambèrières fut, nous dit-on, « imprimé par le commandement de leur secrétaire, maistre Pierre Babillet ». 146 Je ne saurais choisir entre les deux. 147 D’une même forme. 148 BM : Celuy 149 Peu m’importe. 150 De bagou. 151 Nous dirions : C’est la meilleure ! 152 BM : veult (Je veux rester.) 153 Je ne donnerais pas la valeur d’un pet. Tissier comprend : « Peu importe que je sois… » 154 BM : naudet erie (Il manque une lettre.) 155 Ma femme, normandisme. 156 Cette devise pourrait servir dans toutes les farces où un simple Badin, à force de ruse naïve, l’emporte sur de plus intelligents ou de plus forts que lui. C’est par exemple le dernier vers qu’énonce le meunier du Musnier et du Gentil-homme, après avoir mouché un noble. Le héros du Poulier à sis personnages, ayant remis à leur place deux nobles qui asticotaient sa femme, en tire cette morale : « À trompeur, tromperye luy vient. »