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L’ARBALESTRE
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Cette farce normande des années 1510 montre une scène de ménage entre une femme aux prétentions intellectuelles, et son mari (joué par un Badin) qui prend toutes les expressions au pied de la lettre et n’a aucun sens du second degré.
Source : Manuscrit La Vallière, nº 7. Un correcteur est intervenu sur le manuscrit longtemps après le copiste, parfois judicieusement mais pas toujours. Voir la notice du Raporteur. Je m’en tiens au texte original chaque fois qu’il est acceptable.
Structure : Rimes plates.
Cette édition : Cliquer sur Préface. Au bas de cette préface, on trouvera une table des pièces publiées sur le présent site.
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Farce nouvelle
à deulx personnages
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C’est assavoir :
L’HOMME
Et LA FEMME [sage Sibile]
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Et est la Farce de l’Arbalestre
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LE MARY commence 1 SCÈNE I
Je ne say qui me consila2,
Qui mesmement me barbouila3
De m’aler mectre en mariage.
J’estoys, ce m’est avys, plus sage
5 Devant4 que fusses marié.
Maintenant, je suys harié5.
Je faulx6 tousjours à mon affaire,
Voy(e)re dea, et ne sçay rien faire
Qui plaise ne qui soyt utile
10 À ma femme, Sage Sébile7.
Maryé fus à la male heure8.
Quant je luy ris, elle me pleure ;
Quant je [me] pleure, elle s’en rit.
Quant je me joue, el se marit9 ;
15 Quant je me maris, el se joue.
Quant je jou[t]e10, el[le] faict la moue.
Quant je chante, el[le] tence et compte ;
Quant je compte, el[le] se mescompte.
Quant je dors, el[le] veult veiller ;
20 Quant je veille, el veult som[e]iller.
Quant je danse, el[le] se repose ;
Quant je repose, elle s’opose.
Quant je veulx menger, el[le] jeusne ;
Quant je jeusne, elle [se] desjeune.
25 Quant je faictz le sage, el se moque ;
Quant je faictz le sot, el se toque11.
Quant je ne faictz rien [qui soyt bien]12,
Elle me maudict comme un chien.
Je ne say que faire à cela,
30 Synon que je lesse tout là
Et m’en aler à l’avanture.
LA FEMME
Qui espouse un sot de nature13
Ne séroyt14 son plaisir avoir.
Je le puys bien, pour moy15, sçavoir :
35 J’ay16 un sot, le plus desplaisant,
Plus ydïot, plus mal plaisant
Que jamais la terre en porta.
Ne say qui son sens transporta17,
Car il n’en a pas demy livre.
40 Pleust à Dieu qu’en fusse délivre18,
Et jamais ne vînt à mon estre19 !
Hélas ! quel desplaisir puisse estre
À femme de cœur et courage
D’avoir un sot en mariage !
45 Sage[sse] n’ayme poinct folye :
Folye n’est que mélancollie.
Sagesse requiert gravité ;
Follye, folle agilité.
Sagesse veult parler à traict20 ;
50 Folye, un fol parler atrect21.
Et moy qui suys sage et subtille
(Mon nom est dict « Sage Sibille »),
Qui ay prins fol en mariage,
Comme aurai-ge donc le courage
55 De l’aymer et luy faire chère22 ?
Que la conjecture23 m’est chère !
Que maudict soyt-y qui la fit !
Y cuydoit faire mon profit,
Mais y me fit mon dommage.
LE MARY
Voire !
60 Elle me vouldra faire acroire
Que je suys fol de droicte ligne.
Jamais Noué24, qui fit la vigne,
N’eust une sy belle entendoire25.
Car je say bien l’ard de mémoyre26 ;
65 N’esse pas chose sage et bonne ?
LA FEMME
Qui vit onc sy sote personne,
Sy fol, sy dÿot et sy nysse27 ?
Je ne croys pas [que] du sens n’isse28 :
Il est sot. De rien ne luy c[h]ault.
LE MARY
70 Il ne luy chault soyt froid ou chault.
Je ne say sy j’en guériray.
LA FEMME 29
Sy vous guérissez, j’en yray
En voyage30 jusques bien loing.
LE MARY
Escoutez : il n’est pas besoing
75 Que vous y alez sans parler31 ?
LA FEMME
Non. Vous, vous n’y sariez32 aler.
LE MARY
Non pas avec vous, ce me semble :
Car sy nous estions quatre33 ensemble,
Nous ne gaignerions pas.
LA FEMME
Allez !
80 Vous estes sot, plus n’en parlez !
LE MARY
Sy je suys fol, y me fault taire.
Mais sy je prenoys ung cristère34
Pour fayre vyder ma folye,
Hen ?
LA FEMME
[Hélas,] quel mélencolye !
85 Et ! mon Dieu, que je suys tennée35 !
LE MARY 36
Vous souvyent-il de l’autre ennée37
Des grans neiges, que j’abatis
Les chièvres et que combatis
Ces marmotes de pommes cuytes ?
90 Et ! benoist Dieu, les belles truites 38 !
[Yl estoyent]39 aussy grandes qu’anges,
Aux « enseignes »40 que les arcanges
Myrent le siège en Paradis,
[Où] j’en vis entrer plus de dis,
95 Qui batirent bien un sergent41.
LA FEMME
Tenez, métez là vostre argent42 ?
Qu’esse d’un fol ! Qu’esse d’un sot !
LE MARY
C’est un homme comme un falot43,
Qu’on apelle « sot » quant on huche44 ;
100 Ou un Sot qui a coqueluche45,
À qui ne chault des morfondus46,
Autant des rés47 que des tondus.
Esse pas bonne invention ?
LA FEMME
Avez-vous ceste intention48 ?
105 À quel fin cuydez-vous venir ?
LE MARY
À quel fin ? Joyeux me tenir,
Mener bon temps, faire grand chère.
Vous estes bonne ménagère49,
J’entens assez bien ce passage.
LA FEMME
110 Sy vous fault-y devenir sage
Ou, autrement, trop je me deux50.
LE MARY
Vous l’êtes assez pour nos51 deux.
Dict-on pas en toute saison
Qu’i ne fault, en52 une maison,
115 C’un sage pour la faire riche ?
Mais sy j’estoys sage, aussy siche53,
Tout le monde s’en moqueroyt,
Et par la rue on s’en riroyt.
LA FEMME
Vous parlez par trop folement.
LE MARY
120 Et vous, aussy, sy sagement
Que je ne vouldroys pas estre ange54.
Au moins, s’y vient quelc’un estrange55
Parler de sens ou de folye,
Nous n’airons pas mélencolye56
125 De sçavoir qu’on doyve57 respondre.
Mais qui feroyt un sage pondre58,
Escloret-il poinct des petis ?
J’en passeroys mes apétis59,
Se g’y estoys.
LA FEMME
Jésus Maria !
130 Femme qui tel sot mary a
Est bien comblée de douleur.
C’est la femme d’un basteleur,
Qu’on apelle Mal-assenée 60.
LE MARY
De Dieu soyt maudict la journée
135 Quant je vous pris61 !
LA FEMME
Sainct Jehan, amen62 !
LE MARY
Pour en parler tout clèrement,
Peu s’en fault que je ne vous quicte.
Je ne voy Jenne63 ou Marguerite
Qui face à son mary tel noyse.
LA FEMME
140 Vostre folye sy fort me poise64
Et me vient trop contrarier.
LE MARY
Va ! Quant j’estoys à marier 65,
J’estoys sage, ce me sembloyt :
Car tout le monde s’assembloyt
145 Pour me venir vouèr deviser.
Maintenant, je n’ose aviser
Un passetemps ou quelque dance
Q’incontinent66 on ne me tence.
Je ne say plus que67 je doy fère.
LA FEMME
150 Y fault penser à vostre affère.
Vostre folye est descouverte.
LE MARY
Que68 deable ay-ge ?
LA FEMME
La teste verte69,
Fumeuse et toute lunatique.
Vostre teste est tropt fantastique70,
155 Y vous la fault faire mûrir.
LE MARY
Y fauldroict donques bien courir,
Pour éviter ce danger-là ?
LA FEMME
Brief71 vous le ferez !
LE MARY
Et, holà !
Faire mûrir72 ma teste, [voire] ?
LA FEMME
160 Sy de cela me voulez croire,
On vous tiendra sage personne.
LE MARY
O ! que plus mot on ne me sonne :
Je say bien comme je feray.73
.
Or çà ! Or, sage74 me vouéray. SCÈNE II
165 Sy, je feray mûrir ma teste :
Elle me fume, el me tempeste75,
Ce dict ma femme. Et sy, ne say76.
Sy m’en fault-y faire l’essay
(Car elle a guerre acoustumée)
170 Pour apaiser ceste journée.
Ce bonnect y me fault ôter,
Et puys tout soudain la77 bouter
(Affin que myeulx mon estat vaille)
Dedens ce beau chapeau de paille,
175 Mûrir comme poyres ou pommes78.
C’est faict. Voyons cy où nous sommes79…
.
Ma teste est mûre, maintenant. SCÈNE III
LA FEMME
Quel homme à faire un lieutenant
Ou quelque vaillant conseiller80 !
180 C’est bien assez pour m’en aler,
Et ! povre femme, [à la male heure]81.
LE MARY
Mais82 que ma teste soyt bien mûre,
Sy ne la mengerez-vous pas ?
Je croy qu’i fut faict au compas83,
185 Ce chapeau de paille de seille84.
LA FEMME
Hélas ! tant plus on luy conseil[l]e,
Et tant plus y faict au contraire.
Sy est-il temps de vous retraire85,
Et ne faictes plus de la beste !
LE MARY
190 N’ei-ge pas faict mûrir ma teste
Tout ainsy que vous l’avez dict ?
LA FEMME
Nénin ! Que vous soyez maudict !
Tout le cas ne s’entent ainsy.
Ostez86, ostez, ostez cecy !
195 Y vous fault bien changer de meurs.
LE MARY
Je vous demande, sy je meurs
Et que voyez ma sépulture,
Faictes-y mectre en escripture :
« Cy-gist Jehan le Sot, des Troys Cignes 87,
200 Qui aymoit la purée des vignes,
Qui trespassa près d’un bary88
Le jour au souèr qu’i fut mary89. »
Et auprès, par façon sutille90,
Y soyt mys : « La Sage Sibile,
205 Sa femme, qui n’est comme sote. »
Et faictes mectre une marote
Sur ma tombe91. Encor une foys,
Tu le feras, se tu m’en croys.
Et ! entendez bien mes propos ?
LA FEMME
210 Je n’y entens rien ; en deulx mos,
Vous parlez trop mieulx c’une vache.
Je n’avoys sur moy c’une tache92,
De quoy je suys jà indinée93.
[LE MARY] 94
Quel tache ?
[LA FEMME]
Je n’ay poinct d’ainsnée95.
[LE MARY]
215 Devant qu’entendre le sermon96,
J’auray du sens.
LA FEMME
Mais que par moy on se gouverne99.
Plus ne fault hanter la taverne,
Mouvoir de nuict ne tracasser100 ;
220 Mais vous fault désormais passer101.
Hostez ces habis figurés102…
Di-ge103 : sy très deffigurés
Qu’à Dieu et monde y semble lect104.
Maintenant, y n’ont105 un colet :
225 Tantost, y sont descoletés106,
Haricotés, deschicotés107,
Escartelés en maincte guise108.
Incessamment109, on se desguise
Sy très bien que c’est rouge rage110.
LE MARY
230 Tient-y poinct111 que je suys trop sage ?
A ! vrayment, y n’y tiendra plus :
J’en cheviray bien112.
LA FEMME
Au surplus,
Gardez bien qu’i n’y ayt que dire113.
LE MARY
Jamais ne vous entendis dire
235 Qu’abis fissent gens sages estre.
Vous vouérez que je seray mestre
Et sage, malgré que j’en aye.
Mais voy(e)rement, fort je m’émaye114
Où des beaulx habis je prendray.
240 J’en voys chercher115, et aprendray
À estre bien sage, à ceste heure.116
.
LA FEMME SCÈNE IV
La povre femme qui demeure
Avec un sot n’est pas contente.
Y ne faict chose à mon entente :
245 Tout son faict est contrère au mien117.
Et ! comment séroie-ge avoir bien ?
Y n’est pas possible, en ce monde.
Car sus quel propos [qu’]y se fonde118,
Jamais au boult n’en sayt venir.
250 Qu’i fût pendu, sans revenir,
Où est le fondateur de Romme119 !
.
LE MARY 120 SCÈNE V
Je suys maintenant un sage homme.
Contrepéter me fault-y rien121 ?
Sens-je poinct mon homme de bien ?
255 Ouy dea, ouy ! Ne sentez-vous poinct ?
Sibile, sui-ge bien en poinct ?
À vostre avis, que vous en semble ?
LA FEMME
Toute douleur à moy s’assemble.
Voyez : il est fol de nature.
260 Qui vit onc telle créature ?
J’en ay le cerveau tout cassé.
LE MARY
C’est ung habit de tresparsé122,
Quelque chose que voulez dire123.
LA FEMME
Y me fera mourir de rire,
265 De luy voèr sy sote manière.
LE MARY 124
Or, regardez-moy par-derière,
Se je suys sage devenu.
Je seray pour sage tenu,
Et ne le cuydoys jamais estre.
270 Je suys sage sans avoir maistre ;
Mais en vouécy bien la mêtresse.
LA FEMME
Mourir me fera de détresse,
Car il n’entent poinct le passage125.
LE MARY
Sy cest abit ne me faict sage,
275 Je ne say plus que126 je feray.
LA FEMME
Jamais à mon gré ne seray127.
Que le deable vous rompt la teste !
LE MARY
Or regardez, à ma requeste,
Qu’en grand bonté128 maintenant suys.
LA FEMME
280 Sy vous tairez-vous, sy je puys !
Qu’en un gibet fussiez pendu !
Et, dea ! aussy, j’ey entendu129 :
« Quant y trote parmy la rue,
Y court130, y mort, regibe et rue. »
285 Et chascun n’en faict que parler.
LE MARY
Et ! comme doi-ge donc aler ?
Dictes, car je ne le say pas.
LA FEMME
Y vous fault marcher par compas131,
Et, pour sagesse entretenir
290 Et une grand fasson tenir132,
Marcher133 de plomb poisantement.
LE MARY
Par mon serment, par mon serment !
Je suys sage homme, [ou] autant vault.
Je say maintenant [qu’i me fault
295 Pour]134 estre sage, ne vous chaille.
LA FEMME
Y ne fera chose qui vaille.
Que le Dieu le puisse maudire !
LE MARY 135
Qui esse qui veult contredire
Que [je ne]136 marche pesanment ?
300 Ouy, ouy, sy très poisantement
Que les espaules m’en font mal.
[Et !] par mon âme, c’est grand mal137
De marcher ainsy comme moy !
Sibile, n’en ayez esmoy :
305 Je suys sage comme un lévrier138.
LA FEMME
Et ! Nostre Dame, quel ouvrier !
Sortir me fera hors du sens.
LE MARY
Agardez, Sibile : je sens,
En quelque lieu, dur comme gaulles.
LA FEMME 139
310 Et en quel lieu ?
LE MARY
Sur mes espaules.
Regardez !
LA FEMME
Son sens se transporte.
LE MARY
Nostre Dame ! Ma mye, je porte
Poisant plus de vingt-et-dis livres140.
Alez regarder à vos livres
315 Se je suys sage devenu.
LA FEMME
Qui en a de plus sot congneu,
Se n’est pas141 le deable d’enfer ?
LE MARY
Qui vous emporte au fons d’Enfer,
[S’]il est assez fort pour ce faire !
320 Et, dea ! on ne séroyt rien faire
Qui soyt à vostre gré142.
LA FEMME
Gros veau !
Or pensez qu’il est bien nouveau143,
Lourdault et ung parfaict ânon.
Il144 ne s’entent pas ainsy, non !
325 Y s’entent : marcher puissamment,
Sans courir trop rebèlement
Comme les fos de sens délivres145.
Mais vous n’avez poinct veu les livres
Où quelque bonne chose eslire146.
LE MARY
330 Et ! sy sai-ge quasy bien lire ;
Mais je ne congnoys poinct mes l[ett]res.
Je faictz des espistres, des lestres147
C’un mileur lisart ne fit148 onques.
LA FEMME
Or çà ! que n’aprenez-vous donques
335 En regardant les sages fais
Des nobles vertueux parfais,
Des sages gens du temps passé ?
Mais bien tost vous estes lassé
De lire en un livre un seul poinct.
340 Y149 pense ail[l]eurs, et n’entent poinct
À ce qu’i lict pour le comprendre.
Par quoy, n’avez garde150 d’aprendre.
Un sage et151 de droicte nature
Doibt tousjours mâcher l’escripture
345 Et gouster le sens.
LE MARY
Ha ! j’entens.
Par ma foy ! j’ey vescu long temps,
Mais jamais n’entendis cela.
Mâcher l’escripture ? Holà !
Je say bien comme je feray.152
.
LA FEMME SCÈNE VI
350 Jamais à mon gré ne seray,
Car certe(s), y n’a nule science.
Mais y fault prendre en pacience
Pour l’amour de Dieu, c’est raison.
Mais pensez-vous quelle maison
355 Seroyt bien gouvernée de luy ?
Par ma foy ! j’en ay de l’ennuy
Plus la moytié153 que je ne monstre.
.
LE MARY 154 SCÈNE VII
Or çà ! Dieu me doinct bonne encontre155 !
Jamais je n’en fus desjuné156.
360 Seray-ge bien endoctriné ?
Y sera fort à avaler.
LA FEMME
Et, sotart !
LE MARY
Laissez-moy dîner.
Abile passe157, tout amasse.
LA FEMME
Et ! mais que faictes-vous ?
LE MARY
Je mâche
365 L’escripture. Mais pour le seur158,
Je n’avale morceau, de peur.
Tenez : y ne passera poinct.
LA FEMME
Hélas ! A ! suys-je mal empoinct !
Jamais je n’en seray délivre159.
LE MARY
370 J’en ay mengé près d’une livre,
Et sy160, ne suys sage ne rien.
LA FEMME
Jamais, avec luy, n’aray bien :
Car y n’a ne sens, ne manyère.
LE MARY
Par ma foy ! sy je n’ay à boyre161,
375 Jamais le sens n’avaleray.
LA FEMME
Jamais à vous ne parleray,
Sotart remply de sote affaire !
LE MARY
Et ! comme162 deable doy-ge faire ?
Pour Dieu, qu’on m’en face un extraict163 !
LA FEMME
380 Comment ? Y fault parler à traict164
Sans plus en estre [en grand ennuy]165.
LE MARY
Vraiment je parleray à luy,
Puysqu’à mon sens il est propisse166.
LA FEMME
Y dira cy quelque malice167
385 Dont me fera mourir de rire.
LE MARY, parlant à une flesche.168
Traict, escouste que je veulx dire !
Traict, mon amy, entens-tu bien ?…
Je seray, Traict, je le say bien…
Traict, mon amy, je suys abile…
390 Mais ma femme, Sage Sébile…
Traict, mon amy, féré devant169…
Et ! Traict, mon amy, plus savant…
Traict, mon amy, Traict, mon amy !…
Je suys sage, Traict, à demy…
395 Traict, mon amy, entemps, entemps !…
Se je suys sage à peu de temps,
Je seray, Traict, à toy tenu…
Hay, hau, Traict !…
Je suys retenu170
Des sages, le Traict escoustant171.
400 A ! vous n’en sariez dire autant.
C’est bien parlé à Traict, cela ?
LA FEMME
Que le premier qui m’en parla,
D’estre avecque vous, fût pendu !
LE MARY
Ma foy ! y m’a bien entendu,
405 Le Traict : je [feray demain rage]172.
LA FEMME
Vous estes fol !
LE MARY
Vous estes sage !
Or, escoustez à ma requeste :
Vous m’avez faict mûrir ma teste
Affin qu’elle ne fût plus fole.
410 La vostre est sage, et aussy, mole.
Y la faict bon contregarder173 ;
Et à fin de la mieulx garder,
Et que vos sentences174 soyent vrayes,
Je l’afluberay175 de mes brayes,
415 Affin que la Science [n’]en sorte176.
LA FEMME
Me prenez-vous de telle sorte ?
Et ! que j’endure tout cecy177 ?
LE MARY
Et ! j’en seray bien resjouy :
C’est pour garder vostre Science.
LA FEMME
420 Non feray, par ma concience !
Hostez, hostez ! Quel galopin !
LE MARY
Et ! non feras ? Par sainct Crespin178 !
Vous m’avez faict grandes détresses.
Çà179 ! quant les femmes sont mêtresses,
425 Elles doibvent les brès porter180.
LA FEMME
Pour Dieu, veuillez vous déporter181 !
Laissez-moy, c’est trop babillé !
LE MARY
Du viel temps m’avez despouillé182 ;
Je vous habil[l]e du nouveau.
LA FEMME
430 Et ! comment ? Seriez-vous sy veau
De vouloir faire telle chose ?
Par l’âme qui en moy repose !
Yl entent mal son cas à trect183.
LE MARY 184
Vous m’avez faict parler à Trect
435 Comme se j’estoys unne beste ;
Y fault parler à l’arbalest(r)e !
LA FEMME
Non feray, vrayment !
LE MARY
Sy ferez !
Par ma foy, vous y parlerez !
LA FEMME
Hélas, mon amy, atendez !
440 Dictes comme vous l’entendez :
Par ma foy ! je ne l’entens mye.
LE MARY
Or dite(s) : « Arbalestre, ma mye,
J’ey faict cela, j’ey faict cecy. »
LA FEMME
Nostre Dame, que de soucy !
445 « Arbalestre, j’ey ung mary
Qui faict souvent mon cœur mary,
Et est de mauvaise nature,
Et la plus sote créature. »
LE MARY
[Vous le]185 dictes.
LA FEMME
Je le dis aussy :
450 « Et qui n’a morceau de soucy186,
Et qui me fera mourir d’ire. »
LE MARY
Or achevez donques de dire !
LA FEMME
Ô benoist Dieu, miséricorde !
LE MARY
Y vous fault parler à la corde.
LA FEMME
455 Non feray, par ma concience !
LE MARY
Sy ferez, car vostre Science
Le requiert.
LA FEMME
« Corde, que tu fusse[s]
Au gibet, et estranglé eusse[s]
Mon mary ! »
LE MARY
Et ! c’est très bien dict :
460 Nous en au[r]ons un beau crédict
Tout [partout], par long et par lé187 !
LA FEMME
Comment ?
LE MARY 188
C’est sagement parlé,
De souhaicter son mary pendre.
LA FEMME
Hostez-la, de peur de mesprendre189 ;
465 À cela, je ne me congnoys.
LE MARY
Y vous fault parler à la noix190
Ou, par Dieu, il y aura noyse !
LA FEMME
Non feray, car trop y me poise !
LE MARY 191
Sy ferez !
LA FEMME
Or çà ! « Noix, ma mye,
470 Mon sot mary de sens n’a mye.
À tous les coups, son sot sens erre. »
LE MARY
Y vous fault parler à la serre192,
Pour m’ôter hors de tous ennuictz.
LA FEMME
Je prye à Dieu que dens un puys
475 Puissez-vous estre bien serré,
Et de la taigne reserré193 !
Mon mary, tout cela ceres.
Tenez, en avez-vous assez ?
LE MARY
Or sus, plus ne me menassez !
480 C’est quasy tout un, de nos deulx194 :
Sy vous vous plaignez, je me deulx.
Femme ne doibt poinct entreprendre
De vouloir son mary reprendre
Devant les gens que bien à poinct195.
.
485 Affin qu’on ne me dise poinct
Que je veuilles parler196 des femmes
Et gecter sur elles aucuns blâmes,
De ce faict ne déplaise à Dieu !
[S’yl y a là]197, en aucun lieu,
490 Un mary qui soyt de la sorte
De moy, à luy je m’en raporte.
Car l’homme faict la femme telle
Qu’i la veult : ou doulce, ou rebelle.
Ou en luy, n’a poinct de raison.
495 Adieu ! Excusez le blason198 !
.
FINIS
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1 Il est devant son établi de savetier. Son épouse, assise, file sa quenouille en lui tournant le dos. Dans les ménages de savetiers, fort pauvres, les femmes vendaient leur ouvrage : « Vrayement, si n’estoit que je fille, (…)/ Vous mourriez de fain, marmouset ! » (Ung Savetier nommé Calbain.) Chacun des époux monologue en feignant de ne pas entendre l’autre. 2 Me conseilla. 3 Me barbouilla, me bredouilla. 4 Avant. 5 Harcelé. 6 J’échoue. 7 Sibile se fait appeler ainsi (vers 52). Ancêtre des Précieuses et grande lectrice de niaiseries, elle a trouvé dans un de ses livres (vers 314) ce cliché qui dépeint traditionnellement la Sibylle de Cumes : « À Cumes, où il trouva la saige Sibille. » Le Grand Olympe des histoires poétiques. 8 Pour mon malheur. 9 Le verbe « se marrir » [se fâcher] est incontournable dans les farces conjugales, où les maris sont toujours marris. Idem vers 15, 202, 446. 10 Jouer se lit déjà au vers 14. Jouter = copuler : cf. Ung jeune Moyne, vers 316. 11 LV : moque — Correcteur : toque (Elle se frappe la tête.) 12 Le correcteur a rendu illisible le texte original en le recouvrant avec : elle ne fet rien 13 Un malade mental. Idem vers 259. 14 Ne saurait, ne pourrait. Même normandisme aux vers 246 et 320. 15 Quant à moi. 16 LV : cest 17 Mit hors de lui. Idem vers 311. 18 Délivrée. Idem vers 327 et 369. 19 À mon domicile. 20 Posément. Idem vers 380 et 433. 21 LV : a trect (La folie attrait, attire de folles paroles.) 22 De lui faire bonne figure. 23 LV : corecture (Influencé par le latin corectura, le copiste a mal lu l’abréviation cõiecture. Même faute dans la Geste de Liège, de Jehan des Preis, que le Dictionnaire du moyen français <ATILF> donne malencontreusement en exemple à l’entrée « correcture », laquelle n’a pas lieu d’être.) Que ce projet m’est pénible. 24 Noé fut le premier à cultiver la vigne et à s’enivrer. Villon commence une ballade contre un ivrogne ainsi : « Père Noé, qui plantastes la vigne ! » Comme tous les savetiers, le Mari adore le vin : vers 200, 218, 374, etc. 25 Un si bel entendement que moi. « J’ay assez belle entendouoire. » Rabelais, Quart Livre, 27. 26 Le Mari n’a bien sûr aucune notion de l’ars memoriæ qu’enseignaient les rhétoriciens. Il fait juste allusion au vin, qui développe la mémoire : « Me donnez à boyre :/ J’en eusse ung peu meilleur mémoyre. » Trote-menu et Mirre-loret. 27 Diot = idiot (les Veaux, vers 102). Nice = stupide (Jehan qui de tout se mesle, vers 183). 28 Qu’il sorte du sens épisodiquement, qu’il ait des crises de folie. « Et dussiez-vous yssir du sens. » La Pippée. 29 Elle se tourne vers son mari. 30 En pèlerinage, pour remercier saint Acaire ou saint Mathelin, qui guérissent les fous. 31 Certains pèlerinages devaient être accomplis en silence. Voir la note 70 du Grant voiage et pèlerinage de Saincte-Caquette. 32 Sauriez, pourriez : vous êtes trop bavard pour cela. 33 Quatre hommes face à une bavarde comme vous. Le mari a plus d’esprit que ne le prétend sa femme. 34 Un clystère ne vide que les intestins, pas le cerveau. 35 Tannée, tourmentée. Cf. les Femmes qui demandent les arrérages, vers 162. 36 Il va débiter une fatrasie composée sur des noms de tavernes rouennaises. L’idée sera reprise à Rouen vers 1556 dans le Discours démonstrant sans feincte comme maints pions font leur plainte <Montaiglon, XI, 73-82>, où trois de nos tavernes ont subsisté : l’Ange, la Pomme d’Or, et la Chèvre. 37 De l’année. 38 LV : tripes (La Truite est l’enseigne d’un cabaret de Rouen.) Ces truites belliqueuses nous ramènent aux batailles de Carême, dont les guerriers sont des poissons. 39 LV : y lestouent (Elles étaient.) 40 À telle enseigne, de sorte que. Jeu de mots sur l’enseigne qui indique par un dessin l’emplacement d’une taverne. 41 Faux : l’entrée du paradis est défendue aux sergents. Voir les vers 123-130 de Troys Galans et un Badin. 42 Les femmes de savetiers reprochent toujours à leur mari de se ruiner à la taverne : voir les vers 339-342 de Deux hommes et leurs deux femmes, ou les vers 155-156 de Serre-porte. En 1556, un autre Rouennais publiera le Plaisant quaquet et resjuyssance des femmes pour ce que leurs maris n’yvrongnent plus en la taverne <Montaiglon, VI, 179-189>. 43 Un joyeux compagnon. Cf. la Pippée, vers 787. 44 Quand on l’appelle. 45 C’est le bonnet qui coiffe les Sots. Double sens : une épidémie de coqueluche avait sévi en 1510. 46 Qui se fiche bien des malades qui toussent. 47 Des rais, des rasés. Dans les siècles précédents, on appliquait aux fous une tonsure particulière. Bien qu’inapte au langage, le Mari jongle en virtuose avec tous les codes de la sottie. 48 LV : inuention 49 Vous lésinez sur la nourriture et sur le vin. 50 J’en souffre (verbe se douloir). Idem vers 481. 51 Nous. Même normandisme à 480. 52 LV : quen 53 Chiche : et aussi avare, comme vous. Cf. la Réformeresse, vers 103. La sagesse est toujours assimilée à l’avarice : voir le Dialogue du Fol et du Sage. 54 Les anges doivent supporter les sages, qui sont les seuls à gagner le Paradis. 55 D’étranger : de l’extérieur. 56 Le souci. 57 Ce que nous devrons. 58 Si on faisait pondre un sage. Seuls les Sots naissent dans des œufs. 59 Je les mangerais volontiers. 60 LV : asenee (Une mal assenée est une femme mal mariée.) Cette chanson plaisait aux dramaturges : « La mal assenée/ Qu’on appelle femme du Bateleur. » (Jeu à .IIII. personnaiges.) Dans la Vie monseigneur sainct Loÿs, de Pierre Gringore, l’épouse du Bateleur se nomme Mal-assenée : « Se j’avoye cy Mal-assenée,/ Ma femme, je vous monstreroye/ Comme c’est que j’estouperoye/ À ung besoin le “trou de bise”. » Dans la Vie de sainct Christofle, de Claude Chevalet, la femme du bateleur s’appelle aussi Mal-assegnée. 61 Où je vous pris pour femme. 62 Prononcé à la française, ce mot rimait en -ment. Voir la note 160 de Régnault qui se marie. 63 Forme locale de Jeanne : « Jenne, qui filait de la layne. » (La Muse normande.) Le mari compare sa mégère à deux de leurs voisines. 64 LV : poisse (Me pèse. Idem vers 468.) 65 Cette chanson commence le Savatier et Marguet. Les savetiers sont d’intarissables chanteurs : voir le vers 17. 66 Sans qu’aussitôt. 67 Ce que. 68 LV : et quel 69 Pas assez mûre. « Mais tu as la teste si verte. » (L’Aveugle et Picolin.) L’un des Sotz triumphans se nomme Teste Verte. 70 Fantasque. Ce vers a été ajouté par le correcteur. 71 Rapidement. 72 LV : murer 73 Il va ramasser un chapeau de paille derrière son épouse, qui est toujours assise en train de filer. 74 LV : sa je (Le prétendu sot arrive à commettre des calembours.) Je me verrai sage : je le deviendrai. 75 Ma tête s’échauffe (vers 153) et devient tempétueuse. 76 Et pourtant, je ne sais. 77 LV : le (La mettre, ma tête.) 78 On pose les fruits sur de la paille pour les faire mûrir. « Avec le tems & la paille, les nèfles meurissent. » (Dict. de l’Académie françoise.) Le Mari plonge sa tête dans le chapeau de paille. 79 Il palpe sa tête pour voir si elle a mûri. Toujours plongé dans le chapeau, il retourne devant Sibile. 80 Ces deux fonctions exigent un minimum de sagesse, et un chaperon plus austère qu’un chapeau de paille. 81 LV : malureuse (Voir le vers 11.) 82 Pour peu. 83 Sur mesure. 84 LV : seigle (Les deux mots sont synonymes. « Il atrapa les derniers, et les abbastoit comme seille, frapant à tors et à travers. » Gargantua, 43.) 85 De vous retirer de ce chapeau. 86 Sibile ponctue chaque mot d’un coup de quenouille sur le chapeau. 87 LV : lignes (La taverne des Trois Cygnes, rue Saint-Romain, voisinait avec celle de l’Ange, nommée au vers 91.) Les épitaphes parodiques sont monnaie courante dans les farces : voir les vers 213-219 des Frans-archiers qui vont à Naples, les vers 192-194 de l’Avantureulx, ou les vers 513-518 du Testament Pathelin. Le Mari a d’ailleurs les mêmes préoccupations que ledit Pathelin, qui veut être inhumé « en une cave, à l’advanture,/ Dessoubz ung muy de vin de Beaulne ». 88 D’un baril de vin. Triboulet meurt dans les mêmes conditions. 89 Le soir où il fut contrarié. 90 Subtile : la signature d’une épitaphe est en caractères plus fins que le texte. 91 On enterrait les fous en titre d’office avec leur outil de travail. 92 Qu’un défaut. 93 À cause de laquelle je suis maintenant rendue indigne. 94 LV : la femme (Le correcteur, qui n’a pas mieux compris ce passage que le scribe, distribue les deux vers précédents au Mari.) 95 LV : desiune (De sœur aînée.) Dans les familles modestes, c’est la sœur aînée qui reçoit la dot et qui peut donc se marier. Sibile regrette d’avoir été l’aînée. Les Précieuses auront la même répulsion pour le mariage, qu’elles nommeront l’amour permis, ou l’amour fini, ou l’abîme de la liberté. 96 Avant que ne sonne l’heure de la messe. Le découpage du temps, qu’il soit annuel ou journalier, appartenait à l’Église, qui n’a pas vu d’un bon œil l’apparition des montres individuelles. 97 Raccourci normand de « par saint Jean ! ». Cf. les Sobres Sotz, vers 452. 98 Vous aurez du sens, de la sagesse. « Mon » est une particule de renforcement : « Par saint Jehan ! ce ne feray mon ! » La Mauvaistié des femmes. 99 Pour peu que vous m’obéissiez. 100 Ni aller et venir. « Tracasser de nuyct sans chandelle. » Marchebeau et Galop. 101 Passer votre folie, vous assagir. 102 LV : seigneures (Décorés de motifs à l’ancienne mode. « Manteaulx de satin figuré. » ATILF.) Ce mot appelle un calembour sur défiguré. « C’est satin deffiguré. » Le Capitaine Mal-en-point. 103 Je veux dire. Cette formule d’autocorrection est un des gags de l’Avantureulx, aux vers 16, 330 et 347. 104 Cela semble laid, démodé. 105 LV : lont (Les habits masculins à la mode en ce début du XVIe siècle se contentent d’un « bas collet », parfois presque inexistant. Cf. Gautier et Martin, vers 212 et 245.) 106 Aujourd’hui, ils sont dépourvus de collet. 107 Harigotés = enrichis d’ornements tailladés. Déchiquetés = ornés de franges. « Sont mignons et asriquetés,/ Ont les chapeaux déchiquetés. » Éloy d’Amerval. 108 LV : guisse (Découpés de mainte façon.) L’auteur de la pièce, comme tous les satiristes de l’époque, jette un regard critique sur la mode. 109 LV : Insesanment (Sans cesse. Quelques dandys changeaient de parure plusieurs fois par jour.) 110 C’est de la folie. « Ce vent faict faire rouge rage. » Sermon joyeux des quatre vens. 111 Cela ne tient-il pas au fait. 112 Je viendrai bien à bout de cette sagesse. 113 Qu’il n’y ait rien à redire. 114 Je m’émeus. 115 Je vais en chercher. 116 Il sort par le rideau de fond. 117 LV : bien (À la rime.) 118 Quoi qu’il veuille faire. 119 Le plus loin possible, car nul ne savait où reposait le corps de Romulus. Sibile est une inconditionnelle de la pendaison : voir les vers 281, 403, 458. 120 Il revient en loques, après avoir « déchiqueté » ses habits à grands coups de ciseaux. 121 Dois-je encore faire quelque chose pour imiter les sages ? 122 LV : trespasse (Transpercé. « Me tresparsans jusques aux flans. » Villon.) C’est l’habit de quelqu’un qui a reçu un coup de lance. 123 Quoi que vous en disiez. 124 Il se livre devant sa femme à un défilé de mode. 125 LV : pasage (Il ne comprend pas ce que je lui ai dit.) Ces 2 vers s’adressent au public. 126 Ce que. 127 Jamais je ne serai à ma convenance. Même vers que 350. 128 Qu’en grande perfection. 129 J’ai entendu dire de vous. La Seconde Moralité fustige également la démarche chaotique des Sots : « Mais marchez droict sur vos talons/ Sans fléchir ni faillir en rien ;/ Encor ne sçaurez-vous si bien/ Marcher qu’il n’y ait à redire. » 130 « Il faut marcher tout bellement/ Et faire le sage en la rue./ Quand un fol une pierre rue [lance],/ Quand il court, ou qu’il tourne ou vire,/ Le monde ne s’en fait que rire. » Dialogue du Fol et du Sage. 131 D’un pas mesuré. 132 Et pour avoir de l’allure. 133 LV : marchant (Marcher « à pied de plomb : slowly, dully, heavily, with leaden heeles. » Cotgrave.) 134 LV : qui ne fault / a (Ce qu’il me faut pour.) 135 Il charge sur son épaule un énorme sac de vieux souliers. 136 LV : ne me 137 LV : trauail (C’est une grande peine.) 138 On dit seulement « habile comme un lévrier », dans le sens de rapide. 139 Vu le sens grivois de « gaule », elle espère que son mari parle de sa braguette. 140 Vingt-et-dix (sic !) = 30. Le Mari porte donc 15 kg. 141 Connu, si ce n’est. 142 LV : grey (Voir le vers 276.) Le Mari laisse tomber son sac sur les pieds de Sibile. 143 Novice. « Tu es encore bien nouveau ! » (Messire Jehan.) Ces 2 vers s’adressent au public. 144 Ce que je vous ai dit. 145 LV : de liures (Comme les fous privés de sens.) 146 Où il y a une bonne idée à retenir. 147 Je vous dicte des lettres pour mes fournisseurs. 148 LV : vit (Qu’un meilleur lecteur que moi ne fit jamais.) 149 Il. Encore deux vers destinés au public. 150 Pour cela, vous ne risquez pas. 151 LV : est 152 Il retourne en coulisse. 153 Deux fois plus. 154 Il revient avec un des livres de sa femme. Il en déchire une page et la met dans sa bouche. 155 Que Dieu m’accorde un bon succès. 156 LV : desiunee (Nourri.) À la rime, LV donne : endoctrinee 157 Le correcteur écrit : Ung habile home. Le Mari affectionne les tournures proverbiales : voir les vers 102, 114-115, 305, 424-425 et 492-493. 158 Pour le plus sûr. 159 Délivrée (note 18). La fatalité des liens indissolubles du mariage est soulignée par les quatre jamais qu’égrènent les vers 369-376. 160 Et pourtant. 161 Les Normands prononçaient baire. « Du meilleur vin y veulent baire. » La Muse normande. 162 Comment. 163 Un résumé, pour que je puisse mieux le digérer. De tels résumés s’appellent d’ailleurs des digestes : « La science des loix réduite en digestes. » Lacurne. 164 Posément. Mais un « trait » est aussi une flèche d’arbalète. 165 LV : anerty (Dans l’embarras. « Périclès fut en grant ennuy et pensif. » Les Triumphes de messire Françoys Pétraque.) 166 LV : propise (Puisqu’il est bon pour mon intelligence.) 167 LV : seruice (Ces 2 vers s’adressent au public.) 168 Il dialogue avec un carreau d’arbalète comme les Sots dialoguent avec leur marotte. Cet empilement d’anacoluthes est dû au fait que le Mari est le seul à entendre les réponses de la flèche (vers 399), qu’il tient comme un téléphone. À la lecture, ce numéro d’acteur tombe à plat. 169 Le bout des flèches est ferré pour qu’elles ne s’écrasent pas en percutant la cible. « III douzaines de boutz de laiton pour ferrer lesdites fleuches. » ATILF. 170 On m’a retenu pour faire partie des sages. 171 En écoutant ce que m’a répondu la flèche. 172 LV : seray demain sage (À la rime.) « Je feray raige ! » Raoullet Ployart. 173 Il faut la protéger. 174 LV : sciences (Vos paroles concernant la sagesse.) 175 Je vais l’affubler, la coiffer. Des braies servent accidentellement de coiffure à l’abbesse de Sœur Fessue. 176 Le Mari retire ses braies devant tout le monde, et il en coiffe Sibile. 177 LV : cela 178 Saint Crépin est le patron des savetiers. Cf. Troys Gallans et Phlipot, vers 187. 179 LV : car 180 Porter les braies : porter la culotte. 181 Veuillez y renoncer. 182 LV : habille (Vous m’avez dépouillé de mes habits de l’ancien temps. Voir les vers 221-229.) 183 À trait, calmement (note 20). 184 Il empoigne une arbalète qui sert de décoration murale. 185 LV : sote creature (C’est vous qui le dites. Cf. Deux hommes et leurs deux femmes, vers 238.) 186 Qui n’a aucun souci, qui ne pense à rien. Au-dessus de ce vers, LV ajoute en vedette : le mary. Au-dessous, il ajoute : la feᓓ 187 En long et en large : en tout lieu. Lorsqu’un homme était pendu, ce déshonneur rejaillissait sur toute la famille : « C’est déshonneur pour le lignaige. » P. Gringore. 188 Il vise sa femme avec l’arbalète. 189 De faire une fausse manœuvre. 190 La partie mobile d’une arbalète, qui tire la corde en arrière. 191 Il enclenche le mécanisme de l’arbalète. 192 La pièce qui bloque l’arbalète bandée. 193 Assiégé. 194 De nous deux : nous sommes à égalité. 195 Autrement que pour de bonnes raisons. Le congé final s’adresse au public. 196 Mal parler. 197 LV : Sy ly en a 198 La satire.